Quelle extraordinaire diversité dans le royaume de France ! Non seulement la capitale mais aussi les villes petites ou moyennes manifestent cette richesse et, à plus forte raison, les capitales provinciales. Les routes de France m’évoquent à chaque fois une conversation que j’avais eue avec un ami polonais à Cracovie qui me disait, quand je le félicitais pour la beauté de sa ville : « Mais vous, en France, vous en avez des dizaines de Cracovie ! »
Toulouse, habitée depuis le néolithique et qui fut capitale d’une grande province romaine, entretient la légende selon laquelle la ville aurait été fondée par un Troyen, fils ou neveu de Priam, frère ou cousin d’Énée, fondateur de Rome. Elle s’enorgueillit de cette origine mythologique. On l’appelle « la ville rose », de la couleur de ses briques. Le comté de Toulouse, premier dans la première croisade, a rivalisé de prestige avec le royaume de France auquel il s’est finalement adjoint, en gardant le sens de sa différence. Aujourd’hui encore, Toulouse regarde vers Toulouse et non pas vers Paris, et il lui arrive d’entretenir des rapports privilégiés avec des provinces espagnoles voisines. À la fois féodale et rebelle, elle a inventé la démocratie municipale lorsqu’elle se dota de l’administration de ses capitouls, à qui revinrent les pouvoirs qu’exerçait auparavant le comte.
Un style toulousain
Le promeneur qui flâne en ville peut admirer les maisons médiévales, les innovations italiennes de la Renaissance à l’hôtel d’Assézat, et la permanence d’un style toulousain à l’hôtel d’Aussaguel de Lasbordes où siège l’Académie des Jeux floraux. Les quartiers de l’église de la Daurade et des quais de la Garonne ont été rénovés et sont des lieux de vie très prisés.
Le développement des industries de l’aéronautique et de l’espace a fait de Toulouse une place forte de l’industrie française et européenne. Ses universités et ses lycées ont une réputation de grands fournisseurs de cadres de la nation, et l’école toulousaine de théologie se souvient que, dans l’église des Jacobins, se trouve le crâne de saint Thomas d’Aquin auprès duquel les étudiants vont pèleriner avant leurs examens. Les dominicains de Toulouse sont toujours une référence en matière de théologie et de philosophie.
L’ovalie et l’opéra
Dans ses traditions et ses fleurons, Toulouse compte évidemment le jeu de rugby et le Stade toulousain fournit toujours les meilleurs joueurs mondiaux du ballon ovale. Le Capitole reste un passage décisif pour les chanteurs d’opéra. La ville maintient ainsi sa primauté dans les grands domaines intellectuels, sportifs et artistiques. On ne peut oublier que l’un des derniers des descendants des comtes de Toulouse, Henri de Toulouse-Lautrec, est l’un des plus grands peintres et affichistes modernes.
On se plaît à rêver d’une véritable décentralisation qui donnerait à ces possibilités toujours vivantes l’essor et le rayonnement qu’elles méritent vraiment, si le centralisme parisien et les passions électorales ne venaient pas l’entraver.
Un sentiment perdure cependant : la fierté que les Toulousains ont de leur identité, de leur art de vivre, de leur gastronomie, des couleurs rouge et noir du Stade toulousain !
Enfin, c’est au musée des Augustins de Toulouse que l’on peut admirer Notre-Dame de Grasse, splendeur de la sculpture gothique où la douceur du visage de la Vierge et le réalisme de la pose de l’Enfant, qui regarde à l’opposé de sa Mère, peuvent émouvoir aux larmes le visiteur. Que cette Vierge tant de fois gravée sur les médailles de baptême de nos enfants protège les Toulousains !