Le Roi caché - France Catholique
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Le Roi caché

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Christ portant la couronne d'épines.

Christ portant la couronne d'épines.

© Fred de Noyelle / Godong

Il y a une certaine ironie dans la solennité du Christ Roi de l’Univers. Une ironie qui tient à la subtilité de Sa Royauté et à l’objectif de cette royauté.

En bref, nous célébrons ce dimanche le véritable titre que Notre Seigneur Lui-même a évité. Quand les foules sont venues pour Le faire roi, il s’en est éloigné (Jean 6:15). Quand Ponce Pilate Lui a posé la question, Il a donné une réponse évasive : « Tu dis que je suis roi » (Jean 18:37). Bien que nous célébrions aujourd’hui qu’Il est Roi de l’Univers, durant sa vie terrestre Il désirait dissimuler Sa Royauté, pour être simplement « le Fils de l’Homme ».

Maintenant, l’histoire d’un roi caché nous a toujours réjouis. Dans le conte d’un homme humble et obscur dans les veines de qui coule un sang royal, il y a quelque chose qui inspire et donne espoir. Nous voyons cela pour la première fois peut-être dans le roi David, qui est le moindre de sa famille et est pourtant divinement choisi, oint et élevé au trône d’Israël. Il y a Arthur, le roi inconnu qui seul est capable d’extraire l’épée de la pierre. Aragorn, le héros de Tolkien cache son ascendance royale jusqu’au moment de réclamer la couronne de Gondor. Et ainsi de suite.

Mais ce ne sont que de faibles indices et échos du véritable Roi caché. Jésus vient dans le monde en possédant la toute puissance mais ne voulant pas en exercer une parcelle. Lors de Sa naissance, Son propre peuple manque à reconnaître Sa Royauté ; des mages venus d’orient doivent en apporter la nouvelle. De même quand Jésus commence Sa vie publique, le Baptiste L’annonce énigmatiquement comme « quelqu’un parmi vous que vous ne reconnaissez pas » (Jean 1:26).

Contrairement aux autres, cependant, l’humble état de ce Roi n’est pas une fiction ou un revers de fortune. Il est véritablement devenu l’un de nous, Ses sujets – partageant nos humbles joies et nos profonds chagrins, étant semblable à nous en tout à l’exception du péché. Il voile Sa divine autorité sous notre frêle humanité, à la fois notre Roi et notre semblable.

Bien plus, Notre Seigneur continue sa présence cachée parmi nous. Il vient à nous dans ce que Mère Térésa appelait « le déguisement bouleversant du pauvre ». Comme nous l’entendons dans l’Évangile de ce jour « en vérité je vous le dis, ce que vous avez fait au plus petit d’entre mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Matthieu 25:40).

Par la pauvreté de l’Incarnation, le Fils de Dieu s’est uni particulièrement aux pauvres. « Notre Seigneur Jésus-Christ… bien que riche, s’est fait pauvre pour notre bien » (2 Corinthiens 8:9). Il peut donc dire sans réserve « c’est à moi que vous l’avez fait » – Il ne sous-entend pas par là uniquement une unité morale mais une identification personnelle avec les pauvres. En eux, le Roi poursuit sa présence cachée parmi nous.

Et pas uniquement en eux. Notre seigneur s’identifie également avec un autre groupe. « Quiconque reçoit un de ces enfants en mon nom me reçoit ; et qui me reçoit ne reçoit pas que moi mais également celui qui m’a envoyé » (Marc 11:37). Nous avons ici la même identification sobre et sans réserve du Roi avec quelqu’un parmi nous. Il vient à nous de manière cachée, cette fois comme un enfant. Quelle source d’inspiration ces mots doivent-ils apporter à ceux qui accueillent généreusement des enfants. Et quel effroi ils doivent apporter à une culture qui rejette les enfants, les tuant même dans le ventre de leur mère.

Notre Seigneur cache Sa Royauté, non pas pour nous égarer mais pour purifier notre compréhension de cette Royauté. Il s’est dérobé aux foules parce qu’elles n’auraient pas compris sa Royauté. Il a répondu énigmatiquement à Pilate parce que ce chef n’avait pas la capacité de saisir la vérité. Les foules et lui devaient d’abord apprendre que ce qu’ils croyaient fait pour la royauté ne l’était pas. Le Christ Roi vient d’une manière cachée pour purifier nos idées mondaines, pour nettoyer nos âmes de concepts terrestres sur les règles, l’autorité et le pouvoir.

En plus de cette purification, le Roi caché nous enseigne la vérité. En effet le déguisement du Roi le révèle plus qu’il ne le cache. En venant à nous dans la faiblesse, la pauvreté et la vulnérabilité, Il nous enseigne sur le Royaume et la véritable Royauté. Nous apprenons de Lui que servir c’est régner ; que l’autorité est subordonnée au service ; que le pouvoir est subordonné à la miséricorde et que la vérité triomphe de la puissance.

Ce qui nous ramène au but de cette fête. Bien loin d’être une réminiscence de l’Église primitive ou médiévale, cette fête n’a été établie qu’en 1925 – juste comme les monarchies disparaissaient et, plus important, comme la pensée chrétienne était écartée de la société. Alors que des gouvernements athées surgissaient partout dans le monde, ils rejetaient toute limite à leur pouvoir. Pie XI, qui a passé la plus grande partie de son pontificat à composer avec ces gouvernements hostiles, destinait cette fête à faire valoir les droits du Christ Roi dans la sphère publique. Ce devait mettre en échec ceux qui voudraient séparer la gouvernance de la vérité et piétiner les faibles.

L’évangile de ce dimanche présente la venue du Roi à la fin du monde. Mais ses paroles – c’est à moi que vous l’avez fait – indiquent qu’Il est déjà là. Il est effectivement présent maintenant – non chez les puissants et les riches mais chez les faibles et vulnérables, entièrement exposés à l’exercice du pouvoir sans justice et de la puissance sans la vérité.