La Théologie dans la peinture - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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La Théologie dans la peinture

Traduit par Isabelle

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Le Bienheureux Jean (Giovanni) de Fiesole (1395 – 1455) célébré dans l’histoire de l’art comme le peintre Fra Angelico, et commémoré dans la liturgie de l’ordre des Dominicains le 18 février, était un prêtre qui prêchait par les images, aussi bien que par ses paroles et par la sainteté de sa vie. Examinons un de ses chefs d’œuvres, la fresque de l’Annonciation dans le couvent de Saint Marc à Florence. Annun1-1-768x539.png La grande peinture reflète la Providence divine. Comme rien n’échappe à la gouvernance divine de la création, rien dans la peinture n’échappe à la maîtrise de l’artiste ; rien n’est purement dû au hasard. Comme dans la belle musique, chaque note résonne juste là où elle le devrait dans le développement de toute l’œuvre. Le thème se déploie devant nous, si nous sommes attentifs à ce développement des notes, qu’il s’agisse des sons, ou, comme ici, des couleurs et des formes. annun2-768x544.png Remarquez l’angle du manteau de Notre Dame, qui se sépare de la masse principale du tissu (A dans notre diagramme). L’axe principal de ce morceau du manteau est parallèle à l’axe principal des ailes de l’ange. L’extension de cet axe relie le coin du sol (B) et le siège du banc en (C) ; et plus loin, fait un angle droit avec l’axe du buste de Marie (D) tandis qu’elle s’incline respectueusement vers le messager du ciel. Ainsi, les deux silhouettes sont reliées par un rectangle qui s’incline vers la gauche, là où atterrit l’ange, et remonte vers la droite, là où Marie est assise. C’est comme une bascule ; si un côté descend, l’autre monte. Le peintre établit ce rectangle de biais, contre une série de lignes horizontales très strictes pour s’assurer que nous sentons que cela penche. C’est ainsi que le bienheureux Jean dépeint merveilleusement la condescendance divine qui élève l’humain. « Dieu s’est fait homme pour que l’homme puisse devenir divin » (Saint Athanase, De l’Incarnation 54 :3, PG 25 :192B ; cf également le Catéchisme de l’Eglise Catholique paragraphe 460). Dans le rite traditionnel de l’offertoire de la messe, le prêtre dit : « O Dieu qui par la création de l’homme, l’avez rendu merveilleusement digne et l’avez renouvelé plus merveilleusement encore, permettez que, par le mystère de cette eau et de ce vin, nous devenions participants de La Divinité de Celui qui a bien voulu se faire participant de notre humanité, par ce même Jésus Christ, ton Fils notre Seigneur. » Cet échange est miraculeux, et Fra Angelico le dépeint comme tel. A première vue, la silhouette de Marie est « plus lourde » que celle de l’ange, aussi bien par la couleur (particulièrement les contrastes foncés et clairs) que par la forme ; et pourtant elle s’élève alors que l’ange descend. En même temps, une paire de triangles dynamiques (E et F) rehausse la position respectueuse de Gabriel, tandis que ces triangles par une propulsion vers le haut, de gauche à droite, donnent à l’observateur une impression de sursumactio, de montée : Nous sommes invités à nous incliner avec l’ange devant la Reine du Ciel, et au même instant à élever nos esprits et nos cœurs avec confiance vers elle, et vers le miracle que Dieu est en train d’accomplir en elle. Sursum corda ! Remarquez comme le deuxième triangle (F) est plus vertical sue le premier (E). Il interrompt l’avancée de Gabriel juste avant la colonne qui ferme la zone du tableau qui représente le Saint des Saints, l’espace où habite Marie, qui va être désormais le tabernacle du très Haut. La vénération a-t-elle jamais trouvé une expression picturale plus claire ? Il y a plus. Remarquez combien la perspective des arcs qui s’étirent vers l’arrière dans l’espace au-dessus de l’ange suggère le mouvement dans le temps et l’espace, et combien le rythme alterné de formes lumineuses et sombres évoque le frémissement des ailes de Gabriel et son atterrissage en douceur ; et par le fait même, l’action de Dieu tout au long de l’histoire de son peuple élu, qui fait une douce pause maintenant dans la maison de la Vierge à Nazareth, dans l’attente de sa décision. Au-dessus de Marie les arcs ne partent pas en arrière ; ils vont de la droite vers la gauche, vers le messager divin, mettant l’accent sur sa réponse totale : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole. » Cette réponse d’offrande de soi est encore amplifiée par l’expansion en écho du bleu et du vert dans la même direction, depuis le manteau de la Vierge jusqu’à la fenêtre et au jardin fermé (en référence au chant de Salomon IV 12, et par inversion, à la Chute qui eut lieu dans un jardin.) La fresque de frère Giovanni apporte le parfum de la bienveillance divine. La grâce nous élève tandis que nous nous présentons humblement devant Dieu et notre prochain. Le fait pour nous de nous incliner, nous élève. Nous sommes comblés en nous donnant à Dieu, et en servant notre prochain dans la charité selon la volonté de Dieu. La peinture du bienheureux fra Angelico, présente, en commun avec la liturgie, une atmosphère emplie de grâce – celle de la messe et des Heures qui l’ont formé jour après jour. En portant notre attention sur son aspect, et sur l’arrangement de ses formes et de ses couleurs, nous avons tiré des richesses spirituelles de cette fresque. Nous avons laissé la peinture informer nos perceptions. De même, dans la liturgie, nous assimilons les mouvements mesurés, les postures, les chants, la cadence des prières, la richesse du sens de chaque mot, et par-dessus tout, le miracle de la Parole faite Chair dans le sein de la Vierge, qui nous est offert, et est offert pour nous chaque jour. Même dans les rues des villes et dans les métros, si nous gardons et cultivons le jardin de notre âme par l’assistance à la messe et par l’oraison, avec le soutien de la contemplation fréquente de grandes œuvres d’art sacré , nous trouvons que jour après jour, tel un moine dans le cloître de San Marco, nous sommes conduits toujours plus profondément dans le mystère : Dieu s’est fait homme pour que nous soyons divinisés dans l’union avec Lui. 18 février 2017 Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/02/18/theology-in-paint/