Après Manchester - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Après Manchester

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Le drame de Manchester, qui s’est produit lundi soir, a eu, évidemment, un effet massif sur l’opinion occidentale. En France, nos souvenirs du Bataclan ont rejailli illico, avec cette circonstance aggravante que dans l’immense salle de concert, il y avait des enfants ! Cependant, si l’on se permet de prendre quelques distances avec la douleur des familles et des proches, on s’interroge sur le projet terroriste qui, forcément, prend en compte, ou plutôt en otage, l’opinion tétanisée. Régis Debray dans son dernier essai (Civilisation chez Gallimard), rend compte avec précision du phénomène : « En tant que machine à produire de l’événement, aux productions conçues pour carillonner, éblouir et sidérer, l’action terroriste à l’âge de la reproductivité technique est dotée d’une capacité virale, sans concurrence, puisqu’elle se duplique aussitôt en millions de flashs, acheminés instantanément à domicile ou dans notre poche. Avec un camion, une bonbonne de gaz et une Kalachnikov, un désaxé, télécommandé ou non, mais anxieux de monter au paradis, peut, en quelques secondes, plonger dans l’angoisse des dizaines ou des centaines de millions de personnes. »

La machine médiatique s’est emballée hier, les chaînes d’information continue se mobilisant toute la journée, sans perdre un instant, pour décortiquer l’attentat, faire le point sur l’enquête, donner écho aux messages de solidarité… C’est triste à dire, mais c’est exactement ce que veulent les terroristes : donner le maximum d’écho à leur attentat. Mais il est impossible de faire autrement dans une société de communication qui ne fonctionne qu’à la performance, sinon à la surenchère : tout savoir, tout faire savoir au plus vite, et captiver ainsi l’intérêt d’un audimat qui est sa raison d’être et plus prosaïquement sa source de revenus. Nulle réprobation morale à dire cela : les confrères font le job. Tout le problème est de connaître le résultat final de cette mobilisation. Régis Debray fait une hypothèse intéressante à étudier : « Le djihad explosif (…) incite à un contre-djihad spirituel, apte à bander les ressorts détendus d’une personnalité collective. Quel meilleur service que de rendre un nous à un agrégat inconstitué de moi-je désunis ? » Puisse-t-il être entendu et compris !

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 24 mai 2017.