L’Église pratique-t-elle l’exclusion ? - France Catholique

L’Église pratique-t-elle l’exclusion ?

L’Église pratique-t-elle l’exclusion ?

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Le verbe « exclure » et le substantif « exclusion » sont devenus des termes moraux contestés. Ils sont perçus comme de vilains contraires de « inclure » et « inclusion », concepts qui sont souvent regardés comme faisant partie des grands biens sociaux de notre temps – au point que les hôpitaux, les universités, les administrations gouvernementales et les milieux d’affaires ont maintenant des bureaux consacrés uniquement aux problèmes « de diversité et d’inclusion »

Aujourd’hui, en conséquence, l’Église est souvent en premier lieu jugée à la lumière de ces concepts. Témoin, par exemple, la manchette du New York Times le jour où fut publié le document final du Synode de la jeunesse : « Les évêques insistent pour une plus grande inclusion des femmes dans les décisions de l’Église. » Peut-être bien, mais était-ce vraiment la question importante dans cette rencontre sur la jeunesse qui a duré un mois ?

Que signifient ces termes ? Et comment s’appliquent-ils à l’Église ?

« Exclure » est « laisser à la porte, empêcher d’entrer, refuser l’admission ». « Inclure » est le contraire : « enfermer, contenir, retenir, embrasser ». Dans la vie de l’Église un conclave papal est l’exemple le plus marquant de ces actions contrastées ; pour choisir le nouveau pape les cardinaux du monde sont « enfermés » dans une pièce ; le reste du monde est « laissé à la porte ».
Quand des groupes se rassemblent, il est bien naturel à l’homme de désirer être inclus ̶ si nous pensons que ce sont des groupes qui méritent notre intérêt. La peur de l’exclusion commence avec les jeux des enfants et les invitations aux anniversaires ; elle continue quand on est retenu – ou pas – dans les équipes sportives, quand on veut trouver une place à la cafeteria de la high school, de chercher de nouveaux amis au college, de trouver une chaise au bar à l’heure de l’apéritif ou un siège au bureau le jour où on y fête Noël. Jamais nous ne désirons être exclus, et nous sommes remplis d’une indignation naturelle quand nous voyons une personne en exclure injustement une autre.

Jésus a cherché à inclure dans son entourage beaucoup de gens qui avaient été exclus de la société – publicains, pécheurs manifestes, lépreux. Avant de monter au Ciel, Jésus a commandé à ses apôtres que tous les peuples soient inclus dans Son Église : « Allez dans le monde et prêchez l’Evangile à toute la création. » (Mc 16 :15)

L’Eglise que le Christ a fondée est catholique parce que sa mission est universelle – elle cherche à apporter l’enseignement, l’amour et la miséricorde du Christ à tous les peuples, sans considération de race ou de richesse. Aux yeux de Dieu, nous sommes égaux : nous sommes des pécheurs qui avons besoin de la rédemption du Christ. Tous les peuples sont appelés, et bienvenus, à rejoindre l’Église. Chaque dimanchee, toute personne, catholique ou non, peut entrer dans une église n’importe où dans le monde pour entendre la proclamation de la parole de Dieu proclamée et être témoin de la re-présentation du sacrifice salvateur du Christ sur la croix.

Malheureusement l’inclusion que l’Eglise désire et que nous recherchons est parfois empêchée par des membres de l’Eglise, aussi bien clercs que laïcs, pour des raisons trop nombreuses pour être énumérées. Les catholiques ne peuvent pas ne pas tenir compte du dommage qu’un simple regard de désapprobation peut causer à une âme fragile qui cherche à être intégrée dans l’Église dans une grande paroisse ou une paroisse locale. L’Église est bien plus que les défaillances de ses membres, pourtant nous ne pouvons nous permettre d’être des barrières à la médecine divine qu’offre l’Église.
Mais les conversations aujourd’hui au sujet de l’Église et de l’exclusion ne concernent presque jamais le libre accès aux dons spirituels – les seuls qui nous portent au Ciel. A la place, on met l’accent sur l’accès au pouvoir temporel, humain dans l’Église, ici, sur la terre. Apparemment, partager les fonctions de prêtre, prophète et roi que tous nous exerçons en vertu de notre baptême, n’est pas assez pour certains.

On reproche ainsi souvent à l’Eglise d’ « exclure » de l’ordination et de l’autorité ecclésiale les femmes, les hommes mariés et les hommes qui éprouvent une attirance homosexuelle. Par association on y ajoute la critique que l’Église exclut le mariage entre deux personnes du même sexe. Ainsi selon les standards d’un individualisme radical faussé par les exigences de la Révolution sexuelle, l’Église catholique est accusée d’« exclusionnisme ». Et qui voudrait être inclus dans une telle Église ?

C’est une question justifiée : étant donné la mission de l’Eglise qui est d’inclure tous les hommes, a-t-elle le droit d’exclure tant de gens des fonctions de commandement et d’autorité ?

Jésus a cherché à inclure dans Sa mission tous les hommes, pourtant Il a exclu presque tout le monde de l’autorité à l’intérieur de Son cercle intime. En n’appelant que douze apôtres, c’est un nombre infiniment plus grand qu’Il a exclu. Même à l’intérieur du collège des apôtres, quand Jésus est monté sur le Tabor avec Pierre, Jacques et Jean, Il a exclu les neuf autres. Et de ces trois-là, un seul a été appelé « le disciple que Jésus aimait » et à un seul ont été données les clefs du Royaume des Cieux avec la mission d’« affermir ses frères » (Lc 22 :32)

Plus tard, quand Jésus a voulu inclure la femme qui avait été condamnée pour adultère, Il lui a dit de plus pécher (Jn 8 :11). Il ne lui a pas dit que son péché pouvait être inclus comme partie de son identité ou une expression de son « moi » véritable. C’est la femme que Jésus a introduite dans Son Église ; son péché, lui, devait être exclu.

L’Eglise a raison d’imiter son divin fondateur en incluant tous les hommes à l’intérieur des limites universelles de sa mission, tout en en excluant beaucoup de l’autorité et de fonctions diverses. Comme saint Paul l’a dit, tout homme ne peut être appelé au même ministère. Mais quand nous serons, chacun d’entre nous, appelés hors de cette vie, ce n’est pas le pouvoir que nous avons possédé sur cette terre qui importera mais la façon nous avons – bien ou mal – utilisé les dons divins que dispense l’Église. Les saints les utilisent au mieux. C’est avec eux au Ciel que nous voulons être inclus.

Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/01/06/does-the-church-exclude/

6 janvier 2019


 
David G. Bonagura Junior enseigne au Séminaire St. Joseph à New York. C’est l’auteur de Steadfast in Faith [« Ferme dans la foi »], Catholicism and the Challenges of Secularism [« Le Catholicisme et les défis du sécularisme »], à paraître à Cluny Media.