Trésor au sous-sol - France Catholique
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L'incroyable histoire des chrétiens du Japon
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Trésor au sous-sol

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J’ai écrit récemment qu’un jeune homme pourrait patienter dix ans de messe dominicale dans pratiquement n’importe quelle église des États-Unis, et à la seule exception de For All the Saints (Pour tous les saints) le jour de Toussaint, ne jamais chanter même une seule fois un hymne viril nous exhortant à prendre nos armes spirituelles et à lutter pour le Christ.

Cela ne souffre aucune discussion. Que vous utilisiez Gather, Glory and Praise, Whorship III ou IV (note : des recueils de chants religieux) ou tout autre ouvrage en provenance de l’OCP ou du GIA, vous n’avez pas pu chanter un de ces hymnes. Ils ont été expurgés.

Pour permettre à mes lecteurs de se rendre compte des trésors que l’on a enterrés au sous-sol, je propose O Valiant Hearts (O cœurs vaillants). C’est un hymne excellent, qui convient pour un dimanche proche du jour des vétérans ou du Memorial Day, ou pour les funérailles d’un soldat :

O cœurs vaillants qui avez rejoint la gloire,

A travers la poussière des conflits et le brasier des batailles,

Vous reposez en paix, vos vertus chevaleresques prouvées,

Votre mémoire honorée dans le pays que vous avez aimé.

.

Vous vous êtes rassemblés fièrement, rang par rang, pour faire la guerre,

Comme vous avez entendu de loin le message de Dieu ;

Tout ce que vous espériez, tout ce que vous aviez, vous l’avez donné

Pour sauver l’humanité – vous vous êtes oublié pour cela, sauver.

.

Vous avez disparu, splendides, ayant fait le grand abandon

Dans la lumière qui ne s’éteindra jamais

Grande est votre satisfaction dans cette demeure bénie

Où vous attendez la claire sonnerie de trompette de l’appel de Dieu.

.

Il y a bien longtemps, comme la terre était sombre et silencieuse

Un cri retentissant a jailli d’une colline isolée

Tandis que dans la fragilité de notre glaise humaine

Le Christ notre Rédempteur trépassait de façon semblable.

.

Sa croix se dresse toujours depuis cette heure terrible

Comme une étoile brillante au-dessus de l’abîme ténébreux ;

Toujours, à travers un voile, les yeux compatissants du vainqueur

Se penchent pour bénir nos pitoyables calvaires.

.

Ils étaient ses serviteurs, ils suivaient ses pas,

Suivant à travers la mort le Fils de Dieu martyrisé :

Il est ressuscité, vainqueur ; ressusciteront également

Ceux qui ont bu sa coupe de sacrifice.

.

O Seigneur ressuscité, ô berger de notre mort,

Ta croix les a conduit, ta houlette les a guidés,

Plein d’espoir glorieux, leur pays, fier et attristé

Confie ses enfants à ta main magnanime.

John Arkwright a écrit ces mots en 1919, juste après la terrible Première Guerre Mondiale. Nous n’avons pas besoin d’applaudir la part prise par l’Angleterre dans cette guerre pour chérir la valeur quand nous la rencontrons. Les hommes qui se sont battus «  se sont oubliés eux-mêmes pour sauver » dit le poète, et quels qu’aient pu être les sentiments changeants de chacun au cœur de la bataille, pour les soldats chrétiens, c’est exactement cela.

Ils ont entendu l’appel du devoir et l’amour de leur pays, et ils ont répondu à cet appel. Maintenant ils attendent le verdict du jugement dernier, quand les nations de la terre ne seront plus. Ce sera pour eux le grand réveil final, le rassemblement des corps sortis de la tombe, et rang par rang ils rejoindront les armées célestes.

Maintenant, j’ai peur qu’une partie de mes lecteurs ne fasse une poussée d’urticaire. Honte sur nous. Le langage de la guerre spirituelle se trouve partout dans les deux Testaments, l’Ancien et le Nouveau. Jésus Lui-même l’a dit : «  je ne suis pas venu apporter la paix mais l’épée », et il est le Prince de la Paix.

Le poète comprend que le soldat chrétien suit le capitaine qui l’a précédé. Il y a bien longtemps, dans cette redoute exposée de Palestine, un cri a résonné au dessus du calme de la terre sans vie. C’est le cri de bataille de Jésus, le cri de l’obéissance ultime et de la dernière goutte de sang versé pour ses Ennemis. « Père, entre tes mains le remets mon esprit » a-t-Il dit, et il a rendu son dernier soupir avec un gémissement.

Le cri résonne toujours, parce que la croix est toujours dressée. Dans la sombre confusion de nos guerres, la croix luit « comme une brillante étoile ». Est-ce l’étoile qui a conduit les mages vers l’enfant de Bethléem ? Ou est-ce l’étoile polaire, dont la lumière nous permet de savoir où nous sommes et où nous devons aller ?

Est-ce la seule lumière capable de percer le manteau de la nuit ? Peut-être. Derrière ce voile et le pénétrant, brille le regard compatissant du Seigneur. Tout comme le Père regardait Son Fils bien-aimé sur la croix, le Fils regarde ses bien-aimés alors qu’ils meurent sur leurs « pitoyables calvaires » -une image inoubliable.

Jésus marche devant eux et ils suivent Ses pas. Jésus a été tué parce que témoin de la vérité ; ils Le suivent dans ce témoignage, à travers le no-man’s-land de la mort. Jésus est ressuscité victorieux, sur Lui la mort n’aura plus de prise. Ceux qui ont bu Sa coupe jusqu’à la lie ressusciteront victorieux avec Lui.

« Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, » dit le psalmiste, « je ne crains aucun mal car Tu es avec moi ; ton bâton, ta houlette me rassurent. » Ici le bâton protecteur est le bois de la croix, et le Berger est également un guerrier.

Nous sommes assiégés de toutes parts par le monde, la chair et le démon, qui rôde dans le monde comme un lion rugissant, cherchant qui dévorer. Pourquoi croyons-nous que le Berger porte un bâton, si ce n’est pour briser l’échine des bêtes féroces, pour assommer les démons maléfiques ?

Mais ici, les soldats aussi marchent à travers la sombre vallée. Ils ne sont pas seulement les protégés. Ils sont à leur tour des protecteurs. Nous sommes environnés d’un nuage de héros.

Si un tel hymne nous semble inadapté pour la messe, cela montre simplement à quel point nous avons évacué la force de l’expression de notre foi. Plus d’un soldat du Christ gît dans une tombe inconnue. Il ne devrait pas en être de même de son hymne.


Anthony Esolen est conférencier, traducteur et écrivain. Il enseigne à Providence College.

Illustration : un prêtre célèbre la messe sur le front de Champagne, en 1915

http://www.thecatholicthing.org/2015/02/10/treasure-basement/