Une tentation : le culte de la personnalité - France Catholique
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Pontificat de François - numéro spécial
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Une tentation : le culte de la personnalité

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La coopération d’individus, soutenus par la grâce, à l’intérieur de l’organisation qu’on appelle « l’Église catholique », nous a amenés à connaître Jésus Christ et la Voie qu’Il a enseignée. L’Eglise n’a pas de divisions ; pas de tanks ; pas de missiles ; juste le Christ, Son Corps Mystique, les Sacrements, et le message de salut.

Dans un sens, le « Culte de Jésus » est le seul « culte rendu à une personne » qui soit authentique dans toute l’histoire de l’humanité. Tous les autres « cultes rendus à une personne » (pour distinguer de la Personne du Christ, appelez-les « cultes de la personnalité »), quand on n’y résiste pas, deviennent facilement des formes de narcissisme.

L’Incarnation a des conséquences logiques. Si Dieu est devenu vraiment homme et a habité parmi nous, cela signifie qu’IL est un homme avec chair et sang et toutes les limitations de temps et d’espace associées à Son humanité terrestre. Il vient dans la paix et la liberté. Mais Il n’est pas un Superman, ou Terminator ou Robocop. C’est pourquoi, Dieu a prévu que même le Christ en tant qu’Il est homme « dépend » de notre libre réponse à Son enseignement (tout en reconnaissant toujours le travail secret de la grâce divine). Jésus ne nous force pas. Il persuade par le pouvoir de celui qu’Il est et de ce qu’Il fait et dit.

Dieu a besoin de secours car Jésus, le Verbe incarné, est « seulement un homme ». « Et il appela les douze ; et Il commença à les envoyer deux par deux, et Il leur donna pouvoir de chasser les démons. » (Mc 6 :7). Ensuite il engage les soixante-douze disciples et les envoie en Son nom. Tel fut le commencement de ce qui devait devenir l’Église, le « Corps Mystique du Christ ».

Après l’Ascension et la Descente de l’Esprit Saint, il fallait que le message et le culte de Jésus fussent transmis en leur temps à travers les siècles. L’évangélisation n’est pas automatique ou magique, mais requiert notre coopération (dans notre rôle tout à fait individuel), guidés par la grâce divine. Les récits des extraordinaires actions du Christ et Son enseignement sont proclamés, confiés à l’écrit, et transmis de génération en génération. Jésus ne travaille pas seul. Par nature et par dessein de Dieu, l’expansion du « culte de Sa personne » a besoin du peuple et des structures de l’Église.

Mais « les cultes de la personnalité » – sans Dieu ou la Personne du Christ – se terminent toujours par la destruction. Les rois sages règnent avec la justice de Dieu, mais leurs règnes deviennent anarchiques et finalement auto-destructeurs quand ils tournent au « culte de la personnalité ». Le règne du Roi Salomon était porteur de grandes promesses, mais il finit mal parce qu’il avait oublié la source de sa sagesse légendaire. L’histoire sanglante du XXe siècle révèle maintes tentatives de favoriser sur le plan politique des cultes de la personnalité, qui tous échouent lamentablement en apportant en quantité mort et destruction.

Les religions, grandes et petites, peuvent aussi bien être enclines à engendrer des « cultes de la personnalité », mensongers et potentiellement destructeurs. Il n’est que de voir des horreurs comme le crime de masse de Jonestown. Mais il y a en quantité d’alarmants exemples de « cultes de la personnalité »  qui surgissent à l’intérieur même de l’Église.

Le père Charles Coughlin (le « Prêtre radio des années 1930) et Fulton J.Sheen (dont les indices d’écoute à la TV dépassaient ceux du comédien Milton Berle) étaient des prêtres « célébrités » dans la vie réelle. Par contraste, les papes de leur époque – gardiens du Magistère de l’Église – étaient obscurs et pas particulièrement divertissants.

Ensuite le pape Jean XXIII et plus tard le pape Jean-Paul II apparurent comme papes « célébrités » avec un succès public sans précédent. Jean-Paul II eut une grande action dans le monde géopolitique et fit avancer l’orthodoxie catholique à un moment où les dissensions à l’intérieur de l’Église étaient répandues et très destructrices. Comme Fulton Sheen et Jean XXIII, Jean-Paul II utilisa sa popularité au service de l’Evangile ; le nom de Jésus était fréquemment sur ses lèvres. Mais le succès populaire et le développement de la « célébrité » dans l’Église de notre temps fut aussi l’occasion d’une sérieuse mise à l’écart de la Personne du Christ.

La faute en est en partie à Bing Crosby. Dans son film classique de 1944, « Going My Way », le rôle de Crosby – le père Chuck O’Malley – a peu de choses à faire avec le Christ. Il a tout à faire avec un prêtre charismatique qui rencontre la jeunesse grâce à son talent et à sa personnalité. Le film eut un grand succès populaire et, sans le vouloir, il changea sans doute la façon dont la culture populaire voyait les ministres de l’Évangile. Nous avons tendance aujourd’hui à réclamer des prêtres charismatiques et « vibrants », souvent au détriment des difficiles vérités de la Foi.

L’immensément populaire Jean le Baptiste choisit de « décroître » pour que le Christ « croisse » (Jn 3 :30). Aujourd’hui, il y a une tendance marquée chez beaucoup de ministres de l’Évangile à promouvoir leur propre « culte de la personnalité », en devenant des amuseurs cléricaux, laissant Jésus et Son Nom sacré pratiquement étouffé par le narcissisme. La tentation ne s’arrête pas aux prêtres ordinaires. De plus en plus nous entendons des discours de prélats de haut rang où le nom de Jésus n’est jamais mentionné. Pendant sa visite aux USA, le pape François s’est adressé au Congrès, aux Nations Unies, à l’Independance Hall, et le nom de Jésus n’a pas été entendu une seule fois dans les 8000 mots de ses trois discours.

La foi catholique n’est pas la foi aux gouvernants, papes, évêques, prêtres – ou même saints, si nécessaires soient-ils à l’organisation et à la mission de l’Église. Dans la Foi il s’agit fondamentalement de connaître et d’aimer le Christ et de vivre selon la Voie qu’Il a tracée, jusqu’au salut. Un narcissisme de clerc peut être divertissant un temps, mais ne peut jamais sauver. Le narcisse, par son « culte » perverti de sa propre « personnalité » empêche de voir le Christ. Il faut qu’il dégage de la route.

La drogue de la vaine gloire et la chaleur qu’elle procure peuvent être terriblement addictives. Ainsi nous pouvons commencer à rompre le charme en reconnaissant que toute autorité cléricale vient du Christ seul. Et il en va de même pour ceux d’entre nous qui exercent le ministère sacré : en prêchant et dans nos propos, mettre fréquemment et respectueusement à nos lèvres le nom de Jésus.

« Donc Dieu L’a exalté à la plus haute place et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus, tout genou ploie au ciel et sur la terre et sous la terre et que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. » (Philippiens 2 : 9-11).

5 février 2017

Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/02/05/a-temptation-the-cult-of-personality/

A Temptation: The Cult of Personality

Photo : Le père Charles Coughlin, vers 1938.