La Picardie commença par voir les tribus gauloises s’installer, attirées par les terres à blé, et les facultés de communication. On y voyait les Morins, les Ambiens – d’où vient le nom d’Amiens –, les Bellovaques et les Sussions que Rome rassembla dans une grande fédération appelée la Belgique seconde.
Les Francs s’en emparèrent à la dislocation de l’Empire romain, et l’évangélisation arriva avec l’érection de monastères : Centula, ou Saint-Riquier (625-650), Saint-Quentin (650), Corbie (657), Pérone (650) et bien sûr Saint-Vaast (664). Tout le Moyen Âge vit un grand développement de la culture du blé et des échanges commerciaux.
La bataille de Bouvines, en 1214, se déroula dans les campagnes proches et la Picardie vit ainsi le commencement du Royaume de France qui s’imposait face aux volontés impériales. Passée aux Anglais après la bataille de Crécy (1346), elle fut ensuite bourguignonne puis redevint française à la mort de Charles le Téméraire (1477), grâce à l’habileté de Louis XI.
C’est sous Louis XIV que, grâce à Colbert, elle devint un haut lieu de manufacture ; on note particulièrement celle de Saint-Gobain. Cette terre fut, aux temps modernes, un champ de bataille. La percée allemande de 1917 provoqua le ressaisissement des Alliés qui décidèrent de confier le commandement au maréchal Foch. Le vent tourna alors et Amiens fut sauvé. En 1940, Weygand essaya d’arrêter l’avancée allemande, mais c’est seulement en 1944 que la première armée canadienne libéra la Picardie.
Mais ce qui fait la gloire d’Amiens, c’est sa cathédrale, la plus grande des cathédrales de France, remarquable non seulement par son architecture mais aussi par la sculpture et, à l’intérieur, les stalles dont les motifs évoquent toute la vie de la province et sont une véritable leçon d’histoire et d’économie en même temps que d’histoire sainte.
Les statues les plus célèbres sont celles de la Vierge dorée, de l’Ange pleureur, et surtout le Beau Dieu entré dans l’histoire comme « le Beau Dieu d’Amiens » qui rappelle que le Créateur n’est pas seulement bon mais aussi qu’il est beau.
C’est à Amiens que Saint Louis, choisi comme arbitre dans la querelle qui opposait le roi d’Angleterre Henri III et les barons anglais révoltés, rendit sa décision (1264) appelée « Mise d’Amiens ». C’est aussi à Amiens que la CGT décida d’adopter la théorie de Karl Marx et de lutter pour la disparition du patronat et du salariat « en interdisant toute discussion politique ou philosophique dans le syndicat ».
À bicyclette
Aujourd’hui, Amiens, à une heure de train de Paris, conserve un attrait important en raison de son caractère jardinier et aquatique. En contrebas de la cathédrale, un quartier fait de jardins et de plans d’eau attire le promeneur. Si la visite à pied est un peu longue, et le circuit en automobile trop rapide, le moyen idéal de locomotion reste la bicyclette très prisée par les habitants et par les visiteurs. On y voit des oiseaux aux larges ailes s’envoler d’un vol lourd mais décidé pour aller rejoindre la baie de Somme. Dans le quartier de la cathédrale, les hôtels particuliers des grandes familles de Picardie sont toujours habités, et donnent à la ville une allure noble et paisible qui montre qu’elle a dominé les événements sanglants qui déchirèrent la région.
Le Français d’aujourd’hui ne perd pas son temps en allant pèleriner vers cette province qui reste un des fleurons les plus célèbres et les plus enviés du royaume.