La réalité objective de la foi - France Catholique

La réalité objective de la foi

La réalité objective de la foi

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L’entrée en Carême pourrait-elle constituer une réelle possibilité de saisir ce qu’est l’expérience de la foi ? Disons-le carrément, cette expérience vise une objectivité, qui n’est pas forcément dans l’air du temps. Un rapide examen permet de caractériser cet air du temps par une double tendance. D’un côté, c’est la suspicion qui se répand, le religieux étant soupçonné de porter le fanatisme et la violence comme la nuée l’orage. D’où l’appel continuel aux Lumières qui seraient porteuses de rationalité et de tolérance, refoulant ce que l’esprit religieux avait diffusé en sens contraire. Les philosophies du soupçon sont toutes à l’affût de ce qui serait l’aliénation même. N’insistons pas sur le divorce entre les prétentions d’affranchissement et la réalité. C’est alors même que la tolérance devait changer le monde que sont apparues les guerres d’enfer, qui ont aboli toutes les limites de la fureur destructrice. Il n’empêche que le préjugé continue à rôder jusque dans les pages du Monde d’hier, où le cher Edgar Morin met en cause l’idéologie religieuse qui masque le réel, en s’affirmant comme le seul réel.

Mais il y a un autre aspect contraire, qui est la diffusion d’une religiosité individualiste, narcissique, qui se réclame parfois d’un bouddhisme fantasmé à l’usage des Occidentaux. Dans son nouveau livre intitulé Malaise dans la démocratie (Stock) Jean-Pierre Le Goff scrute le phénomène, en montrant comment il peut être nocif, notamment lorsqu’il se traduit par un œcuménisme éthéré, qui ne permet plus de comprendre comment notre propre héritage s’est construit, notamment à partir du judéo-christianisme.

Et c’est là que je voulais en venir, avec notre mercredi des Cendres. Il y a une réalité objective de la foi chrétienne, que la démarche du Carême nous permet d’étudier et d’intérioriser, dans l’attente de Pâques et la révélation de la Croix. Cela nous entraîne loin du fanatisme et du narcissisme, à travers une discipline spirituelle qui nous rapproche du mystère de Dieu lui-même. Cette expérience n’exclut nullement la démarche de la raison. Bien au contraire, elle la suscite. Encore faudrait-il se mettre résolument en chemin avec les grands spirituels pour savoir de quoi il s’agit.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 10 février 2016.