Gabrielle Cluzel, l’anti-Beauvoir - France Catholique
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Euthanasie : la fuite en avant
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Gabrielle Cluzel, l’anti-Beauvoir

À rebours des discours féministes, la journaliste revendique bien haut l’éternel féminin, qui se réalise notamment dans la maternité.
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© Peter Potrowl / CC by-sa

Gabrielle Cluzel s’est imposée, ces dernières années, comme une interlocutrice particulièrement pugnace, sans cesse aux aguets et à la réplique pour débusquer les idées fausses qui n’ont de prestige qu’à se vouloir à la mode. On ne lui fera rien avaler qui se réclame de la manie déconstructrice ou wokiste contemporaine. Elle a pour arme d’attaque et de défense un esprit pétillant mâtiné d’humour, qui se révèle redoutable pour l’adversaire. On s’en rend compte une fois de plus avec son dernier essai, intitulé Yes Kids qui s’oppose frontalement au mouvement « No Kids », celui qui, au nom de l’écologie, voudrait que les femmes renoncent à la maternité.


Sept enfants

Il y a de quoi faire bondir cette mère de sept enfants qui n’a, par ailleurs, jamais eu le sentiment d’être aliénée dans sa vie de femme par une charge excessive. Il est vrai qu’elle est un modèle du genre. On est dans l’admiration de l’activité qu’elle peut déployer en une seule journée. Directrice du site Boulevard Voltaire, participant aux débats sur CNews et Europe 1, elle trouve encore le temps d’écrire des livres. À elle seule, elle dément la formule latine « Aut libri aut liberi », « Ou bien des enfants, ou bien des livres ». N’était-ce pas aussi l’opinion d’une Simone de Beauvoir, la figure phare d’un féminisme à l’égard duquel elle n’a cessé de se distinguer depuis l’adolescence ?

À ce propos, elle raconte comment, à 16 ans, elle découvrit le récit autobiographique de la compagne de Sartre (Mémoires d’une jeune fille rangée). Mais sa lecture n’en fit nullement une disciple existentialiste de l’auteur, comme tant d’autres. Elle rappelle comment elle fut déçue de la rupture de l’amourette naissante de Simone avec le beau Jacques, un cousin éloigné : « Las, voici qu’au détour d’une page Jacques disparaît. Exit. À la trappe. Simone s’entiche d’un homme affreux, un prof de philo laid comme un pou, écrivant des pavés cafardeux et avec lequel elle n’aura jamais d’enfant. Quelle déception ! » Voilà de quoi faire rugir de fureur toutes les admiratrices béates de la grande Sartreuse.

Mais, derrière la rosserie, se détache une vraie leçon existentielle à méditer : « La femme n’a pas à se défaire de son utérus sur le bord de la route comme d’un vieux sac trop lourd pour courir plus vite et arriver plus haut. (…) La maternité est au contraire une expérience singulière, incomparable, précieuse, un privilège qui n’appartient qu’à elle, et qu’à ce titre elle ne doit pas se laisser voler. »

Fierté maternelle

Le style, c’est la femme ! Gabrielle Cluzel n’écrit jamais de façon pesante. Cela ne signifie nullement qu’elle reste à la surface des choses. Bien au contraire, elle vise toujours l’essentiel qui réside dans le quotidien des femmes et où elles peuvent d’autant mieux se reconnaître qu’il désigne ce qu’elles vivent au plus profond d’elles-mêmes. À l’opposé des intellectuelles qui se proclament féministes, les mères de famille, de toutes conditions, savent pourquoi il y a une fierté maternelle, en dépit de tous leurs défauts et des tracas de leur condition.

Simone de Beauvoir, encore, exerçait tout son talent à débusquer « l’éternel féminin », cette expression inventée par Goethe, pour dénoncer toute une stratégie de mise en condition de la femme. Cela n’est pas pour impressionner Gabrielle Cluzel qui revendique bien haut cet éternel féminin, parce qu’il marque sa différence avec le masculin. Ainsi le propre du cerveau masculin serait de systématiser à outrance tandis que le cerveau féminin se distinguerait par sa faculté d’empathie. Bien sûr que cette différence n’est pas toujours sensible au même degré. « Bref, la femme serait – généralement – altruiste. C’est grave docteur ? » Non évidemment ! La grâce d’être femme est de sourire sur le monde. Merci, Gabrielle, de l’affirmer si bien !

Yes Kids. La colère d’une mère face aux nouveaux diktats de la famille, Gabrielle Cluzel, éd. Fayard, mars 2025, 208 pages, 21,50 €.