La Théologie trinitaire de Louis Bouyer, - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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La Théologie trinitaire de Louis Bouyer,

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Le P. Guillaume Bruté de Rémur, prêtre du diocèse de Rome, fait partie de ceux qui ont accédé à la pensée théologienne au moment où la génération des grands artisans du renouveau théologique du XXe siècle (Jean Daniélou, Henri de Lubac, Hans Urs von Balthasar, Yves Congar, Marie-Joseph Le Guillou, Louis Bouyer etc.) était en train de disparaître de la scène. Il est de ceux qui ont perçu la richesse des intuitions qu’apportait cet esprit original, vigoureux, rebelle aux conformismes (y compris le pire, celui de l’anticonformisme) qu’était le P. Louis Bouyer (1913-2004), venu de la Réforme protestante au catholicisme, devenu oratorien faute d’avoir pu accomplir une vocation monastique qu’il a toujours poursuivie dans un parcours atypique qui l’a mené à l’abbaye de Saint Wandrille où il repose à présent.

Le livre est ambitieux, puisqu’il s’agit de rejoindre, une pensée qui se déploie dans une double trilogie d’ouvrages consacrés non seulement aux trois personnes divines (Le Fils Eternel, le Père Invisible, le Consolateur), mais aux réalités qui en tirent leur vie (Le Trône le la Sagesse, l’Eglise de Dieu, et Cosmos), sans parler de ses ouvrages de spiritualité, dominés par une problématique trinitaire, et de cette ultime trilogie, si étrange et traversée d’éclairs, que forment Mysterion (1986), Gnosis (1988) et Sophia (1994).

Les méandres de ce chemin commence avant l’entrée dans l’Église de Louis Bouyer, et se poursuivent dans une patiente étude des données de la tradition, les questions successives posées au dépôt de la foi, sur lesquelles l’oratorien a toujours quelque chose à dire de libre et d’original. Si certaines figures lui sont immédiatement sympathiques (Grégoire de Nysse, Denys l’Aréopagite et Maxime le Confesseur en Orient, saint Grégoire le Grand, Guillaume de Saint Thierry, Hadewijch d’Anvers, et Maître Eckhart en Occident), d’autres nourrissent de longs débats non exempts de réticences malgré la reconnaissance d’incontestables valeurs (saint Cyrille d’Alexandrie, saint Augustin, saint Thomas d’Aquin).
Ce qui ressort de ce parcours est l’ambition du P. Louis Bouyer, de dépasser l’opposition entre la vision orientale (qui met au premier plan la distinction des personnes et qui s’appuie sur la monarchie du Père et la procession de l’Esprit à partir du Père seul) et celle de l’Occident dominée par la perspective de l’unité divine et faisant de l’Esprit Saint le nexus amoris du Père et du Fils. Pour lui, la clef est à chercher dans la tradition spirituelle et liturgique de l’Église et notamment dans le mouvement de la prière eucharistique. Est-ce plus qu’une ambition ? Peut-on dire que Louis Bouyer est parvenu à conclure et à entraîner l’adhésion ? Les lecteurs de la thèse du P. Bruté de Rémur en jugeront.

Tesi gregoriana, Série Teologia 177,

Rome 2010, 382 pp., 25€.