La mémoire retrouvée ? - France Catholique
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La mémoire retrouvée ?

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Reliques de St Benoît. Portail nord de l'abbaye de Fleury.

Reliques de St Benoît. Portail nord de l'abbaye de Fleury.

© Fred de Noyelle / Godong

La pandémie qui se prolonge, si elle éreinte les résistances et nous pousse à bout de souffle, semble aussi avoir la vertu de nous faire retrouver la mémoire. Confinés, il nous faut puiser dans nos ressources propres, dans les trésors enfouis dans l’épaisseur des siècles, pour alimenter notre conversation intérieure, et parfois même notre espoir.

Ainsi a-t-on vu, ces dernières semaines, exhumer soudainement des tombeaux de notre mémoire des merveilles oubliées : de Rome, où le crucifix de l’église Saint-Marcel, invoqué lors de la peste au XVIe siècle, a été placé dans la basilique Saint-Pierre, à Limoges, où l’évêque a permis l’ostension des reliques de saint Martial, événement qui n’a lieu habituellement que tous les sept ans. Dans le sud de l’Italie, même l’épée dite de saint Michel a été ressortie, 400 ans après, pour invoquer la protection de l’Archange qui lutte contre le mal !

Derrière le souvenir, l’éternité 

Il ne faut pas s’y tromper : l’intérêt provoqué par ces vénérables traditions, y compris de la part de grands médias, n’est pas la recherche d’un folklore un peu désuet. Mais bien une volonté de se raccrocher, dans la tempête, à ce qui dure, à ce qui a subi l’épreuve du temps, et qui donne une espérance.

Comme l’a exprimé très justement un journaliste du Figaro Magazine, serait-ce la fin de « l’obsolescence programmée », et le retour à tout ce qui « valorise la tradition, la transmission, (…), la famille » ? Cela mettrait alors un terme à une période de deux siècles, au cours de laquelle les élites et les intellectuels, héritiers des révolutionnaires, ont valorisé à outrance le changement, la nouveauté, au prix de l’oubli et même de la négation du passé.

Mais il y a plus. Ces marques de piété renouvelée n’ont pas uniquement pour vocation à servir de repères rassurants dans notre peur actuelle de l’imprévisible. Plus que le souvenir du passé, ce qu’elles véhiculent, et ce qui importe vraiment, c’est l’éternel présent : le Christ. C’est de nous réapproprier l’« héritage qui ne connaîtra ni corruption, ni souillure, ni flétrissure » (Pierre 1, 3-9). Car la vraie tradition – pas celle des Pharisiens – consiste selon Gustave Thibon non pas à se transformer en musée, mais à « ramener l’homme à ses sources divines ».

Et pour cela, pour retrouver le souffle intérieur qui nous manque, nous ne sommes pas seuls, livrés à nous-mêmes. Nous avons derrière nous la longue litanie de ceux qui ont cru et adoré. « Nous pouvons nous servir de l’intelligence de saint Thomas, du bras de saint Michel, et du cœur de Jeanne d’Arc et de Catherine de Sienne (…), énumérait Paul Claudel. Tout ce qui se fait de bien, de grand et de beau d’un bout à l’autre de la terre, tout ce qui fait de la sainteté, comme un médecin dit d’un malade qu’il fait de la fièvre, c’est comme si c’était notre œuvre. L’héroïsme des missionnaires, l’inspiration des docteurs, la générosité des martyrs, le génie des artistes, la prière enflammée des clarisses et des carmélites, c’est comme si c’était nous, c’est nous ! »

Un bon antivirus, en somme.