3042-Avortement : de plus en plus jeunes ? - France Catholique
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La chasteté : apprendre à aimer
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3042-Avortement : de plus en plus jeunes ?

Tandis qu'en France, malgré les campagnes de "prévention", l'avortement des mineures est en hausse, en Amérique Latine, le débat se concentre sur des grossesses encore plus précoces.
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La révélation par le ministère de la Santé des chiffres de l’avortement dans l’hexagone en 2004 a jeté un froid : augmentation des IVG qui dépassent les 210 000, recrudescence chez les plus jeunes. Sur 100 Françaises de 15 à 17 ans, une avorte dans l’année. La hausse s’accélère : elle a été de 3,6 % en 2004, alors que les avortements augmentaient en moyenne de 1,8 % depuis 1975. Des données qui peuvent surprendre quand on découvre que la pilule du lendemain, censée « répondre aux situations exceptionnelles », s’est diffusée l’an dernier en un million d’exemplaires. La France connaît un taux record d’usage de la contraception, l’explosion de la pilule du lendemain (qui est partiellement antinidatoire) et une augmentation forte des avortements.

Cette situation, que certains jugent paradoxale, manifeste un cuisant échec de la prévention. Ceux qui prédisaient : « l’IVG deviendra marginale lorsque la contraception aura fait ses preuves », loin de s’excuser, ont changé de discours. Ils estiment désormais que l’avortement « fait partie de la vie des femmes » et qu’on ne doit pas le dramatiser. Quand au Norlevo, Nathalie Bajos, socio-démographe faisant autorité dans ce domaine, va jusqu’à considérer qu’il faut davantage le distribuer. Or, un tiers des 15 – 24 ans a déjà fait usage de ce produit.

La révolution contraceptive a profondément bouleversé les modes de vie, sans qu’on reconnaisse la violence sous-jacente à cette évolution. On croit pouvoir se réjouir du taux croissant de recours à l’avortement en cas de grossesse « non désirée ». Mais ce concept de « désir » mérite une analyse. N’est-il pas devenu normatif ? Les associations qui accompagnent les femmes témoignent de son caractère mouvant, en fonction de l’environnement dans lequel se situent les grossesses, et de l’influence déterminante des avis extérieurs : compagnons, employeurs… et « féministes ». C’est ce que laisse d’ailleurs entendre Nathalie Bajos en évoquant l’évolution des « normes sociales sur les conditions d’une bonne maternité » (Libération, 30 septembre). Une façon de reconnaître qu’une forme d’injonction à ne-pas-donner-naissance-à-un-enfant-non-programmé tend à s’imposer aux Françaises.

Certaines commencent tout de même à s’étonner des conseils que leur prodiguent ceux qui entendent les libérer, à l’image d’une jeune mère témoignant sur Europe n°1, le 18 septembre, de sa visite au Planning Familial lorsqu’elle était étudiante et enceinte : « On m’a dit ‘Non, c’est hors de question, il faut avorter, vous avez vos études à faire !’ » Et l’animateur de s’étonner : « Il y a de l’idéologie de ce côté-là aussi ? » Là où l’avortement légal est entré dans les mentalités, les langues se délient donc, un peu.
Dans d’autres pays, le débat fait rage. C’est le cas aujourd’hui en Amérique Latine où la situation des plus jeunes est au cœur des controverses. D’une part, c’est au travers de ces cas-limite que les promoteurs de l’avortement légal ont le plus de chance d’émouvoir, d’autre part les grossesses très précoces y sont devenues un phénomène de société. Au Pérou, les adolescentes présenteraient un taux de grossesse annuel de 13% ; au Brésil 45% des femmes auraient leur premier enfant entre 16 et 18 ans et 14% entre… 10 et 12 ans ! La tentation des politiques de réguler de telles évolutions- aux répercussions sociales désastreuses – par le recours massif à l’avortement est grande. Mais mesure-t-on son impact individuel sur celle qui le subit ? Et qui pourrait se satisfaire d’une société dont les trois quarts des mineures auraient avorté ?

Quant au développement de la contraception, proposé par certains comme seul mode de prévention de l’avortement, il reviendrait, en l’espèce, à abandonner nombre de très jeunes filles à la fatalité de la violence sexuelle. Il peut paraître moins coûteux et plus rapide d’en endiguer les conséquences, mais ce serait baisser les bras devant le dénuement affectif, le manque d’éducation et la pauvreté. C’est le discours – souvent incompris – que tente de tenir aujourd’hui l’Eglise, notamment au Chili, en Colombie et en Argentine.

Tugdual DERVILLE