À propos de l’hémorroïsse - France Catholique
Edit Template
L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
Edit Template

À propos de l’hémorroïsse

551/

Copier le lien

Les lectures de la messe du jour, nous donne à lire le récit de la guérison de la femme atteinte de pertes de sang. Chez les Juifs, une maladie repoussante qui témoigne de l’impureté de cette femme, alors tenue à l’écart, elle la sans mari, la sans enfant, figure même de l’indignité.

L’hémorroïsse se dit, elle dont ces pertes de sang durent depuis douze années, soit un temps oppressant, si long dans sa lenteur douloureuse, si difficile à supporter, passé le plus souvent à quérir des soins toujours vains même si affreusement coûteux : « Je ne sais rien de ce Jésus mais on me rapporte de toute part qu’Il guérit les malades. Les médecins qui m’ont ruinée ne sont que des vaniteux et des incapables. Lui, si ce que l’on m’a raconté est vrai, et pourquoi serait-ce faux ?, est un homme tout à fait autre. C’est sûrement un homme de Dieu. Peut-être que si je pouvais toucher seulement la frange de son vêtement ! Le bas de son manteau ! Oui, je m’en trouverais guérie ».

Alors, Le voyant passer alors qu’Il part vers la maison de Jaïre, le chef de la synagogue, un homme important, elle se glisse comme elle peut jusqu’à Lui et touche son vêtement, à peine pour que cela ne se sache pas, seulement du bout des doigts. Cela fait, elle s’esquive, profondément troublée d’être guérie, car elle ressent cette guérison par une douce chaleur qui l’envahit. Elle ne voit pas Jésus se retourner, occupée qu’elle est de s’éloigner tout en réfléchissant, concentrée sur la merveille qui s’est opérée en elle. Peut-être que monte en son cœur une question, pour elle sans réponse possible : « Qui donc est cet homme ? ». Très éloignée d’aller vers l’impensable, elle est déjà au-delà de la foule. Cependant elle entend Sa voix, forte, qui interpelle : « Qui a touché mon vêtement ? » Une crainte, une angoisse la saisit : « Qu’ai-je fait ? ». Un tremblement qu’elle ne peut calmer trahit son inquiétude.

Souvent il arrive que l’on éprouve quelques difficultés à comprendre ce que dit Jésus, surtout quand la réponse ou l’interprétation semble évidente. Qui ? alors que la foule se presse autour de Lui et l’enferme… Ses proches, disciples et apôtres s’étonnent : « Regarde, Seigneur, on ne peut pas éviter de toucher ton vêtement ». Ce sont phénomènes humains, inévitables, mais comment pourraient-ils, eux qui pourtant ont déjà assisté à tant et tant de miracles, que s’Il pose cette question c’est qu’Il veut leur faire comprendre qu’il s’agit de tout autre chose.

Jésus sous-entend qu’une décision a été prise par une « personne » de d’obtenir de Lui, par ce toucher discret, secret, un quelque chose de précis et qu’Il connaît : un vouloir qui découle d’une autre logique, celle de la foi, quoiqu’Il sache que la foi de cette personne est vacillante, imprécise, portant sur un pouvoir, une puissance et non sur Lui, vrai Dieu et vrai homme.

L’hémorroïsse obéit : elle revient conc, retraverse les rangs serrés de la foule et se présente à Jésus en se jetant à ses pieds, comme l’enfant prodigue : « Pardonne-moi, Seigneur, si j’ai mal fait et sans doute ai-je mal fait car j’ai abusé de ta puissance, je l’ai provoquée sans même Te prier, Te supplier. J’étais malade et Toi seul dont j’ai touché le vêtement en dernier recours, dernier espoir, Toi seul a su me guérir sans même que j’ai eu à réclamer ma guérison quoique mon geste ait été un cri vers Toi, une supplication vieille de douze années et Tu l’as entendue puisque Tu as réclamé après moi ! » Elle attend maintenant sa condamnation mais elle entend tout autre chose : « Ma fille, ta foi est grande et elle t’a sauvée. Va en paix désormais et sois guérie de ton infirmité ». Il ne dit pas : « Tu as été guérie » mais « sois guérie » ! Quelle infirmité pourrait donc demeurer en elle dont elle n’a aucunement conscience ? Quelle invalidité pour être exact, quel empêchement d’aller plus oultre ?

On s’en étonne comme un enfant qui ne saurait comprendre qu’il s’agit ici d’une autre guérison, de la seconde guérison en vérité, bien plus importante que la première : la guérison de son esprit, resté à la surface des choses, cette seule et pauvre quoique si heureuse guérison dont elle pensait avoir besoin, le sauvetage de son pauvre corps depuis si longtemps maltraité par la maladie.

Jésus affirme : « Ta foi t’a sauvée », mais cette foi est-elle seulement celle d’un habitant des limbes qu’elle avait exprimé au-début ? D’une locataire à jamais du seul schéol, alors que devant elle Dieu se tient debout ? Tout en disant ce qu’Il lui confie, Il la regarde et son regard la pénètre jusqu’au plus profond de son être, de son cœur, qui est, pour les enfants d’Israël, le siège de tout ce que l’être peut comprendre et ressentir. Et c’est alors que la foi de l’hémorroïsse fait soudain un bond inimaginable, imprévisible, de l’homme dont elle avait, à sa façon, sollicité le secours jusqu’à ce Dieu inconnu qui l’avait tenue toute en son regard divin et venait de lui manifester ainsi la puissance de son amour.