Ni Thénardier, ni Savonarole - France Catholique

Ni Thénardier, ni Savonarole

Ni Thénardier, ni Savonarole

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Dans une période aussi bousculée pour les catholiques, il est bien difficile de raison garder. Les procureurs sont légion, et si j’étais polémiste à la manière d’un Léon Bloy je pourrais parler aussi de nouveaux Thénardier, ces personnages peu ragoûtants inventé par Victor Hugo dans Les Misérables. Pardon, c’est plutôt violent puisqu’il s’agit d’une sorte de détrousseurs de cadavre qui profite du désastre pour faire leurs petites affaires. Bien sûr, il y a aussi les prédicants à la Savonarole qui vous livrent leurs projets mirifiques de réforme, que leur cerveau a conçu génialement de A à Z. Je doute personnellement, que toute cette cohue nous aide à faire la lumière dans nos ténèbres.

Bien sûr, il y a lieu de faire œuvre de discernement et de purification. Mais attention, l’Église n’est pas n’importe quelle institution, et s’il y a lieu parfois de la réformer sérieusement, ce n’est pas avec n’importe quelle recette, inspirée par on ne sait quelle idéologie. Le concile Vatican II s’est principalement consacré à la mise en valeur du mystère de l’Église, car ce n’est pas nous qui la fabriquons, elle nous est donnée par pure grâce divine. Et nous n’avons pas à la réinventer selon nos caprices et nos pulsions ou encore nos idées géniales. De ce point de vue, on a tout intérêt à lire ou relire les théologiens sérieux, tel le père de Lubac dans sa magnifique Méditation sur l’Église.

On ne réforme pas l’Église à coup de plans mirifiques. Car, comme l’écrivait de Lubac, pour qu’un véritable esprit de réforme s’affirme, on doit être attentif « à ne pas le laisser contaminer par le souffle d’un tout autre esprit que celui qui est à son principe ». Et de dénoncer ce qui risque de se passer : « Ce qui aurait pu provoquer un sursaut n’a plus que pour effet que de paralyser… Par ce mouvement pharisaïque, sorte de sécession intérieure, encore inavouée mais néanmoins pernicieuse, on s’engage déjà sur une voie qui peut conduire au reniement. » C’est pourquoi dans le traumatisme actuel, je privilégierai le message que vient de publier le Conseil permanent de l’épiscopat français : « Nous aurons besoin de chacun pour rendre notre Église plus sainte dans la vie de tous ses membres et dans sa manière de vivre. » C’est notre programme de carême dans la montée de Pâques.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 13 mars 2019.