Oser « le pari capucin » - France Catholique
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Oser « le pari capucin »

"Les analphabètes au pouvoir ": c’est le titre du nouvel essai, décapant, du politologue Gaël Brustier. Qui invite les politiques et les citoyens à s’inspirer du charisme… des Frères mineurs capucins !
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© Hnoaldocap - CC BY-SA 4.0

Vous évoquez dans votre livre la « brutalisation de la politique et des relations sociales », dont l’actualité donne de nombreux exemples. Comment l’expliquez-vous ?

Gaël Brustier : Assez classiquement : quand on ne peut pas verbaliser ses désaccords, on cède souvent à la violence verbale, voire physique. Cette dégradation des rapports sociaux – qu’illustre le spectacle parfois offert par l’Assemblée nationale – n’est donc pas étonnante. Nous avons un personnel politique dont la culture historique, littéraire, philosophique, sociale est proche de zéro. Ils sautent d’un sujet à l’autre selon les modes du moment, au gré des emballements médiatiques.

N’êtes-vous pas trop sévère ? « Analphabètes », le mot est dur…

Il n’y a plus d’écoles de formation militantes, les revues se font rares, la curiosité pour l’histoire rarissime et celle pour les enjeux contemporains et quotidiens quasi nulle. Hier n’existe pas, et demain à peine plus ! Comment voulez-vous gouverner un pays sans conscience du temps long, ni connaissance des rapports de force internationaux – notamment de la permanence de la politique étrangère des nations ou des empires ? Qui sait ce qui se passe en mer de Chine, par exemple ? Lequel de nos hommes politiques a déjà rencontré un sinologue ? Le mouvement des sociétés est imbriqué dans le glacis des invariants historiques. Autrement dit : il y a une grammaire des civilisations, une grammaire de l’histoire de France. Si vous ne la possédez pas, mieux vaudrait s’abstenir de briguer des responsabilités.

Nos dirigeants sont-ils seuls en cause ? Nous sommes en démocratie : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple »…

En théorie oui. Mais nos élites se sont « autonomisées » et tiennent le peuple à distance des décisions qui engagent son avenir. On le voit bien depuis le vote sur le traité de Maastricht, en 1992, et, plus encore, depuis le référendum de 2005 sur la Constitution européenne : les politiques ont finalement ignoré son rejet par les Français. Des structures supranationales fixent le cadre dans lequel les débats sont autorisés. C’est la logique de la construction européenne, qui se déroule depuis les années 1950 : une logique d’encadrement du peuple et d’émancipation des élites. J’ajouterais que les discours catastrophistes contribuent à démobiliser les citoyens, renforçant l’impression que l’histoire leur échappe.

Quid de la notion de service ?

C’est la vraie question ! J’évoque dans mon livre la figure du Père Joseph (lire page 34). Ce capucin aux pieds nus – bien qu’issu de la haute noblesse – conseillait le cardinal de Richelieu et parcourait l’Europe pour négocier la paix avec les puissants, en vivant toujours avec les plus pauvres. Service, abnégation, sens de l’histoire, mise en perspective des événements : ce Père Joseph est un type bien ! Il n’a cherché ni la fortune, ni le pouvoir. Il s’attachait seulement à servir son pays. C’est
un exemple que nous devrions méditer.

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