Quel est le sens de l’union des Cœurs de Jésus et Marie ?
Quel est le sens de l’union des Cœurs de Jésus et Marie ?
En ce 350e anniversaire des apparitions du Cœur de Jésus à sainte Marguerite-Marie à Paray-le-Monial, il est bon de méditer sur l’union ineffable des Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie.
Ce splendide tableau de Jean-Faur Courrège, visible au musée des Beaux-Arts de Tours, représente les Cœurs unis de Jésus et de Marie entourés de la Couronne d’épines, le Sacré-Cœur percé par le coup de lance de Longin et le Cœur immaculé transpercé par le glaive prédit par le prophète Siméon.
Nous y voyons, sur le plan horizontal, en adoration devant la Sainte Trinité, deux anges agenouillés, l’un la tête humblement baissée, l’autre le regard émerveillé levé vers le ciel. Sur le plan vertical, Dieu le Père étend les bras, geste qui signifie l’amour ineffable qui l’unit au Fils dans la Personne du Saint-Esprit, représentée par la colombe entourée d’une luminosité céleste. Le fait que la deuxième Personne de la Sainte Trinité est figurée par le Sacré-Cœur, indissolublement uni au Cœur immaculé, est significatif. L’union indissoluble de ces deux Cœurs est voulue par le Père qui, dans ses desseins éternels, avait prévu « dans un seul et même décret de prédestination », comme le dira le bienheureux Pie IX dans Ineffabilis Deus en 1854, l’Incarnation de son Fils et la Conception immaculée de sa sainte Mère, en vue du salut de l’humanité.
« Elle souffrait avec lui et en lui »
La compréhension de ce mystère des Cœurs unis de Jésus et de Marie fut approfondie tout spécialement par saint Jean Eudes qui, parlant de la Vierge Marie, dit : « Par l’union très étroite qu’elle avait avec son Fils, avec lequel n’ayant qu’un Cœur, qu’une âme, qu’un esprit et qu’une volonté, elle voulait tout ce qu’il voulait, elle faisait et elle souffrait en quelque façon, avec lui et en lui, tout ce qu’il faisait et tout ce qu’il souffrait. De sorte que, lorsqu’il s’immolait en la Croix pour notre salut, elle le sacrifiait aussi avec lui pour la même fin… » Le Cœur de Marie, ne faisant qu’un avec le Cœur de Jésus, et ayant donné le jour à ce divin Cœur, étant comme l’arbre fruitier sur lequel a poussé ce divin fruit, a ainsi participé intimement au sacrifice par lequel le genre humain fut racheté : « Le Cœur de cette glorieuse Marie a contribué à l’œuvre de notre rédemption, parce que Jésus, qui est tout ensemble et l’hostie qui a été sacrifiée pour notre salut, et le prêtre qui l’a immolée, est le fruit du Cœur de cette bienheureuse Vierge… » Non seulement le Christ est le prêtre qui immole et l’hostie qui est sacrifiée, mais le Cœur de Marie aussi a un double rôle sacrificiel : « Ce même Cœur est aussi et le sacrificateur qui a offert cette divine hostie, et l’autel sur lequel elle a été offerte, non pas une fois seulement, mais mille et mille fois, dans le feu sacré qui brûlait sans cesse sur cet autel… » (Le Cœur admirable de la Très Sacrée Mère de Dieu, livre II, chapitre IV).
Union indissoluble
Le Cœur de la Sainte Vierge est ainsi l’autel du sacrifice où, comme Corédemptrice, elle immole son Fils, et s’offre elle-même au Père pour le salut des hommes, comme le chante saint Jean Eudes dans son « Hymne au Très Saint Cœur de la Mère de Dieu » (ibid., livre XI) :
Lorsque, pour effacer nos crimes, Il fallut que le Roi des rois Se chargeât de ce pesant poids Qui nous enfonçait aux abîmes, Tu fus le bûcher et l’autel Où ce Dieu devenu mortel Consuma ce grand sacrifice : Le sang qu’il répandit était un sang commun, Et ce Cœur empourpré montrait qu’en ce supplice Le prêtre, la victime et l’autel n’étaient qu’un.
L’union indissoluble des deux Cœurs dans l’œuvre salvifique trouve un écho dans l’harmonie de ces vers, grâce aux rimes embrassées et croisées et au rythme régulier des octosyllabes et des alexandrins. En effet, la forme poétique et la matière théologique s’harmonisent l’une avec l’autre. Ce qui est remarquable dans les trois alexandrins à la fin de la strophe est la communauté de sang entre les deux Cœurs qui, partageant le même sang immaculé, ne font qu’un, de sorte que ce Cœur en quelque sorte unique de Jésus et de Marie ne constitue, pour ainsi dire, qu’un prêtre, qu’une victime et qu’un autel.
Communauté de chair et de sang
Saint Jean Eudes nous fait comprendre en effet que, puisque le sang du Christ est le sang de Marie, alors la plaie faite par la lance qui a percé le Cœur du Christ est également la plaie faite au Cœur de sa Sainte Mère : « Si la chair de Jésus est la chair de Marie, qui peut nier que la plaie de la lance qui a percé le côté sacré et le divin Cœur de Jésus, afin d’en tirer jusqu’à la dernière goutte de son sang pour nous racheter et pour nous témoigner les excès de son amour, ne soit la plaie du Cœur de Marie ? » Et ce saint de conclure que cette communauté de chair et de sang, cette indissolubilité des deux Cœurs dans la douloureuse Passion n’a d’autre but que d’achever l’œuvre de notre Salut éternel : « Enfin, si la chair de Jésus est la chair de Marie, qui peut nier que toutes les plaies dont cette très sainte chair a été couverte, depuis la tête jusqu’aux pieds, toutes les douleurs qu’elle a souffertes, tout le sang qu’elle a répandu, et la mort très cruelle qu’elle a endurée, ne soient les plaies, les douleurs, le sang et la mort de Marie ? Et qui peut douter que cette divine Marie, n’ayant qu’un Cœur et qu’une volonté avec son Fils Jésus, elle n’ait offert avec lui toutes ces choses à Dieu pour la même fin pour laquelle il les lui offrait, c’est-à-dire pour notre Rédemption ; et qu’ainsi elle n’ait coopéré avec lui d’une manière très excellente à l’œuvre de notre Salut ? » (ibid., livre II, chapitre IV).