01 - § 04 - Le groupe de prière des Gitans - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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01 – § 04 – Le groupe de prière des Gitans

Des Menhir à Internet - Chapitre 1

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Elisabeth Régnier qui, avec son mari participait à la Communauté Emmanuel, avait une sœur Franciscaine Missionnaire de Marie. Cette religieuse nous contacta un jour. Elle travaillait à l’aumônerie des Gitans de la région parisienne. Or il y avait parmi eux un garçon nommé Pieranglo, Manouche 1, qui ne savait pas s’il avait été baptisé. Son père, pentecôtiste de l’Eglise gitane, était mort. Pieranglo en relations avec l’aumônerie catholique hésitait entre se faire baptiser chez les catholiques par le Rachaïl (le prêtre) ou chez les pentecôtistes. Il participa à un voyage en Israël avec le Rachaïl, et le dernier jour avant de partir il retourna au Saint-Sépulcre : là, en touchant le tombeau du Christ, il décida de se faire baptiser catholique. Mais à son retour en France il dit à la sœur : « Je veux me faire baptiser catholique mais un beau jour je finirai par aller avec les pentecôtistes parce que les catholiques, eux, ne prient pas. » Il y avait en effet des réunions de prière pentecôtistes régulières dans son milieu. « Comment ça ? lui dit la Soeur. Je vais t’amener dans un lieu où tu verras des catholiques prier. » Elle l’a amené un soir à Saint-Sulpice au groupe de prière de l’Emmanuel où il y avait quatre cents personnes. Pieranglo était très content.

Cependant, quelques semaines plus tard, il dit à la soeur : « C’est bien la prière à Saint-Sulpice, mais ce n’est qu’une fois par semaine. » Pierre Goursat l’a mis alors en rapport avec Bernadette Jomard et Cécile Hoppenot2, lesquelles organisèrent un groupe de prière chez les Manouches de la région d’Argenteuil un soir par semaine. Je participai à ce groupe. Pieranglo, « encore catéchumène» comme saint Martin, était animé par l’Esprit Saint. En effet, tout l’hiver cette année-là chez les Manouches d’Argenteuil, la question la plus importante fut de savoir si l’on priait mieux chez les pentecôtistes ou chez les catholiques. Des Manouches pentecôtistes participaient régulièrement au groupe catholique et argumentaient. Il n’était pas difficile de leur montrer que nous lisions la Bible comme eux, que nous chantions en langues3 comme eux et que nous avions des prophéties.

Cependant ils étaient particulièrement difficiles sur la question de la Vierge Marie. Je fus témoin un jour d’un dialogue entre eux et Pieranglo. « Marie a eu plusieurs enfants, c’est dit dans l’Evangile que Jésus avait des frères », disaient les pentecôtistes. « Dans nos familles manouches, répondit Pieranglo, si un fils va mourir et qu’il a plusieurs frères, va-t-il confier sa mère à quelqu’un qui n’est pas de la famille ? Vous voyez bien que Jésus sur la Croix a confié sa mère à l’apôtre Jean. Donc il n’avait pas de frères de sang. »

J’étais fort frappé4 que le catéchumène Pieranglo fasse une réponse si juste aux gens de son peuple et de sa culture. J’ai utilisé depuis cette histoire dans des dialogues avec des protestants. J’ai compris aussi que l’Esprit Saint nous assiste vraiment pour répondre aux questions des gens que nous rencontrons au nom de Jésus. On expérimente la force de cette parole de Jésus : « Ne vous préoccupez pas de ce que vous aurez à dire … » Pieranglo fut baptisé par immersion en plein hiver dans la région de Pontoise, avec une large assistance de Manouches tant catholiques que pentecôtistes.

A cette époque j’ai éprouvé de façon spectaculaire cette aide de l’Esprit Saint, un jour où je faisais le pèlerinage de Chartres. Une amie jeune avocat, charismatique, m’avait persuadé d’y participer avec les étudiants, bien que je fusse un peu plus âgé. Au cours de la marche l’un d’entre eux m’a présenté une difficulté sur la foi. Je priai l’Esprit Saint et je vis quelle réponse lui faire. Tout heureux je remerciais intérieurement l’Esprit Saint de m’avoir aidé, quand il a posé une seconde question. En tout il en a posé dix et à chaque fois l’Esprit Saint me montra comment lui répondre. Plusieurs fois, au début de la question, je me disais : « Cette fois je vais caler », et lorsqu’il finissait l’exposé de sa problématique, je voyais dans ses mots même se dégager la réponse positive. J’ai gardé, on s’en doute, une forte impression de cette expérience. Aussi je recommande vivement, lorsqu’on se trouve en présence de quelqu’un qui vous évoque ses problèmes et ses difficultés, de prêter attention à la problématique. Car celui qui pose la question a plus ou moins consciemment en vue la réponse juste, en tout cas il est en attente de cette réponse. Et cela se manifeste d’une certaine façon dans la manière dont il exprime la difficulté.

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  1. Les Manouches comme les Tsiganes, les Roms et les Gitans appartiennent au peuple des nomades venus il y a des siècles de l’Inde. Ils ont leur propre langue, le manouche. Ils sont nombreux en France, les familles sont souvent présentes à la fois en France, en Allemagne ou en Italie.
  2. Elle a épousé André Morel, médecin à Nantes.
  3. Chez les charismatiques, comme chez les premiers chrétiens de Corinthe, on « parle en langues », on « chante en langues » comme à la Pentecôte. Il s’agit de prières non conceptuelles la plupart du temps, à travers lesquelles on loue ou intercède. Lorsque toute une assemblée chante en langues on peut assister à une harmonie magnifique. Saint Paul, en donnant une hiérarchie des «charismes », ou dons spirituels, en propose le mode d’emploi et le discernement. Voir : Qu’est ce que le Renouveau charismatique ? D’où vient-il ? Où va-t-il ?, Bernard Peyrous et Hervé Marie Catta, Mame, Paris, 1999.
  4. « Fort frappé », cette expression de nos amis belges donne tout son sens ici.