La « cancel culture » est une culture de la couardise - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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La « cancel culture » est une culture de la couardise

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Sandro Botticell, La Carte de l'Enfer

Sandro Botticell, La Carte de l'Enfer

Librairie vaticane

Les mécontents, comme les pauvres, nous en aurons toujours avec nous. Maugréer n’est pas réservé au peuple de Dieu dans le désert. Cela a été une caractéristique commune de la vie humaine depuis que Ève a demandé : « Mais pourquoi ne pouvons-nous pas manger la pomme ? » et même depuis que Adam a dit à Dieu : « Pour sûr, tous les animaux sont formidables mais je suis toujours solitaire ».

Il y aura toujours des gens pour se plaindre. Il y a toujours eu des brutes depuis que Caïn a ôté la vie de son frère Abel. Ce que nous n’avons pas eu en si grand nombre que maintenant, ce sont les si nombreux couards qui refusent de s’opposer à elles.

Un ami et moi, nous plaisantons avec la phrase : « Est-ce trop demander que… ? » Chaque fois que vous débutez par cette phrase, cela sous-entend que c’est trop demander, mais que cela ne devrait pas être. Si vous dites : « Serait-ce trop demander que de vouloir que le serveur prenne correctement ma commande ? » c’est parce qu’il ne l’a pas fait.

Alors voilà ma question. Est-ce trop demander que les directeurs et les administrateurs d’université qui reçoivent une de ces plaintes « vertueuses » bien-pensantes de plus en plus omniprésentes contre quelque chose ou quelqu’un se contentent de se cuirasser et de répondre : « non, désolé, je ne donne pas dans votre chantage émotionnel, allez-voir ailleurs » ?

La réponse à cette question apparaîtra la même que la réponse à la question : est-ce trop demander que les politiques soient vraiment cohérents quand ils font preuve d’indignation morale ?

Est-ce qu’un président d’université, quelque part dans dans l’une de ces disputes va publier une déclaration disant :

Je suis désolé que vous vous sentiez offensés mais l’un de nos principes fondamentaux est la liberté de parole. Nous respectons votre droit de protester et de vous plaindre, mais le même droit qui vous protège les protège également. Nous ne mettrons pas d’obstacle au libre échange d’idées. Si cela vous déplaît, alors vous voulez une autre institution – et probablement un autre pays. Avez-vous confondu celui-ci avec l’Allemagne de l’Est des années 50 ? Alors vous pouvez rassembler toutes les foules que vous voulez, en ligne ou sous nos fenêtres, nous n’allons pas céder aux réclamations d’une foule irrationnelle. Venez plaider votre cause avec des arguments solides. Nous promettons de les écouter avec respect. Mais veuillez comprendre ceci. Notre politique est : « Chacun a une voix, personne n’a de veto ». Si vous faites une bonne argumentation, nous changerons nos manières de faire ; mais si vous venez avec uniquement des calomnies et des menaces de violence, nous nous contenterons de fermer la porte et de vaquer à nos affaires. Oh, et comprenez bien : nous défendrons la propriété et l’héritage que nous ont laissés nos prédécesseurs. Donc si vous venez pour détruire et non pour discuter, nous vous arrêterons. Si vous supposez que notre désir de défendre ce qui a été bâti ici est plus faible que votre désir de le détruire, vous faites une très grosse erreur.

Une amie m’écrit pour dire que « la première chose qu’une université désirant survivre doit faire est de cesser de nous bombarder du mot ‘autorité’ sans jamais l’exercer un tant soit peu. Les peuples civilisés ne pratiquent pas la culture de l’élimination et les chrétiens ne devraient certainement pas la pratiquer. Quand la foule a essayé d’éliminer la femme prise en flagrant délit d’adultère, Jésus a été la plus solide défense de la femme ».

« Les chefs », continue-t-elle « ne jettent pas les braves gens sous un bus pour des motifs triviaux. Les chefs dirigent, ils ne se contentent pas de gérer ». Ils aident divers groupes à se former au sein d’une communauté. Ils n’enclenchent pas le bouton « expulsion » au détriment de quelqu’un dès lors que la foule arrive à la porte. Offrir de jeter sa fille en pâture à la foule n’a pas marché pour Lot et ne marchera pas plus pour aucun de nos lâches lions actuels.

Personne ne peut garantir le succès sur le marché courant de l’éducation. Mais ce serait formidable si au moins une université s’affichait comme l’endroit où aller étudier si vous êtes brave et avez assez de cran pour confronter vos idées aux meilleurs esprits de tous les temps. Vous pouvez ne pas être d’accord. Vous pouvez désapprouver vigoureusement. Nous l’acceptons. Mais vous feriez mieux d’être prêts avec des arguments solides et bien pensés. Si vous voulez « la sécurité », restez à la maison et vivez sur les bases que vous ont donné vos parents.

Voulez-vous qu’on vous donne votre diplôme sans beaucoup d’effort ou de maîtrise de votre part ? Allez voir ailleurs. Vous n’êtes pas assez robuste pour nous. Ici, vous allez devoir travailler pour obtenir votre diplôme. Intensément. Mais au bout des quatre ans, vous aurez développé des relations qui dureront toute la vie, et vous aurez appris la maturité et la résilience d’une façon qu’aucun de vos pairs d’aucune autre institution n’aura atteinte. Ils vont hurler et tempêter. Vous, vous parlerez sérieusement avec ceux qui ne sont pas d’accord avec vous, examinerez à fond les problèmes et bâtirez ensemble une réponse.

Nous ne couvons pas les gens qui veulent devenir des « gérants », nous formons des chefs-serviteurs. Voici comment vous pourriez l’exprimer. Nous ne suivons pas servilement les engouements derrière quoi court le reste du monde universitaire. Nous ne suivons pas les vents dominants. Nous avons des principes. Ils nous guident. Nous ne les bradons pas. Nous sommes d’accord pour les questionner, les analyser et les soumettre à une critique poussée. Mais nous ne débitons pas des slogans ineptes et vides.

Nous adhérons à ces principes aussi fidèlement que nous en sommes capables parce que nous croyons qu’elles sont le meilleur moyen d’obtenir l’épanouissement humain, à la foi individuel et communautaire. Nous n’avons pas à les aimer, nous n’avons pas besoin non plus d’aimer vos principes. Mais nous avons à apprendre à vivre ensemble pacifiquement. Si vous voulez que nous nous prosternions devant vos idoles, je suis désolé mais la réponse est non. Alors il est probablement préférable de mettre les choses au clair tout de suite.

Voilà l’appel que je voudrais entendre. Est-ce vraiment trop demander ?