Chine (3) - France Catholique
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Chine (3)

Les chrétiens chinois : des racines bien ancrées
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Par Mario Bard, AED

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La religion et le gouvernement chinois : une situation de contrôle qui ne date pas d’hier. Mais ce qui semble nouveau aujourd’hui dans l’histoire de ce pays, c’est la popularité pour le christianisme. Pourtant, les chrétiens sont présents en Chine depuis presque 1 500 ans! Alors, qu’est-ce qui attire aujourd’hui les Chinois vers cette « religion étrangère », le nom qui a souvent été donné au christianisme en Chine? Quelle est la situation des chrétiens de Chine en 2008? Nos deux prochaines incursions dans l’Empire du milieu nous permettront de mieux y comprendre la chrétienté, et le monde catholique en particulier.


Une présence chrétienne plus que millénaire

Le monde chinois a connu une première incursion importante des chrétiens sur son territoire, dès le 8e siècle. Par-contre, certains spécialistes affirment qu’ils étaient présents dès le 6e siècle, en 520, sous la dynastie des Tang. Les premiers chrétiens chinois étaient essentiellement des nestoriens, ces chrétiens qui mettaient l’accent sur la nature humaine du Christ. C’est l’évêque Nestorius de Constantinople qui est l’instigateur de cette doctrine qui, par conséquent, ne voit pas en Marie la mère de Dieu. Ce qui fera la perte de Nestorius qui sera emprisonné. Ses thèses seront condamnées et rejetées.
Pourtant, des chrétiens vont continuer à adhérer à cette doctrine. Par contre, ils le feront dans les territoires plus à l’est, en dehors de l’Empire byzantin. Ils iront jusqu’en Chine où ils remportent un succès certain jusqu’au 9e siècle, date des premières persécutions contre ce qui est appelé « les religions étrangères ». Cela n’empêchera pas la foi chrétienne de se propager dans plusieurs pays et régions limitrophes de la Chine, traversés par la route de la soie. Même le très bouddhiste Tibet connaîtra son temps de chrétienté avec, à compter du 8e siècle, la présence d’un métropolite et de plusieurs évêques sous son autorité. De même au nord, en Mandchourie et en Mongolie orientale, les chrétiens sont bien implantés, avec une présence confirmée du 10e au 13e siècle. D’ailleurs, le prince chrétien Nayan composera une armée presque exclusivement chrétienne et fera broder la croix sur ses étendards.
Encore un autre exemple de la présence importante des chrétiens? Au XIIe siècle, il y a en Chine deux archevêchés (à Xi’an et à Beijing), qui dépendent du patriarche de Bagdad. Sous la dynastie mongole des Yuan (1206 à 1367), les prêtres seront même exemptés d’impôts et vont bénéficier de distributions de grains faites par ordre de l’empereur. La mère du très célèbre empereur Kubilaï Khan était une nestorienne… Bref, les exemples historiques et même archéologiques ne manquent pas pour confirmer que la présence des chrétiens en Chine est loin d’être récente. Une présence presque constante malgré les persécutions répétées. Les nestoriens disparaîtront d’ailleurs totalement de Chine à la fin de la dynastie des Yuan (14e siècle). Pourtant, la nouvelle dynastie des Ming (qui règne jusqu’en 1644), ouvre de nouveau sa porte aux chrétiens, particulièrement aux Jésuites. Celle qui suit, la Qing, continue cet esprit d’ouverture… et de fermeture, les périodes de persécutions succédant aux périodes de tolérance du culte chrétien, et vice-versa!

À partir des Qing, quoique subissant sporadiquement des persécutions, les chrétiens de Chine ne vivront pas de période de grande noirceur, mise à part la période des Boxers (début du 20e siècle). Ils vont même jouir d’un grand respect et d’une autorité morale certaine. C’est avec la Chine communiste de Mao (1949 à 1976) que les chrétiens subissent de nouveau des heures très sombres : fermetures d’églises, emprisonnements, travaux forcés, tortures et mises à mort. Encore aujourd’hui, la foi chrétienne reste source de persécutions pour certains chrétiens. Comme nous l’avons vu dans l’article précédent (Chine : éveil spirituel), les Jeux Olympiques (JO) n’ont pas nécessairement apporté la liberté que les groupes des droits de la personne espéraient. « Généralement, les observateurs, comme les organisations pour les droits humains, ont déploré un resserrement sur les potentielles dissensions autour des jeux olympiques », selon ce que rapporte une source anonyme proche de l’Église chinoise. « Les autorités ont fortement encadré, cette année, le pèlerinage traditionnel du mois de mai au Sanctuaire de Notre-Dame du perpétuel secours à Seshan, près de Shanghai ». D’ailleurs, l’une des raisons pour lesquelles les autorités voulaient limiter l’accès au sanctuaire « pourrait être que les autorités ont essayé d’éviter les grands rassemblements religieux avant les Olympiques et spécialement après les émeutes au Tibet », indique notre source.

Il est clair pour cette personne que le gouvernement essaie d’écarter, à l’occasion des JO, tout fauteur de trouble, c’est-à-dire tous ceux qui sont « susceptibles de troubler “l’harmonie publique et sociale” de la Chine, image voulue et véhiculée par les autorités chinoises. » Du côté protestant, des pasteurs ont été assignés à résidence juste avant le début des JO. « Pour les chrétiens, la situation est devenue, à des degrés variables, plus tendue, affirme toujours notre source. Toutes les communautés chrétiennes, y compris les catholiques, sont plus surveillées que d’habitude.

Les JO et la liberté religieuse : un espoir?

Comme nous avons pu l’observer une dizaine de jours avant le début des JO, les journalistes étrangers n’ont pu profiter de toutes les règles d’assouplissements annoncées précédemment par le gouvernement. Ainsi, plusieurs sites web, dont ceux de Human Rights Watch ou encore Amnistie Internationale ne pouvaient être accessibles de la salle de presse olympique.
Peut-on espérer que l’événement international aura un impact sur la liberté religieuse? Selon notre source, il y a l’espoir « que les JO auront un effet positif sur la liberté religieuse en République populaire de Chine. » En effet, « durant les jeux, des centaines de milliers de visiteurs et de journalistes convergent dans le pays. Parmi eux, il y a un nombre considérable de chrétiens pratiquants. Tous ces groupes apportent leurs idées et des attitudes qui ne peuvent être ignorées. » Ce petit nombre de croyants est sûrement influent par son témoignage de croyants qui vivent leur religion avec un grand sens de la responsabilité, et ce, en toute liberté.

Par ailleurs, la nouvelle économie et son expansion pourraient jouer un rôle déterminant pour la liberté religieuse. « L’histoire nous montre que plus les gens s’enrichissent et plus ils demandent une plus grande participation à leur société, ainsi que plus de liberté individuelle, affirme encore notre source. « Nous espérons qu’avec toutes les caractéristiques de la culture, de l’histoire et de la mentalité chinoise, quelque chose de semblable va advenir en Chine. » Les Chinois voyagent de plus en plus par affaire, ayant développé une économie basée sur l’exportation. « Ce qui fait que les gens d’affaires sont de plus en plus en contact avec les autres sociétés, cultures, systèmes politiques, idées et concepts. » Même chose pour les citoyens qui ont de plus en plus l’intention de voyager et d’envoyer leurs enfants faire des études à l’étranger. « Il y a de bonnes chances pour qu’ils découvrent, dans d’autres sociétés, des choses qui leur plaisent, comme la foi et la liberté religieuse. » Par contre, notre source estime qu’ils n’aimeront sûrement pas dans nos sociétés « l’individualisme exagéré et le non respect de la famille ». Deux aspects sensibles dans la société chinoise : la communauté et la famille sont des valeurs essentielles et très anciennes. « Tous ces contacts vont apporter, on l’espère, de nouvelles façons de penser; non pas une copie de la pensée occidentale mais une évolution et un renforcement des propres valeurs et traditions chinoises».

L’éveil spirituel actuel de la Chine est lié à l’histoire récente. Bien sûr, depuis plus de 4 500 ans, le peuple chinois n’a jamais eu peur d’intégrer la religion et la spiritualité dans son quotidien. Ce qui est nouveau, c’est l’attrait que représente la « religion étrangère » qu’est le christianisme. Pourquoi? La semaine prochaine, nous nous attarderons sur les raisons qui mènent les Chinois vers le christianisme. Nous verrons également comment les catholiques chinois réagissent à la lettre de Benoît XVI, plus d’un an après sa parution. Soyez avec nous, la semaine prochaine, pour notre dernier voyage dans l’Empire du milieu!

Syntoniser également Radio Ville-Marie lundi le 25 août, dès 12h30. Notre dernière émission sera un témoignage de Monsieur Guillaume Lesage, catholique et cadre d’une multinationale française dont le siège asiatique est situé à Shanghai. Il nous parlera de Jean, un homme de 81 ans qui travaille auprès de ceux que le développement économique a laissé pour compte dans cette mégapole de près de 20 millions d’habitants.

Radio Ville-Marie (www.radiovm.com), tous les lundis du mois d’août, 12h30, afin d’en savoir plus sur l’Empire du milieu! À Montréal, 91,3fm, à Sherbrooke, 100,3fm, à Trois-Rivières, 89,9fm et à Victoriaville, 89,3fm.

© AED
Église à Wanzhou (Centre-Est de la Chine)