La Corse compte parmi ses originalités de transport le chemin de fer. C’est à Napoléon III qu’elle doit ce qui était alors une innovation. Faite de tunnels et de viaducs, la ligne des chemins de fer de la Corse doit beaucoup à Eiffel dont l’épouse était corse et qui fit notamment l’impressionnant pont sur le Vecchio, sur la commune de Vivario.
À partir de Ponte Leccia, nœud ferroviaire au centre de l’île, une voie part vers le nord-ouest pour rejoindre Calvi en traversant L’Île-Rousse. Cette ligne fait découvrir la Balagne qui est plus qu’une province de la Corse mais bien « une île dans l’île ». Les villages de Balagne, Pietracorbara, Lama, Urtaca, sont posés sur des pitons qui tous voient la mer que le voyageur découvre, lui, lorsque le train redescend vers L’île-Rousse. La ligne fait alors un détour étrange qui lui permet de longer la mer et de traverser la ville. Ce détour serait dû au caprice d’une belle dame qui habitait le château de L’Île-Rousse, aujourd’hui hôtel Napoléon-Bonaparte, et qui voulait voir passer le train à vapeur sous ses fenêtres. Le voyageur d’aujourd’hui rend grâce à cette lubie car il peut admirer une eau turquoise au milieu de rochers rougeoyants qui donnent son nom à la ville.
L’Île-Rousse est d’abord un port qui, malgré une apparente exiguïté, accueille de gros navires et de nombreux yachts, en particulier des lignes régulières qui relient le continent à la Corse. Autour de ce port et du village de pêcheurs, une ville a réuni les maraîchers de la région, les producteurs d’huile et de vins et aujourd’hui tous ceux qui vivent du tourisme.
Une cave rupestre abrite une barque que l’on sort pour la bénédiction des bateaux, le jour de la Saint-Érasme, fête des pêcheurs. On peut lire sur les murs de la cave le nom des marins morts en mer et de nombreux ex-voto en action de grâce pour ceux qui ont été sauvés.
Remontant dans le train, le voyageur continue vers Calvi, capitale de la Balagne en traversant Algaghiola qui fut au Moyen Âge une des villes les plus importantes de la Corse. Dans les montagnes qui surplombent la mer se trouvent le couvent de Corbara et, au-dessus, celui de Marcassu où des communautés jeunes et ferventes prient pour la Corse, la France et l’Église.
La source des restanques
Le couvent de Corbara est animé par la communauté Saint-Jean qui accueille toute l’année de nombreux retraitants. Le couvent de Marcassu, quant à lui, a été rénové par la communauté du Rosier de l’Annonciation, dans laquelle les religieuses se dévouent au service des prêtres et des enfants. Leur devise d’origine bénédictine, « ora et labora », se réalise dans le développement d’une activité agricole en restaurant les nombreuses restanques du couvent – murets de soutènement en pierres sèches, construits sur un flanc de colline, pour établir une terrasse de culture. Elles étaient abandonnées au maquis depuis de nombreuses années. Il faut citer ici l’aide précieuse apportée par le bureau d’études Labora qui, en Corse comme sur le continent, accompagne les ordres religieux dans leur retour au travail agricole. Les Sœurs animent aussi de nombreux patronages par lesquels la transmission de la foi, qui avait été interrompue, reprend son cours.
Une histoire vraie illustre bien cette reviviscence : les restanques du couvent étaient asséchées depuis très longtemps mais une source a rejailli permettant de les irriguer. Les couvents de Corbara et de Marcassu ressemblent à cette source qui irrigue à nouveau la Balagne, terre très anciennement chrétienne. La protection paternelle de Mgr Bustillo, après celle de Mgr de Germay, et l’accueil chaleureux des populations leur permet d’envisager un avenir missionnaire fécond sous le manteau de Marie Reine de la Corse.