Affaire One of Us – Un de nous contre la Commission européenne - France Catholique
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Affaire One of Us – Un de nous contre la Commission européenne

Justice européenne

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L’Initiative Citoyenne Européenne est une innovation du traité de Lisbonne (2007), moyen pour les citoyens de participer au processus démocratique et législatif. Si en moins d’un an, plus d’un million d »Européens apportent leur soutien à une proposition législative qui relève de la compétence de l’Union européenne, la Commission européenne doit alors envoyer cette proposition au Parlement européen et lancer le processus législatif d’une possible adoption de l’initiative comme nouvelle loi européenne.

C’est exactement ce qu’il s’est passé pour l’Initiative Citoyenne Européenne One of Us/Un de nous qui a été, avec plus de 1,7 million de signatures certifiées (28 mars 2014), l’Initiative Citoyenne la plus réussie dans l’histoire de l’Europe. Mais, comme notre Conseil économique et social pour la pétition de la Manif pour tous, la Commission européenne a arbitrairement refusé (28 mai 2014) de recevoir cette pétition.

Les représentants de Un de Nous ont porté l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne en disant que rejeter une Initiative Citoyenne Européenne pour la seule raison que la Commission européenne n’a pas aimé le sujet sur lequel elle portait relevait de la « discrimination ».

L’Initiative Un de Nous avait fait appel à l’Union européenne pour qu’elle protège et fasse respecter toute vie humaine dès sa conception, en proposant une législation qui interdirait les fonds que l’Union européenne investit dans la recherche sur l’embryon ainsi que les financements qu’elle envoie pour promouvoir l’avortement à l’étranger.

Le tribunal de l’Union européenne a rendu son jugement le 23 avril 2018 (T‑561/14). Sur l’aspect institutionnel du recours, le Tribunal a donné raison à Un de nous en décidant que l’acte par lequel la Commission a décidé de ne pas donner suite à l’Initiative citoyenne produit des effets juridiques et qu’il est donc attaquable devant le Tribunal de l’Union européenne (§77).

Le Tribunal adopte la position d’Un de nous lorsqu’il reconnaît que : « le défaut de soumission du refus de la Commission […] à un contrôle juridictionnel compromettrait la réalisation de cet objectif [« encourager la participation des citoyens à la vie démocratique et de rendre l’Union plus accessible »], dans la mesure où le risque d’arbitraire de la part de la Commission dissuaderait tout recours au mécanisme de l’ICE, eu égard, également, aux procédures et conditions exigeantes auxquelles ce mécanisme est soumis. »

Ainsi, le Tribunal sauve le mécanisme d’Initiative citoyenne de l’arbitraire le plus complet en décidant qu’il peut faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Le quasi-monopole d’initiative législative de la Commission s’en trouve d’autant réduit. Néanmoins, le Tribunal a aussitôt limité la portée de son contrôle en jugeant, d’une part, que « la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation aux fins de décider d’entreprendre ou pas une action à la suite d’une ICE » (§145 et 169) et d’autre part, que la décision de la Commission : « doit faire l’objet d’un contrôle restreint de la part du Tribunal, visant à vérifier, outre la suffisance de sa motivation, l’existence, notamment, d’erreurs manifestes d’appréciation viciant ladite décision » (§ 170).

Dès lors, le Tribunal n’a pas examiné de façon approfondie les griefs relatifs aux questions éthiques soulevés par Un de nous. Il ne leur a consacré qu’une dizaine de paragraphes sur les 185 que compte le jugement pour conclure, au terme de ce survol, que l’argumentation de la Commission n’était pas « entachée d’erreur manifeste » (§182).

Ainsi, ce jugement constitue une victoire sur le plan institutionnel et une défaite sur le plan éthique pour Un de Nous. Il est surtout une victoire pour la Cour de Justice qui a étendu son pouvoir de contrôle sur la Commission en matière d’initiative législative.

Les partisans d’une démocratisation de l’Union européenne s’en réjouiront car le mécanisme d’Initiative citoyenne s’en trouve quelque peu renforcé. Finalement, l’Initiative Un de Nous n’est certes pas parvenue à renverser le choix de la Commission européenne de sacrifier le respect de la vie humaine prénatale à l’intérêt de la technoscience et au contrôle démographique des pays pauvres. Cette Initiative a néanmoins permis :

– de porter, avec une puissance inégalée, le témoignage de l’humanité de chaque vie individuelle, dès avant la naissance ;

– de rassembler, au sein de la Fédération Un de Nous, un grand nombre de personnes et d’organisations porteuses de ce témoignage à travers l’Europe ;

– de placer l’Union européenne face à ses contradictions en matière de démocratie et de rendre un peu moins arbitraire le pouvoir de la Commission européenne.