Ce que le monde désire - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Ce que le monde désire

Traduit par Bernadette Cosyn

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Il y a deux, et seulement deux, attitudes rationnelles vis-à-vis du temps de Noël. L’une est celle de P;G. Wodehouse : « on était en décembre et un nouveau Noël était à nos trousses ». (Je cite de mémoire, en espérant ne pas me tromper.) Que ce soit la camaraderie forcées de la plupart des réceptions de Noël ou seulement un signe de plongée dans la maussaderie prématurée, chaque année je me trouve de plus en plus dans cette disposition, dès que Thanksgiving disparaît et que la folie des achats commence.

L’autre attitude, qui je l’espère est davantage la mienne, peut être mieux représentée par un homme parfois critiqué par le chœur janséniste grincheux (pour reprendre une catégorie évoquée par le pape François) au sein de la confession chrétienne :

Le Christ enfant reposait dans le giron de Marie,

Sa chevelure telle une lumière.

(O, que le monde était lassé,

mais ici tout est tel qu’il doit être).

G.K. Chesterton peut bien avoir fumé, bu, ri et s’être amusé plus qu’un certain type de catholique le trouve convenable. Au moins il était suffisamment catholique pour n’avoir jamais cherché à prétendre que sa propre pratique religieuse aurait dû devenir une règle universelle pour toute l’Eglise : que nous devrions, par exemple, amener des Trappistes taciturnes ou de sobres Franciscains à se dérider un peu. Il a réalisé le service utile de nous rappeler – à nous catholiques adultes et fatigués – que la joie comme le repos sont au cœur de notre foi, ou qu’il se pourrait que nous n’ayons pas de vraie foi du tout.

Il nous rappelle également que la joie est un véritable don, et non un assaut sauvagement sentimental de fraternité une fois tous les douze mois, ou quelque chose que nous gagnons durant le reste de l’année par des programmes d’entraînement, des techniques de développement personnel, des réformes politiques ou même des pratiques religieuses. Les différents princes de ce monde – et tout spécialement les politiciens conspirateurs et autres démagogues – ont beaucoup en jeu en nous faisant croire qu’ils peuvent concevoir des politiques et promouvoir des technologies pour mettre le vrai bonheur à portée de main. Ils savent que même lorsque de telles illusions s’effondrent, ils peuvent toujours proposer un nouveau remède, faire payer deux fois plus et gagner une part de marché toujours plus grande dans la recherche du bonheur.

La foi chrétienne est fort différente :

Le Christ enfant reposait sur la poitrine de Marie,

sa chevelure telle une étoile.

(Combien austères et fourbes sont les rois,

mais ici sont les vrais cœurs.)

De vrais cœurs ! Qui parle encore de telles choses ? Même dans l’Eglise ? Nous sommes revenus à un ancien refrain pré-chrétien : qu’est-ce que la vérité ? Et que sont les cœurs, si on va par là ? Parlez-nous de psychologie, de sociologie, de Prozac et de neuroscience. Par-dessus tout, « laissez-nous prendre nos vies en main ». Nous savons déjà ce que nous voulons. Le cœur veut ce qu’il veut.

Le Christ enfant reposait sur le cœur de Marie,

sa chevelure telle un feu.

(O, que le monde était lassé,

mais voici ce que le monde désire.)

De nombreux chrétiens professent cette foi, mais combien désirent la mettre en pratique ? On relate que Saint Thomas More aurait dit à ses juges après qu’ils l’aient condamné à mort : « j’ai véritablement confiance, et je vais de ce fait prier de tout cœur pour que, bien que vous, mes seigneurs, ayez été sur terre les juges qui m’ont condamné, nous puissions dans l’au-delà nous rassembler joyeusement, pour notre salut éternel. Un homme capable de penser à la joie future et à l’espérance de salut pour ses bourreaux à l’ombre de l’échafaud peut à bon droit s’affirmer chrétien. Il sait ce dont le monde se languit, que le monde le sache ou non.

La foi est une si étrange chose, bouleversant tout ce à quoi nous nous sommes attendus, renversant les puissants, élevant les humbles, rassasiant les affamés et renvoyant les repus les mains vides, voilà qui demeure difficile à assimiler, même après des années de familiarité. Pourtant cela attire l’attention sur toute la Création :

Le Christ enfant se tenait aux genoux de Marie,

sa chevelure telle une couronne,

et toutes les fleurs levaient les yeux vers Lui,

et toutes les étoiles se penchaient pour le regarder.

Il y a plusieurs orchestrations différentes de ce poème valant la peine d’être recherchées comme une oasis d’équilibre dans l’assaut des jours fériés à venir. L’une des plus populaires et celle de Julian Savory, qui a une sorte de tonalité médiévale. Ma version favorite est celle du compositeur anglais Enid Richardson, disponible uniquement dans une collection de Noël difficile à trouver. Mais les lecteurs de TCT ne doivent pas s’inquiéter. Si vous pouvez vous faire à ma partition écrite à la main, je l’ai transcrite et transposée dans une tonalité plus facile à chanter il y a quelques années [lien pour y accéder dans le texte anglais]. Rassemblez famille et amis autour du piano et chantez ensemble ; cela vous mènera à une compréhension plus profonde de la raison de la venue du Christ enfant parmi nous.


Rober Royal est le rédacteur en chef de The Catholic Thing et le président de l’institut Foi & Raison de Washington.

Source : « La Sainte Nuit » par Carlo Maratta, vers 1655 [galerie de peinture des anciens maîtres, Dresde, Allemagne]

Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/12/24/christmas-2/