Questions au Saint-Père - France Catholique
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Questions au Saint-Père

Le pape a conversé, mardi, avec une délégation française, en abordant délibérément des sujets politiques. C'est à l'initiative des poissons roses, une formation originale de la gauche française que le rendez-vous avait été obtenu. Il y a beaucoup à en retenir !
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Jean-Pierre Denis, directeur de rédaction de l’hebdomadaire La Vie, pouvait escompter un beau succès, en rapportant sur le site de son journal, l’heure et demie de conversation que le pape François a accordé mardi à une délégation française. Délégation d’une trentaine de membres définis comme « acteurs du christianisme social ». Je ne suis, en effet, sûrement pas le seul à m’être précipité sur les propos du Pape. Et je ne suis pas non plus le seul à prolonger la réflexion que mérite l’évocation de tant de sujets brûlants. On n’est pas surpris, évidemment, par la liberté d’esprit de l’intéressé, que Jean-Pierre Denis oppose à une « papauté hiérarchique et dogmatique ». Il y aurait lieu d’ailleurs de s’attarder sur cette expression qui pose bien des problèmes. Qu’on le veuille ou pas, le fait d’endosser la succession de Pierre vous met une écrasante responsabilité sur les épaules… Que cette responsabilité ne soit pas incompatible avec la souplesse de l’intelligence et le détachement à l’égard des conformismes, les prédécesseurs de François, aussi bien Jean-Paul II que Benoît XVI, l’avaient déjà amplement prouvé.

C’est vrai qu’avec François, l’affaire prend une autre allure, lorsque la proximité va jusqu’à la familiarité et un certain sens de la provocation. Mais du coup, une égale liberté se trouve dévolue à l’interlocuteur ou au simple récepteur. Par exemple, je dirai mon étonnement de voir le Pape associer étroitement Henri de Lubac et Michel de Certeau. Il se trouve que j’ai très bien connu le premier et enregistré les remarques critiques sévères qu’il adressait au second. Mais je me demande si le Pape n’est pas resté tributaire du jeune de Certeau et ses travaux sur son cher Pierre Favre, dont la spiritualité, comme il le rappelle dans l’entretien, l’a si profondément inspiré. Il y a un autre de Certeau, très éloigné de Pierre Favre, et je ne suis pas sûr que le jésuite Bergoglio l’ait vraiment lu.

Il est un autre propos du Pape que j’aimerais aussi commenter. C’est celui qui concerne les vagues migratoires qui investissent l’Europe. Le Pape parle même « d’invasion arabe », comme d’un fait social. Mais prenant de la hauteur, il affirme : « Combien d’invasions l’Europe a connues tout au long de l’histoire ! Elle a toujours su se surmonter elle-même, aller de l’avant pour se trouver agrandie par l’échange des cultures. » L’optimisme d’un tel raccourci historique n’a d’égal que son caractère vertigineux. Car les invasions ont toujours été une épreuve, et même terrible. De quelle façon surmonterons-nous celle-là ?

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 3 mars 2016.