L’humble liturgie du Mercredi des cendres - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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L’humble liturgie du Mercredi des cendres

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Décidément, j’aime beaucoup le mercredi des cendres, qui est bien la plus discrète de nos liturgies. Je l’ai déjà expliqué en essayant de rendre compte de ce congé que donnent à la vie de travail ceux qui prennent le chemin de l’église, pour recevoir sur le front le signe de la plus stricte humilité. Dans les discussions actuelles sur le fait religieux, c’est par une description de ce geste que je procèderais pour donner une idée de ce qu’est l’ordre spirituel, c’est à dire selon Pascal, l’ordre de la charité. La disposition première requise pour y accéder, c’est l’humilité, dont l’étymologie nous renvoie justement à l’humus, au sol terrestre. C’est le dépouillement intérieur qui dispose à l’ouverture à l’appel divin. Nous sommes aux antipodes du prométhéisme orgueilleux.

Cette humilité est reconnaissance non seulement de notre précarité, mais aussi de notre péché. Le carême est une longue marche de purification où nous nous reconnaissons en attente de l’Unique qui nous apporte le Salut et donc le pardon. Se reconnaître pécheur c’est aussi se reconnaître impuissant à s’assurer soi seul du bonheur. C’est tout attendre du don le plus gratuit. Dans les termes savants de la théologie, on parle de pélagianisme pour désigner cette maladie de l’âme qui consiste dans un sentiment d’autosuffisance.

Voilà qui va singulièrement contre une mentalité assez commune, qui s’identifie avec l’humanisme athée ou la croyance en une religion de l’humanité, apte à nous offrir, aux forceps, le bonheur ici-bas. Il y a quelques jours, j’ai fait mention du livre de Bernard Maris sur Houellebecq économiste. Avec le destin tragique de son auteur, il prend l’allure et la saveur d’un testament spirituel, dont la profondeur et la véracité me saisissent. Que nous dit-il ? Qu’il ne faut pas se méprendre sur la prétendue science économique : « Car il n’y a pas de science économique, il y a de la souffrance masquée sous de l’offre et de la demande ; autrement dit de la poésie et de la compassion laminées par le talon de fer du marché… » Cette poésie et cette compassion sont à mon sens révélées en vérité dans l’humble liturgie du mercredi des cendres.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 18 février 2015.