Daredevil contre le Diable - France Catholique
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Daredevil contre le Diable

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Il y a des spéculations sans fin quant à l’affiliation religieuse des super-héros. Pourquoi donc, au nom du ciel ?

Eh bien, parce que Superman, Batman, Hulk et les autres luttent contre le mal. C’est pour cela qu’ils sont des héros, bien qu’en tant qu’hommes ils soient préoccupés de la violence induite par leurs combats. C’est aussi pourquoi il n’y a pas de super-héros du nom de Négociateur ou Orateur… ou Éditorialiste. Les mots ne font pas des armes convaincantes ; le stylo n’est pas plus puissant que l’épée. Les super-héros ne sont pas des arguments : ils mettent fin aux arguments.

Clark Kent est méthodiste ; Bruce Wayne est catholique (ou épiscopalien) ; Bruce Banner est catholique. Mais quand les capes sortent du placard (ou quand Banner se transforme en géant vert) – quand la bataille fait rage – la religion du héros est la guerre, et la violence sa liturgie.

Les créateurs et diffuseurs des super-héros sont généralement évasifs sur les questions de foi. Wayne peut bien être catholique, nous ne le voyons jamais à la messe. Et comme groupe, l’ensemble des super-héros est apparemment dépassé en ce qui concerne la pratique de la foi.

Mais il y a un courageux super-héros qui va beaucoup à l’église. Son nom est Matt Murdock. Il y a du Bruce Wayne en lui, à l’exception du compte en banque à 11 chiffres. Il n’a pas de pouvoirs extra-normaux, pas de vision à rayons X, il ne peut pas voler, il ne se transforme pas, il n’est pas un mutant. Quand il parcourt les rues pour les débarrasser des Hell’s Kitchen, c’est souvent sans arme, bien que, à l’image des fondateurs du karaté – les Okinawans du 14e siècles qui ont détourné leurs mains et leurs outils agricoles en armes pour lutter contre l’envahisseur japonais – Murdock emploie ce qui lui tombe sous la main dans le centre de Manhattan pour compléter les compétences en arts martiaux qu’il perfectionne depuis son enfance, quand il est devenu aveugle.

Il se donne à lui-même le nom de Daredevil (le casse-cou) et il prend très au sérieux la conscience catholique de sa propre culpabilité. Mais il apporte cette culpabilité et cette inquiétude à l’Église, dans des conversations avec un prêtre – dans et hors le sacrement de réconciliation. Un article sur le site de Slate (un site loin d’être connu pour son théisme) fait le point aussi clairement que possible : « le plus grand super-pouvoir de Daredevil est son catholicisme. »

J’ai déjà dit que Murdock ne possède pas de pouvoirs supra-normaux, mais c’est vrai également de Wayne et de Banner. Wayne le millionnaire (comme Tony Stark, alias Ironman) peut s’offrir des gadgets vraiment géniaux pour se rendre presque invulnérable, le mieux qu’il puisse faire pour compenser le traumatisme de son enfance, avoir été témoin du meurtre de ses parents. Banner, maltraité dans son enfance, voit sa rage multipliée exponentiellement après avoir été mis en contact avec « une bombe gamma » tout comme Peter Parker est devenu le guerrier à la toile d’araignée après une morsure d’araignée. Pour Matt Murdock, c’est un accident de voiture durant son enfance qui l’a privé de ses yeux mais qui a développé ses autres sens, lui donnant une sorte de seconde vue.

Comme les rédacteurs de Imagine Games Network le soulignent : « Plusieurs des meilleures histoires de super-héros dans ce milieu font appel à l’homme sans peur. Il y a quelque chose de plus profondément intéressant dans un homme dont la culpabilité catholique le force à revêtir un costume rouge et à se hasarder dans les rues chaque nuit pour affronter des ninjas et des psychopathes. »

Daredevil a été créé en 1964 par le légendaire auteur de BD Stan Lee et illustré par Bill Everett. Lee, un gamin juif du Bronx (sans ironie : 92 ans à ce jour, Lee a repris Timely Comics – qui allait devenir Marvel – comme rédacteur-en-chef à l’âge de19 ans) a été longtemps connu comme le créateur de super-héros «  qui pouvaient avoir sale caractère, des accès de mélancolie ou de vanité, ils se chamaillaient entre eux, s’inquiétaient de savoir payer leurs impôts et de faire bonne impression sur leurs petites amies, s’ennuyaient ou même tombaient parfois malades. »

Franck Miller, dont l’œuvre BD et cinématographique inclut la série « revue et corrigée » des aventures du (très catholique) Batman intitulée Dark Knight, mais aussi Ronin, The Spirit, Sin City et 300, est un garçon catholique irlandais du Maryland et du Vermont qui a repris Daredevil dans les années 80 et lui a donné une identité plus centrée sur la théologie – et plus sombre.

La plus récente version de la saga Matt Murdock/ Daredevil est maintenant disponible sur Netflix. Charlie Cox (There Be Dragons), un excellent acteur anglais, joue Murdock comme un homme tellement déterminé à combattre l’injustice qu’il en devient presque suicidaire – bien dans l’esprit du Daredevil de Miller. Du moins c’est de cette façon que Drew Goddard, le créateur de la série et une kyrielle de scénaristes et réalisateurs l’ont représenté tout au long des 13 épisodes.

Monsieur Cox est un peu léger quant aux muscles qu’il accorde au personnage de dessin animé, mais c’était vrai aussi – et en costume – de Bruce Lee quand il jouait Kato dans la série-télé des années 60 The Green Hornet. Mais Lee – dont le karaté personnel forme les bases de pas mal des batailles vues dans la nouvelle série-télé de Daredevil – enseignait que sa puissance était en relation directe avec sa vitesse et sa précision. Et cela fait du longiligne Charlie Cox un Daredevil crédible. (Ben Affleck a joué le rôle dans un film de 2004 dont on a suffisamment parlé.) Nous verrons si le personnage est plus étoffé pour la saison 2 (en 2016).

C’est une expérience télévisuelle qui en vaut la peine, mais ne vous imaginez quand même pas y trouver de grandes leçons de catholicisme. Daredevil ne connaît qu’un sacrement : celui de réconciliation. Cependant, la confession est bonne pour l’âme et j’ai beaucoup apprécié les conversations de Murdock avec le prêtre de sa paroisse. Un échange typique :

Matt Murdock : Père, croyez-vous au Diable ?
Le père Lantom : Vous voulez dire… comme concept ?
Murdock : Non. Croyez-vous qu’il existe ? Dans ce monde, parmi nous.
Lantom : Vous voulez une réponse courte ou détaillée ?
Murdock : Rien que la vérité.
Lantom raconte le temps qu’il a passé comme missionnaire au Rwanda, en concluant : « J’ai vu le Diable. Oh que oui, Matt… Je crois qu’il marche parmi nous… prenant diverses formes. »

La série ménage de jolis rôles à Vincent D’Onofrio, Deborah AnnWoll et Eldon Hensen. Daredevil est classé « interdit aux mineurs » pour violences et quelques scènes sexuellement explicites entre personnes non mariées.

Brad Miner est rédacteur-en-chef de The Catholic Thing, membre de l’institut Foi & Raison et membre du conseil d’administration de l’Aide à l’Église en Détresse aux USA. C’est un ancien critique littéraire de National Review.

Illustration : Matt Murdock (Charlie Cox) en compagnie du père Lantom (Peter McRobbie).

Source :http://www.thecatholicthing.org/2015/05/18/daredevil-and-the-devil/