Propos sur le modernisme politique - France Catholique
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Propos sur le modernisme politique

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Les mots que nous utilisons ont souvent plusieurs significations. Il peut arriver qu’un lecteur ou un auditeur comprenne un sens d’un mot alors que l’orateur ou l’écrivain voulait en signifier un autre. En fait certains orateurs et écrivains usent volontairement de cette confusion pour atteindre leur but. Le mot égalité, par exemple, peut signifier que chaque personne à la même situation devant la loi, mais il ne peut pas signifier que chaque individu à la même intelligence, les même qualités ou la même influence.

Nous entendons souvent dire que tous les peuples devraient vivre essentiellement sous la même « forme » de gouvernement. Ce qui est fallacieux avec ce mot est que nous avons différents gouvernements. Aussi nos politiques étrangères et intérieures devraient s’efforcer d’appliquer à tout le monde le même modèle de règles. Cette thèse implique que quelque chose ne va pas dans les modèles de règles qui ne se conforment pas à ce « modèle » maintenant universellement reconnu comme étant la meilleure forme de gouvernement.

Dans cette perspective, les gouvernements ne devraient pas vraiment trop différer les uns des autres. Chacun a les mêmes « droits ». Tous devraient vivre dans une « démocratie », avec un ensemble de « lois », une économie libérale, et un gouvernement dont le but est de garantir cela.

Derrière ces institutions il y a les idées qui les définissent et qui les soutiennent. Les principales notions sont celles d’ « égalité » et de « choix ». Chacun a le « droit » de faire de lui-même ce qu’il veut être. Il n’existe aucune loi, naturelle ou divine, et l’homme est libre de se définir lui-même. Aucune définition de l’homme n’est fausse, sauf celle qui maintient que la loi naturelle et divine existe.

Cette dernière vision est « intolérante ». Elle affirme qu’une « vérité » définit ce que l’homme est, et qu’ainsi le but de l’homme est de trouver et de vivre ces lois d’être humain. Dans cet exercice, l’objectif de l’homme n’est pas de devenir vertueux mais d’exercer ses droits. Maintenir que la vérité « existe » est une forme de « fanatisme ». Le gouvernement existe pour supprimer les « fanatiques » et punir les « langages de haine ». C’est ce que « liberté de religion et d’expression » signifie aujourd’hui.

Le monde moderne est régi par des « valeurs », et non par des « devoirs ». Les « valeurs » sont en principe subjectives. Comme aucune loi naturelle n’existe, aucune « valeur » définie n’existe. Les « valeurs » sont ce que nous choisissons, et non pas ce que nous connaissons. Ainsi nous ne pouvons jamais nous mettre d’accord sur nos « valeurs ».

De même, nos « droits » sont ce qui nous est dû. Comme nous sommes « libres » de « choisir » ce que nous signifions par « droits », le gouvernement que nous avons établi démocratiquement est obligé de nous donner ce qui nous est « dû », donc nos « droits » tels que nous les définissons.

Nous sommes donc obliges de « tolérer » les « droits » des autres. Est ce qu’il est jamais « bien » de « mal » agir ? Ceci est une proposition qui n’a pas de sens. « Bien » et « mal » n’ont pas de réalité objective. Mais sûrement tuer est mal ? Pas si cela interfère avec mon « droit » de choisir. Nous pouvons décider démocratiquement qu’un tel « droit » devienne un « article de loi ».

Le libre « marché » des marchandises est parallèle au libre « marché » des personnes. Aucune frontière politique n’a le droit de limiter l’extension de ces « droits » et de ces « valeurs ». La politique internationale est faite pour permettre à chacun de « bénéficier » de ces « droits ». Personnes ne devrait être empêché de vivre où il le désire. Chacun a le « doit » de voter dans n’importe quelle élection, car chacun est « égal ». Nous devrions avoir un seul gouvernement avec une juridiction universelle et une police universelle et des contingents militaires pour faire respecter nos « droits » contre des fanatiques.

En conséquence, il ne devrait y avoir aucune institution entre l’État et les individus. La famille et les institutions de ce qui est appelé la « société civile » doivent être remplacées par des règles de gouvernement basées sur les « droits » et « valeurs » de manière démocratique. La démocratie signifie la règle de la majorité. La moralité signifie la volonté de la majorité. Pour le temps présent, beaucoup doivent être forcés d’être libres alors que des fragments de préjugés religieux et civils sont encore répandus.

Le gouvernement est responsable du bien de la Terre et de tous les « citoyens ». Un citoyen est celui qui dirige et qui est dirigé par l’État « démocratique » dans la recherche des « droits » et « valeurs » universels. Comme le bien de la Terre rend possible le bien des hommes, le gouvernement décide ce qui est possible pour l’homme par son estimation de ce que la Terre peut supporter. Le bien de la Terre ainsi estimé, détermine le bien de l’homme et de quels « droits » il peut bénéficier.

Les termes du modernisme politique impliquent un état mondial refermé sur lui-même. L’homme devient « adulte ». Rien n’existe en ce monde, sauf ce que l’homme y a mis. Il est enfin libre avec rien sauf lui-même décidant ce qu’il est.

Nous pourrions avoir seulement une hésitation concernant cette construction ultime de l’homme. Lorsque nous le détaillons ainsi, elle ressemble à rien de plus à ce que nous pourrions appeler, en termes aristotéliciens, une « tyrannie démocratique » librement choisie.


James v. Schall, s.j., qui a servi comme professeur à l’Université de Georgetown pendant trente-cinq ans, est un des plus prolifique écrivain catholique en Amérique. Ses livres les plus récents sont The Mind That Is Catholic et The Modern Age.

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Source :

http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/the-words-of-political-modernity.html

La Croix du Nivolet derrière une statue de Jean-Jacques Rousseau près de Chambéry.