2876-La déstabilisation du monde - France Catholique
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2876-La déstabilisation du monde

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Notre pape Jean-Paul II aura tout fait pour éviter cette guerre en Irak. Il est évidemment dans son rôle de témoin de l’Evangile et de héraut des Béatitudes de tout faire pour éviter le fléau d’un conflit sanglant. Mais le rôle prophétique du successeur de Pierre n’a jamais été indemne d’une profonde connaissance des données géostratégiques et des rapports de forces internationaux. S’il y a une diplomatie vaticane – dont certains contestent d’ailleurs jusqu’au principe -, c’est que le “génie du catholicisme” suppose que l’on serve les hommes à partir des réalités concrètes de la politique. La morale elle-même suppose l’intégration de jugements de réalité si l’on veut que ses principes normatifs ne se désagrègent pas dans le vide. On ne saurait oublier, dans ce contexte, que le statut du Vatican donne au Saint-Siège une vision mondiale des problèmes et une appréciation motivée des défis entre peuples et civilisations. C’est pourquoi il y a lieu de prêter attention à la parole du Pape, lorsque celui-ci déclare : “Cette guerre est une menace pour le sort de l’humanité”.

Le cardinal Etchegaray avait dit la même chose en prédisant que l’ébranlement du sol irakien se répercuterait très loin, et notamment jusqu’au bout du monde islamique. Mais l’évolution actuelle du conflit impose des interrogations sur les Etats-Unis eux-mêmes. Leurs dirigeants ont voulu se lancer dans une aventure, en refusant tous les avertissements, notamment ceux du Saint-Siège et de la France. Ils s’aperçoivent aujourd’hui que la guerre-éclair qu’ils avaient imaginée est impossible et que, même dans l’hypothèse de la prise de Bagdad et de la chute du régime de Saddam Hussein, ils ne seraient au bout de leurs efforts, la guérilla prenant de plus en plus le relais de la guerre “classique”. Désormais l’hypothèse d’un échec américain est envisageable, et le doute commence à se manifester dans les médias d’outre-atlantique, jusqu’alors dociles aux consignes de leur gouvernement et du Pentagone.

Nous ne sommes pas de ceux qui se réjouiraient d’une déstabilisation des Etats-Unis. Eu égard au rôle joué par ceux-ci dans le monde, eu égard à leurs responsabilités dans les divers équilibres, une défaite, qu’elle soit militaire, politique ou simplement diplomatique, aurait des effets incalculables. On peut regretter que les Américains disposent à eux seuls de cette hyperpuissance dénoncée naguère par Hubert Védrine. Mais faute de solution alternative dans un proche avenir, il est permis de craindre, en cas de mise en échec, un accroissement du désordre international d’une amplitude indéfinissable.
C’est pourquoi il importe dès à présent d’envisager une sortie du conflit, par une conférence sur la paix, qui arrêterait les effets désintégrateurs de la guerre sur l’ensemble de la région et permettrait de reconstruire un ordre international. En commençant par le commencement, c’est-à-dire la remise en marche de l’organisation des Nations-Unies pour un arbitrage des crises et la possibilité d’un dialogue entre Etats.

Gérard LECLERC