Le nouveau moment pro-vie - France Catholique
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Le nouveau moment pro-vie

Traduit par Vincent de L.

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Une chose qui sort de l’ordinaire s’est produite la semaine dernière. Le samedi, plus de dix mille personnes ont marché dans les rues de Rome pour défendre les enfants à naître. Des laïcs italiens organisent une marche depuis maintenant neuf ans et elle grandit, malgré l’absence de soutien des évêques italiens, y compris le pape.

Vendredi, François a encouragé les membres de l’Association Médicale Catholique à « défendre la vie », si vaguement que l’on ne peut pas dire s’il parlait de l’avortement, de l’euthanasie, de l’immigration, du climat, de la pauvreté, ou de tout à la fois (des détails plus loin).

Mais comme d’habitude, aucun évêque italien n’a participé à la Marcia per la Vita – ils ont dit qu’ils ne voulaient pas qu’elle fût vue comme seulement « catholique » bien que la raison ne soit pas claire. Et qu’ils préfèrent travailler au niveau des élus plutôt que lors de protestations publiques (même s’ils semblent soutenir d’autres manifestations publiques, par exemple sur l’immigration et la pauvreté, et qu’ils n’ont aucun partenaires naturels au gouvernement maintenant que la Démocratie Chrétienne a éclaté). La télévision italienne, par conséquent, n’a même pas mentionné que la marche avait eu lieu.

Le seul prélat italien présent dans le passé, l’archevêque Viganò, manquait, pour de bonnes raisons.

Rien de tout cela ne sortait de l’ordinaire. Et pas non plus les grandes marches à Londres la semaine dernière, et à Ottawa. Il y a également des marches dans de nombreux autres pays en Europe et en Amérique Latine, même si nous en entendons rarement parler hors de la presse catholique, et même assez peu dans celle-ci.

Non, la véritable nouveauté est que l’Alabama a interdit l’avortement la semaine dernière, par un texte voté par le parlement et promulgué par le gouverneur, Mme Kay Ivey, qui, comme un grand nombre de femmes, croit que l’avortement est la prise d’une vie humaine innocente.
De nombreux États ont maintenant adopté des lois restreignant l’avortement, et nous sommes sur le point d’assister à une bataille titanesque à la Cour Suprême, et dans la société américaine.

Les commentateurs pro-avortement s’inquiètent d’un renversement de Roe contre Wade, bien que le discrédit rapide des vidéos du Center for Medical Progress montrant Le Planning Familial vendant des parties du corps fœtal suggère qu’il est encore facile de mener le public en bateau sur de telles questions. (Souvenez-vous lorsque la ligne de Groucho Marx – « Qui allez-vous croire, moi ou vos yeux menteurs à vous ? » – était une farce).

Mais les pro-vie aussi sont nerveux, beaucoup se demandent dans quelle mesure une telle législation « extrême » facilite l’annulation de telles mesures par les tribunaux.

En tout cas, nous saurons vite si notre système juridique est totalement captif de l’idéologie anti-scientifique ou s’il est encore capable d’un débat moral rationnel. Les juges de la Cour Suprême peuvent se contenter d’envoyer aux États des questions sur l’avortement qui – comme le Juge Antonin Scalia l’a souvent soutenu – est un sujet de leur ressort, puisque le gouvernement fédéral n’a pas de compétence juridique constitutionnelle sur de tels sujets. Le droit fondamental à la vie sera probablement abordé, s’il l’est jamais, plus loin au-delà de la ligne.

Mais là, il y a des raisons d’espérer.

Les partisans de l’avortement commencent à déployer des arguments qui peuvent retarder mais n’occulteront pas la question principale. Certains États, par exemple, ont essayé de tracer une limite au moment où les battements du cœur du fœtus sont détectables, ou suivant d’autres marqueurs biologiques.

Cette semaine, un rédacteur du Washington Post a exposé en détails une nouvelle formule qui apparaît partout d’Hollywood à Manhattan : « Afin de ne pas me faire réprimander pour avoir osé humaniser un embryon, permettez-moi de déclarer pour le compte rendu que le terme exact pour « rythme cardiaque » est « activité cardiaque du pôle fœtal, parce qu’à six semaines, l’embryon n’a pas de système cardio-vasculaire, et donc pas de cœur battant complètement formé. »

*

Bel effort, mais si les gens – et les tribunaux – commencent à prêter attention à de tels détails, nous serons inévitablement amenés à décider : « Donc, quand avons-nous assez de mouvement du pôle fœtal et de système vasculaire pour appeler ce qui se produit, tout simplement un battement de cœur ? » Ce n’est pas longtemps après.

De manière similaire, lorsque même des parutions comme le New York Times le concèdent depuis plus d’une décennie, il existe une activité cérébrale rudimentaire détectable dès le début du mouvement du « pôle fœtal », il ne s’agit bien sûr pas d’un cerveau développé, mais au bout d’une dizaine de semaines, un cerveau articulé se forme.

Ces argument de défense d’un avortement effectué tôt vont être vus comme de plus en plus faibles à mesure que les gens (et les tribunaux) examinent la question plus attentivement. Y a-t-il quelqu’un qui pense qu’à mesure que la science avance, nous allons découvrir moins plutôt que plus de complexité et d’activité dans le précoce embryon ? Je serais inquiet moi aussi, si je soutenais l’avortement.

L’Église, et particulièrement le Vatican, devrait soutenir fermement cette poussée de résistance pro-vie. Les commentateurs reconnaissent que le radicalisme des nouvelles lois sur l’avortement dans l’État de New York, en Virginie et au Canada ont provoqué la réaction actuelle.
Et quoi qu’il en soit, protéger la vie humaine à naître fut et demeure la question centrale des droits de l’homme de notre époque.

Le respect de la vie humaine n’est jamais limité à un ensemble de chiffres. Mais il nous faut trouver les moyens de prendre l’exacte mesure de l’horreur. Par exemple, les autorités estiment que 2241 personnes sont mortes en traversant illégalement la Méditerranée de l’Afrique vers l’Europe en 2018. Au cours d’une année moyenne, à la frontière des États-Unis, il y a habituellement deux à quatre cents morts semblables.

Donc, en arithmétique simple : 2241 + 400 (en prenant l’estimation haute) = 2641. L’avortement aux États-Unis est à un niveau bas, « seulement » 652 639 en 2015 (même si ce nombre est nettement sous-évalué depuis que la Californie et d’autres États n’informent plus les Centres de Contrôle des Maladies).

C’est-à-dire 1788 par jour. Donc, tous les deux jours, le compte des avortements dépasse le nombre de migrants morts pour une année entière. Le Planning Familial effectue environ 1000 avortements par jour.
Personne ne connaît les chiffres mondiaux mais une bonne estimation est de 16 millions d’avortements par an, environ 44 000 par jour. Si un tel nombre d’innocents mourait pendant une émigration ou sous un régime répressif, ou par suite du racisme, ou d’un changement climatique, ou même dans une région en guerre, le monde serait – à juste titre – en effervescence.

Pourtant, très peu de gens, même ceux qui disent croire que l’avortement est une mauvaise chose – même les hauts dignitaires de l’Église – paraissent vraiment remués. Si l’on est vraiment convaincu qu’un avortement est la destruction d’une vie humaine innocente, il n’y a aucune excuse à la passivité en présence d’un carnage aussi massif, désinvolte et brutal.

Nous allons tous devoir apprendre à démystifier les expressions telles que « l’activité cardiaque du pôle fœtal » et toutes les autres justifications qui vont surgir. Mais il y a maintenant un moment spécial où un véritable changement semble possible. Et nous – les chefs de l’Église, les laïcs, tous les gens de bonne volonté – devons le saisir si nous ne voulons pas que l’Histoire disent que nous n’avons rien fait alors que des millions d’innocents étaient massacrés.

20 mai 2019

Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/05/20/the-new-pro-life-moment/

*Image : La Visitation par Tanzio da Varallo, v. 1627 [Église de San Brizio, Domodossola, Italie]

Dr. Robert Royal est rédacteur en chef de The Catholic Thing, et président de l’Institut Foi & Raison de Washington, D.C. Son livre le plus récent est A Deeper Vision: The Catholic Intellectual Tradition in the Twentieth Century (Une vision plus profonde : la tradition intellectuelle catholique au vingtième siècle), publié par Ignatius Press. The God That Did Not Fail: How Religion Built and Sustains the West (Le Dieu qui n’a pas échoué : comment la religion a construit et soutient l’Occident), est à présent disponible en édition de poche chez Encounter Books.