Mauvaises nouvelles d'Allemagne - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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Mauvaises nouvelles d’Allemagne

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La Troisième Assemblée Générale Extraordinaire du Synode des Évêques se tiendra à Rome du 5 au 18 octobre avec à l’ordre du jour : les défis de la pastorale pour la famille dans le contexte de l’évangélisation. Le Bureau du Synode au Vatican a établi un document préparatoire avec une série de questions relatives aux efforts de l’Église pour la promotion des doctrines et pratiques — et aux différents défis à relever.

Le 3 février la Conférence Épiscopale Allemande a publié une synthèse des réponses proposées à ces questions par les vingt-sept diocèses d’Allemagne et vingt associations ou institutions catholiques notoires. (Dommage, nous n’en avons pas la liste, ce qui aurait pu alimenter le débat.) Conclusions guère agréables, ou, en fait, plutôt inquiétantes.

Voici un échantillon des remarques émises dans cette synthèse. [J’ai ajouté mes commentaires entre crochets].

Les déclarations de l’Église [N.B. déclarations, pas enseignements] sur les relations sexuelles avant le mariage, l’homosexualité, les divorcés remariés, le contrôle des naissances ne sont, paradoxalement, pratiquement pas acceptées, si ce n’est purement et simplement rejetées dans une grande majorité des cas.
La plupart des baptisés ne sont pas au courant de l’expression « Loi naturelle ».
Ainsi, la Loi naturelle est à peine établie ou détaillée au sein de l’Église, et donc délibérément ignorée car historiquement dépassée et incompatible avec l’éthique moderne. En particulier, il y a une vive critique d’un étroit déterminisme biologique — s’appuyant sur un aspect de la « Loi Naturelle » [« guillemets » agressifs] car elle ne rend pas justice à la compréhension chrétienne de l’homme.
Presque tous les couples souhaitant se marier à l’Église ont déjà vécu ensemble, souvent plusieurs années (estimation : entre 90 et 100%)… En vue de la nature définitive du lien du mariage [d’autres réponses laissent entendre que cette notion est largement repoussée en Allemagne], et, conscients qu’un mariage raté entraîne une profonde crise dans l’existence, nombreux sont ceux qui, en fait, trouvent que se marier avant d’avoir vécu ensemble est une preuve d’inconscience [vivre dans le péché serait un antidote à l’échec du mariage].

La plupart des catholiques dont le mariage a raté ne s’interrogent pas sur sa validité car ils ne considèrent pas que leur union, qui peut dans bien des cas avoir duré des années, pourrait être « nulle et invalide », mais simplement un échec. Pour eux, l’idée d’engager une procédure d’annulation serait malhonnête. Ils attendent de l’Église qu’elle leur accorde la possibilité d’entamer une nouvelle relation [au nom de quoi?], prenant exemple sur la pratique des Églises Orthodoxes.

La règle canonique d’exclusion des sacrements en raison d’un remariage civil est ressentie par ceux qu’elle touche comme une discrimination injustifiée et un manque total d’indulgence.

Il y a parmi les catholiques allemands une forte tendance à envisager la reconnaissance légale de partenariats civils pour des couples de même sexe, et un traitement identique à celui du mariage comme si c’était un devoir d’équité. Par contre, le mariage en tant que tel pour les couples de même sexe est largement rejeté. Cependant de nombreuses personnes seraient favorables à l’idée d’un rite de bénédiction pour l’union de couples de même sexe.

L’Encyclique « Humanae Vitae » (1968) sur le mariage et le contrôle des naissances n’est connue que des anciens. Elle n’a été considérée dans le domaine public qu’au sujet de l’interdiction de moyens prétendument « artificiels » de contrôle des naissances [pourquoi donc cet adverbe « prétendument »?]. Les réponses à ce sujet montrent clairement que les jeunes générations ignorent totalement cette Encyclique.

La distinction entre méthodes « naturelles » et méthodes « artificielles » de contrôle des naissances, et l’interdiction de ces dernières, est repoussée par la grande majorité des catholiques comme incompréhensible [ce n’est guère étonnant si on ne leur a jamais enseigné « Humanae Vitae »] et jamais mise en pratique.
Les réponses en provenance des diocèses sont unanimes : les catholiques [tous, y-compris le clergé?] ne considèrent pas que la contraception artificielle soit un péché, et donc implique la confession.

Le rejet largement énoncé de l’enseignement de l’Église tel que le révèle ce document est une auto-accusation de l’Église d’Allemagne. D’évidence, bien peu a été fait au cours des cinquante dernières années pour expliquer et diffuser l’enseignement de l’Église sur le mariage, la famille et la morale sexuelle. Et pourtant, les rédacteurs de ce document n’en semblent guère émus.

Ni regrets, ni remords. On ne pose à aucun moment la question : « Comment en est-on arrivé là?» Pas d’auto-critique des diocèses allemands, ni des associations et institutions catholiques touchés par cette enquête; on a l’impression que les gens succombent facilement à des comportements de péché, et qu’ils trouvent l’enseignement de l’Église risible ou choquant.

On a peine à imaginer une telle attitude passive devant le déni des enseignements fondamentaux de l’Église à propos du mariage et de la sexualité, dans la mesure où les rédacteurs avaient souci de leur défense, dont tous les catholiques sont responsables, à commencer par le clergé.

Posez-vous la question : si le Vatican avait publié une étude sur des attitudes devant l’écologie, qui révèlerait que la majorité des baptisés en Allemagne aiment mettre le feu aux forêts, massacrer le gibier, une telle information aurait-elle été renvoyée à Rome sans la moindre condamnation ou récrimination de la Conférence Épiscopale d’Allemagne ?

Nous sommes devant une tentative pour changer l’enseignement de l’Église en matière de morale sexuelle. La sociologie s’attaque à la révélation et à la raison. Les gens ont parlé, ils nous ont dit ce qu’ils veulent, et il est injuste de n’en pas tenir compte, ou de les contredire! Ou bien les fidèles d’Allemagne sont innocemment ignorants des doctrines de l’Église, ou bien elles ne leurs conviennent pas, il faut donc les rejeter.

Le Synode risque de devenir une foire d’empoigne. Peut-être est-ce souhaitable pour le bien de l’Église. La mentalité terre-à-terre qui considère l’enseignement de l’Église comme l’expression de simples opinions est destructrice de la foi. Il faut s’opposer à cette mentalité, la réfuter. L’enseignement de l’Église est inspiré par Dieu, et sa vérité ne dépend pas de ce que des catholiques médiocrement informés peuvent en penser.

Les défenseurs de l’Église doivent se tenir prêts à résister et surtout ne pas céder à la pression révélée par ce document venu d’Allemagne.


Le Père Murray, curé de la Paroisse de la Sainte Famille à New York est juriste en droit canon.

Source : Bad News from Deutschland : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/bad-news-from-deutschland.html