Les idoles modernes - France Catholique
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Les idoles modernes

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Le dieu Thor de la mythologie nordique affrontant les géants, M. E. Winge, 1872.

Le dieu Thor de la mythologie nordique affrontant les géants, M. E. Winge, 1872.

Musée national de Suède

Un des faits les plus remarquables, à propos des êtres humains (en tous cas pour moi) c’est notre croyance quasi universelle en Dieu ou en des dieux – en tous cas en une (ou plusieurs) puissance divine transcendante capable et désireuse de nous conférer des bienfaits ou de nous infliger des souffrances. Il semble qu’aucune société n’a jamais existé sans ces convictions. Il semble que de telles croyances sont inhérentes au genre humain, ou tout au moins une forte prédisposition à embrasser de telles croyances nous est innée. Le nouveau-né n’est pas neutre ni agnostique en ce qui concerne l’existence et le pouvoir de ces divinités.

On me rappellera bien sûr, que croire en des divinités, bien que largement répandu, n’est pas un fait universel. Il existe des athées dans le monde. Même si les athées sont peut-être plus nombreux de nos jours qu’ils ne l’étaient précédemment, ils existent depuis des milliers d’années au moins. Mais l’athéisme est (si l’on peut dire) une attitude sophistiquée alors que la foi en une puissance divine est une attitude naïve. Il n’est possible de ne pas croire que parce que la foi vient en premier.

Si la nature nous dote d’une disposition à croire en des divinités, c’est nous, soit individuellement soit collectivement, qui devons décider nous-mêmes des spécificités de cette croyance générale. Devons nous être animistes ou déistes ? Devons nous être panthéistes ou déistes ? Devons nous être polythéistes ou monothéistes ? Devons nous combiner le monothéisme avec le polythéisme, et croire en une divinité suprême et de nombreuses divinités inférieures ?

Devons-nous croire en des dieux personnels ou impersonnels ? Devons-nous croire en des dieux bons, des dieux mauvais, ou des dieux qui sont un mélange des deux ? Devons-nous croire (avec les manichéens) en un dieu purement bon qui s’opposerait à un dieu purement mauvais ? Notre disposition innée ne répond à aucune de ces questions. C’est à nous de le faire.

En disant cela, je ne veux pas nier que Dieu peut nous aider à répondre à ces questions en nous offrant des révélations, comme celles qu’on trouve dans l’Ancien et le Nouveau Testament. Je ne veux pas non plus nier que Dieu peut faire des révélations en dehors des limites des deux Testaments. Moi-même, je penche à croire, par exemple, que Dieu – le même Dieu qui a fait des révélations aux prophètes de l’Ancien Testament- peut bien aussi en avoir fait à Socrate. Il se peut qu’en ceci je me trompe, mais j’ai tendance à considérer l’Apologie (compte rendu par Platon du procès de Socrate) comme quelque chose de quasiment scripturaire. Je l’ai lu avec révérence.

J’ai déclaré plus haut que cette croyance innée est la croyance en un pouvoir divin qui « confère des bienfaits et inflige des peines ». Les chrétiens pourraient objecter à cela, et dire que Dieu, n’étant que pur bien, ne fait pas et n’inflige pas de peines. C’est assez vrai – à condition de dire que les tornades, les ouragans, les tsunamis, les cancers, les pestes etc., plus la damnation éternelle à l’Enfer ne sont pas pénibles.

Par les moyens d’une théodicée (comme celle produite par Leibniz), nous pouvons argumenter qu’aucun des nombreux maux apparents du monde n’est un véritable mal quand on l’envisage (comme peut-être Dieu seul peut l’envisager) dans un contexte métaphysique suffisamment grand. Tandis que de nombreux chrétiens ( ou tout au moins des chrétiens non calvinistes) diront que le mal du péché n’est pas produit par Dieu, il faudra bien qu’ils admettent que tous les autres maux – ou plutôt ce qui semble être des maux – sont produits par Dieu et que le péché, s’il n’est pas précisément produit par Dieu, est toléré par Dieu, alors que Dieu, (à ce qu’il semble) aurait pu l’éviter.

Si j’ai raison en suggérant que nous avons une puissante tendance innée à croire en Dieu ou en des dieux, qu’est-ce qui se passe dans la tête d’un athée qui rejette toute croyance déiste ou surnaturelle ? C’est une question qui a une importance pratique puisque, selon toute probabilité, le monde n’a jamais contenu autant d’athées que maintenant. Peuvent-ils effectivement vaincre une tendance congénitale ? Ou bien est-ce qu’ils croient à une sorte de dieu impie ? En d’autres termes, est-ce qu’ils croient à une idole ?

Je pense que la deuxième option est la bonne. Le monde a eu suffisamment d’expérience de l’athéisme au cours des deux ou trois derniers siècles pour que nous sachions que de nombreux athées – je ne dirai pas tous – ont trouvé, ou plutôt ont inventé de nouveaux dieux non traditionnels, pour croire en eux.

Pour beaucoup de gens, il s’est agi d’un dieu nommé le Progrès. Selon eux, cette quasi-divinité a fait avancer le monde pendant des millénaires, en en faisant pour les humains un lieu de meilleur en meilleur. De temps en temps, il y a des revers, quelques mauvais siècles ici ou là. Mais en gros, et si on le regarde à grande échelle, on peut le considérer comme une marche en avant vers un paradis terrestre. Le président Barrack Obama semble avoir cru en ce dieu quand il nous a dit que le mariage entre personnes de même sexe était « du bon côté de l’histoire ».

Le dieu d’autres athées a été un parti politique ou un mouvement politique – par exemple le parti communiste (un dieu extrêmement important au vingtième siècle), ou le parti nazi (autre grand dieu du vingtième siècle) ; ou bien, en Amérique, plus récemment, le mouvement féministe (maintenant plutôt dépassé) ou le mouvement LGBTQ+ (encore très fort).

D’autres encore ont déifié certains individus. Beaucoup d’Allemands l’ont fait d’Hitler, beaucoup de Russes et de non-Russes l’ont fait de Staline, beaucoup de Chinois de Mao.

Et, bien que je déteste dire cela, (puisque j’ai moi-même voté pour Trump en 2020) – un bon nombre de ses fans les plus fanatiques l’on fait de Donald Trump, le considérant comme une divinité mineure. On peut bien sûr soutenir Trump sans l’idolâtrer. On pourrait par exemple le soutenir parce qu’on approuve une partie ou la totalité de sa politique.

Moi-même, j’étais satisfait de Trump parce qu’il a nommé des juges qui se consacraient à lire les lois de la manière dont elles avaient été écrites. Et j’ai jugé que le risque était le prix à payer pour les bienfaits produits par Trump.

Mais maintenant, tout ceci est dépassé. Et le vide est vite rempli par un néo-progressisme qui ne regarde rien ni personne comme hors d’atteinte. Ai-je mentionné que certaines idoles sont jalouses – et assoiffées de sang ?