La doctrine précède la moralité - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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La doctrine précède la moralité

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Essayant de regarder le côté lumineux des choses, je me console, lorsque je considère les abus sexuels de prêtres sur des mineurs, et la grande sympathie qu’ont de nombreux prêtres et évêques pour le vice de l’homosexualité, en pensant que j’ai l’inestimable privilège d’être un spectateur au premier rang d’un des grands moments de catastrophe de l’histoire de l’Église.

Je suis né trop tard pour la Crucifixion, pour les persécutions de Néron et de Dioclétien, pour la conquête musulmane de la Syrie chrétienne, de l’Égypte, de l’Afrique du Nord et de l’Espagne, pour la rupture entre les moitiés grecque et latine de l’Église, pour la chute de Constantinople, pour la Réforme protestante, et pour la Révolution française.

Mais – quelle chance pour moi ! – je suis né au bon moment pour voir les chefs de l’Église, nos prêtres, nos évêques et nos cardinaux (et peut-être aussi le pape, je réserve mon jugement sur ce point), qui détruisent l’Église par une extraordinaire combinaison de stupidité et d’immoralité.

Quel privilège de pouvoir être présent lors d’un des grands mauvais moments de l’Histoire. Avant que ces moments n’arrivent, il est difficile d’imaginer qu’ils puissent même être possibles. A part les conspirateurs, qui, à Rome, pouvait imaginer que Jules César, récemment honoré par le titre de Dictateur Perpétuel, serait soudain fauché ? Et qui, il y a quatre-vingt-dix ans, pouvait imaginer que l’Allemagne, probablement le pays le plus cultivé du monde, se jetterait peu après entre les mains d’un mégalomane sadique ?

Et qui, à l’époque du second concile du Vatican, lorsque l’Église paraissait robuste et en bonne santé, aurait pu imaginer que l’Église allait chanceler peu après, non pas du fait d’ennemis extérieurs, mais à cause de clercs avec une prédisposition pour le vice contre nature ?

Je suppose que l’Église catholique finira par se remettre, comme elle s’est remise de toutes les catastrophes précédentes. Mais il y aura des pertes de territoire. Tout comme il y eut des pertes de territoires au profit de l’islam, de l’orthodoxie orientale et du protestantisme.

Il est donc probable qu’il y aura des pertes dans ces régions du monde (l’Europe et l’Amérique du nord) où l’humanisme laïc (alias l’athéisme) est maintenant socialement et culturellement dominant. Dans un siècle ou deux, le catholicisme peut n’être plus une religion euro-américaine, mais une religion de l’Inde et de l’Afrique.

Dans l’intervalle, il nous faut essayer de comprendre la véritable nature de la catastrophe que nous traversons.

Certains disent que c’est une crise d’abus de l’enfant, et s’arrêtent là. Ils nient que l’abus sexuel de mineurs par des prêtres ait quelque chose, ou même quoi que ce soit, à voir avec l’homosexualité. C’est l’attitude des catholiques pro-LGBT, comme les éditeurs d’America, le journal jésuite. Le rédacteur en chef d’America est le père James Martin, auteur du célèbre opuscule Building a Bridge: How the Catholic Church and the LGBT Community Can Enter into a Relationship of Respect, Compassion, and Sensitivity (« Bâtir un pont: comment l’Église catholique et la communauté LGBT peuvent établir une relation de respect, de compassion et de sensibilité”).

Mais cette attitude est absurde. Quelle personne honnête, à l’esprit droit, peut nier que beaucoup – ou la plupart – des abus sexuels sur mineurs sont un débordement de la culture de l’homosexualité qui est plutôt répandue parmi les prêtres depuis des décennies ?
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D’autres, plus corrects et plus honnêtes, soutiennent que le problème fondamental est exactement cette culture de l’homosexualité qui est si répandue dans la prêtrise depuis de nombreuses décennies. Cette culture a conduit à l’émergence dans de nombreux diocèses d’une « mafia lavande », c’est-à-dire un réseau à moitié organisé de prêtres gays qui se protègent mutuellement, s’aident à avancer et empêchent efficacement les évêques de prendre une position ferme contre l’homosexualité et d’autres vices sexuels.
Il y a des décennies que des rumeurs circulent à propos de tels réseaux. Les récentes révélations sur le cardinal Theodore McCarrick rendent impossible d’écarter ces rumeurs comme fictives.

Bien que je sois d’accord avec l’argument exposé au précédent paragraphe, je pense qu’il y a un toujours problème essentiel qui se situe au fond de cette grande catastrophe. Avant qu’un séminariste, un prêtre ou un évêque puisse être engagé, non pas une seule fois mais habituellement, dans une activité homosexuelle, il faut qu’il ait cru, au moins à moitié qu’une telle activité est moralement admissible. Ou, en regardant la chose par l’autre bout, il faut qu’il n’ait pas cru à l’enseignement catholique sur le sujet.

Le catholicisme est une religion de haute doctrine. Cela le distingue clairement de religions de faible doctrine, ou qui n’ont pas de doctrine du tout, comme par exemple les religions païennes des anciens Grecs et Romains, ou la religion du protestantisme libéral.

Les doctrines catholiques entrent dans trois catégories : historique et miraculeuse, par exemple, Jésus est né d’une vierge et est ressuscité des morts, métaphysique, par exemple la Trinité, la divinité du Christ, et morale, considérant par exemple que l’avortement, l’adultère et la pratique de l’homosexualité sont des péchés graves. Les catholiques qui rejettent sciemment et délibérément un dogme catholique sont hérétiques.

Il est donc probable que nos prêtres homosexuellement actifs soient, en plus de leurs péchés homosexuels, coupables aussi d’hérésie morale. Il est également probable que de tels hérétiques au plan moral soient coupables en plus d’autres sortes d’hérésie. Même si je ne peux pas le prouver, je parie que peu de prêtres qui considèrent que l’homosexualité est bien, continuent de croire par exemple à la naissance virginale.

Je suggère qu’au fond de ce désastre complet se trouve un manque de foi dans les doctrines fondamentales du catholicisme. Nous vivons dans une société moderne dans laquelle très eu de gens (à part les Mormons et des protestants très conservateurs) prennent au sérieux les dogmes chrétiens. La plupart des Américains ne sont plus chrétiens du tout, ou seulement un petit peu, leur religion étant plus nominale que réelle ; ou lorsqu’ils sont vraiment chrétiens, sont convaincus que l’essence du christianisme est la moralité, la doctrine étant accessoire.

Qui peut s’étonner que l’environnement social de scepticisme doctrinal ait pu infecter beaucoup de nos prêtres ? Et que l’infection ait eu un impact sur le comportement ?

*Image: Le jardin des plaisirs terrestres (panneau de droite, décrivant l’enfer) par Hieronymus Bosch, v. 1500 [Museo del Prado, Madrid]

Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/09/21/doctrine-precedes-morality/

David Carlin est professeur de sociologie et de philosophie au Community College de Rhode Island, et l’auteur de The Decline and Fall of the Catholic Church in America (« Le déclin et la chute de l’Église catholique en Amérique).