Mgr Dominique Rey, l'audace apostolique - France Catholique
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Le journal de la semaine

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Mgr Dominique Rey, l’audace apostolique

« En voulant rejoindre le monde, on en venait parfois à se diluer, à se dissoudre dans ce monde ». Mgr Dominique Rey, évêque émérite de Fréjus-Toulon, livre ses vérités dans son nouvel ouvrage.
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Mission d’évangélisation de rue. © Missionnaire de la Miséricorde divine.

Il fallait ce livre, dû à la diligence de nos confrères Samuel Pruvot et Henrik Lindell, pour comprendre le cas singulier de l’évêque émérite de Fréjus-Toulon. Mgr Dominique Rey, démissionnaire de sa charge sur l’initiative du pape François, au-delà du procès d’ailleurs assez imprécis qui lui a été fait, s’est imposé comme un évêque missionnaire, aux initiatives audacieuses, qui s’est employé à contredire le mouvement de déchristianisation que d’aucuns considéraient comme inéluctable. Il convenait donc de l’interroger pour qu’il puisse répondre de sa mission avec toute la force de sa conviction. Mais aussi toute la force de son analyse de la situation de notre Église dans le monde contemporain.

« Se jeter en avant »

Ce qui impressionne, en effet, dans ce témoignage, c’est aussi une intelligence en mouvement, sans laquelle le prêtre puis l’évêque n’aurait jamais pu « se jeter en avant », pour reprendre une expression de Georges Bernanos. Celui qui témoigne est d’abord l’homme de son temps, qui a parfaitement compris l’évolution de la société à laquelle il appartenait : « J’ai assisté à une désaffiliation et à un décrochage entre les positions de l’Église et une partie croissante de la population, qui provoquait logiquement un vaste exil hors de l’Église de la part des générations post-soixante-huit. »

Nous sommes loin des grandes déclarations sur « l’ouverture au monde » et le nécessaire alignement sur les mentalités et les mœurs contemporaines : « Toute une culture post-soixante-huit a conduit à un phénomène de désacralisation à l’intérieur de l’Église, réduisant parfois le message évangélique à un programme politique, et l’Église à une ONG. […] En voulant rejoindre le monde, on en venait parfois à se diluer, à se dissoudre dans ce monde. »

Voilà ce que n’ont toujours pas compris ceux qui, tels en Allemagne, sont persuadés qu’accorder graduellement à la pensée unique du moment tout le crédit possible constitue la condition des retrouvailles du christianisme avec nos contemporains. Alors que c’est le contraire qui s’impose. Les conversions qui se sont multipliées dernièrement ne se comprennent pas par le fait que l’Église se serait enfin ouverte au monde, elles se comprennent avant tout par un sursaut, une exigence supérieure qui vous arrache au conformisme mondain actuel. « Il faut juste avoir conscience que la foi que nous proposons est aux antipodes de la culture ambiante, et ce décalage questionne et attire de plus en plus. »

Dynamisme missionnaire

Cette constatation ne débouche nullement sur l’immobilisme. Même si c’est la grande Tradition qu’il s’agit de poursuivre, en recourant à la formation spirituelle requise, à la plus belle liturgie, il y a lieu de retrouver nos contemporains en recourant aux moyens que la modernité nous offre, ainsi les réseaux sociaux. Le dynamisme missionnaire, qui s’inscrit dans une histoire fertile en renouveaux à la suite de crises successives, permet d’envisager des aventures analogues à celles d’un saint François et d’un saint Dominique, ou plus tard des saints de la Réforme catholique du XVIe siècle.

À ce point de vue, nous importe l’expérience de Dominique Rey, avec son infatigable intérêt pour tout ce qui dans le siècle permet d’envisager de nouvelles formes de pénétration de l’Évangile. « Qu’on ait ou non le goût des voyages, il est fascinant de découvrir en voyageant la multiplication d’outils que Dieu nous donne pour travailler à sa vigne. » Au-delà d’un quart de siècle d’épiscopat, on peut être sûr que cette expérience est appelée à susciter de nouvelles vocations.

Mes choix, mes combats, ce que je crois, Dominique Rey, Éd. Artège, novembre 2025, 272 pages, 18,90 €.