Les menaces qui pèsent sur l’école catholique - France Catholique
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Les menaces qui pèsent sur l’école catholique

Image :
L’école primaire Saint-Dominique, établissement hors contrat, au Pecq (Yvelines). © Groupe Scolaire Saint-Dominique

Les menaces qui pèsent sur l’école catholique

Les menaces qui pèsent sur l’école catholique

Les uns l’attaquent frontalement, comme La France insoumise. Les autres tentent de grignoter ses minces libertés, plus subrepticement. Comment rénover l’école libre ? C’est Léon XIV qui esquisse la solution : prendre le Christ pour modèle.
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On croyait la querelle scolaire éteinte depuis qu’en juin 1984, deux millions de manifestants avaient fait échec à la création du « grand service public unifié et laïc de l’éducation nationale » envisagée par les socialistes. C’était compter sans l’obstination de la gauche, et la résurgence d’un courant révolutionnaire incarné par La France insoumise qui veut – c’est dans son programme – « abolir les privilèges de l’enseignement privé ».

Auteur de deux rapports, sur le financement des écoles sous contrat et sur le contrôle des établissements scolaires, le député LFI Paul Vannier assume de porter « un regard idéologique et politique sur ces questions, avec un modèle éducatif en tête » – qui passe par la mise au pas de l’enseignement catholique, c’est-à-dire son assimilation pure et simple à l’école publique. En témoigne sa volonté de durcir le contrôle des établissements privés par l’administration, de « repenser » les termes du contrat qui les lie à l’État, de confier « le pilotage » de l’école catholique à la Direction générale de l’enseignement scolaire, de « recentrer les décisions autour du recteur ». Des mesures en apparence techniques mais qui constituent bel et bien « une révolution », clame Paul Vannier. « Avec lui, LFI veut ranimer la guerre scolaire », résume Patrick Hetzel, député LR du Bas-Rhin, qui l’accuse de se comporter en « inquisiteur ».

Éphémères ministres de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye et Nicole Belloubet n’ont pas attendu l’adoption de ces propositions, encore en débat, pour déterrer la hache de guerre. Élisabeth Borne, qui leur a succédé, leur emboîte aujourd’hui le pas, secondée par des recteurs aux méthodes parfois inquisitoriales. Des inspections ont été diligentées dans plusieurs établissements, souvent réputés pour les excellents résultats de leurs élèves, comme le collège Stanislas à Paris ou le collège du Sacré-Cœur à Versailles. à Pau, le directeur de l’Immaculée-Conception, Christian Espeso, a vu débarquer douze inspecteurs de l’Éducation nationale à la suite d’un article de Libération l’accusant d’entorses à la laïcité. Pêle-mêle : « Des confessions organisées durant le temps scolaire, des cours de catéchisme obligatoires et évalués […], des intervenants réactionnaires ou des entraves à la liberté de conscience. » Or, le tribunal administratif a annulé, en juin, la décision du rectorat qui l’avait suspendu de ses fonctions à la suite de ces accusations infondées…

Élisabeth Borne a prévu de multiplier les contrôles des établissements sous contrat : 40 % seront inspectés avant la fin de l’an prochain, 1 000 rien que cette année ! Ces enquêtes vont bien au-delà de la lutte contre les abus qu’ont pu subir certains élèves par le passé. Il s’agit de vérifier si les fonds alloués à l’Enseignement catholique par l’État – qui rémunère les professeurs et certains personnels – sont utilisés conformément au contrat qui régit leurs rapports depuis la loi Debré de 1959. Or, cette loi fait l’objet d’appréciations divergentes. Elle garantit le « caractère propre » des établissements catholiques, sans cependant le définir, et dispose qu’ils doivent dispenser leur enseignement « dans le respect total de la liberté de conscience. Tous les enfants sans distinction d’origine, d’opinions ou de croyances, y ont accès. » Les deux objectifs sont-ils vraiment inconciliables ? C’est toute la question.

La gauche a seulement changé de stratégie

Parce qu’elle permet à l’État de financer en partie les établissements sous contrat, la gauche a toujours combattu la loi Debré. Le 19 juin 1960, des comités laïques, soutenus par le Parti communiste, la CGT et le Grand Orient de France, avaient réuni plusieurs dizaines de milliers de militants sur la pelouse du bois de Vincennes. Tous firent « le serment […] de lutter sans trêve et sans défaillance jusqu’à son abrogation, et d’obtenir que l’effort scolaire de la République soit uniquement réservé » à l’école publique. Fidèle à sa tradition anticléricale, la gauche n’a pas renoncé à cet objectif. Elle a seulement changé de stratégie après le revers qu’elle a subi en 1984, jugeant plus habile de grignoter ses libertés que d’user de la force.

Ministre de l’Éducation nationale de 1992 à 1993, Jack Lang joua de sa séduction pour y parvenir. Il conclut avec le Père Max Cloupet, alors secrétaire général de l’Enseignement catholique, un accord qui allait considérablement affecter l’avenir des écoles catholiques, au risque d’altérer leur identité. Les professeurs du privé recevraient une formation semblable à celle de leurs collègues du public, dispensée pour l’essentiel dans les Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) mis en place par Lionel Jospin. L’enseignement catholique perdait ainsi la responsabilité de la formation de ses maîtres et la maîtrise de leur recrutement : l’association avec l’État confinait à l’assimilation. Jack Lang ne manqua pas, à l’époque, de souligner que le rôle accordé aux IUFM allait « faire entrer l’esprit du service public dans les écoles privées ».

Les accords Lang-Cloupet

Le Père Cloupet conclut pourtant cet accord pour deux raisons. L’État acceptait de verser à l’enseignement catholique ce qu’il lui devait au titre du « forfait d’externat » – qui fixe le montant de sa participation aux dépenses de fonctionnement des écoles privées –, 1, 8 milliard de francs. Mais il le fit aussi pour satisfaire une revendication de la FEP-CFDT – l’un des principaux syndicats de l’enseignement catholique – soucieuse d’aligner le statut des enseignants du privé sur celui du public. Or la FEP est bien moins attachée à défendre le caractère confessionnel de l’école libre qu’à traquer toute « atteinte à la laïcité ». Elle s’est ainsi félicitée – un peu vite – de la sanction infligée l’an dernier à Christian Espeso ! Qu’elle ait recueilli 31,3 % des voix aux dernières élections professionnelles dans l’enseignement privé, en 2022, n’est pas indifférent.

D’autres lois ont encore rapproché « les deux écoles ». Les maîtres de l’enseignement catholique ont le statut d’« agents de droit public » depuis 2005. Ils passent les mêmes épreuves au concours, sont évalués par les mêmes jurys. Et le Code de l’éducation stipule que les établissements privés sous contrat « doivent suivre les programmes de l’enseignement public », de sorte que la liberté des chefs d’établissement est strictement encadrée – et même surveillée puisqu’exercée sous le contrôle pointilleux des rectorats.

Le ministère de l’Éducation exige aujourd’hui que les cours de culture religieuse, qui relèvent pourtant de la culture générale, soient facultatifs dans les écoles sous contrat – comme l’est déjà la catéchèse. Estimant que l’enseignement de « culture chrétienne » mis en place par le collège Stanislas s’apparentait à de l’instruction religieuse, le ministère a mis en demeure l’établissement parisien de s’assurer de l’accord explicite des parents, au nom du « respect de la liberté de conscience »… Comment ne pas voir que l’absence de culture chrétienne dans un monde façonné par l’Église favorise la manipulation des esprits ? On connaît le mot terrible du socialiste René Viviani en 1906, devant les députés : « Nous avons arraché les consciences à la croyance […]. D’un geste magnifique, nous avons éteint dans le ciel des étoiles qu’on ne rallumera plus. » Où est la liberté de conscience ?

Le ministère ne craint pas, en revanche, de s’immiscer dans le domaine le plus intime. Le rectorat a en effet averti le collège Stanislas qu’il veillerait à ce qu’il « déploie » tout le nouveau programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et à la sexualité (EVARS). Depuis la rentrée, les établissements privés sous contrat sont obligés de l’appliquer, bien que son contenu soit très contestable (cf. FC 3885). Cette nouvelle exigence pourrait inciter bien des familles à inscrire leurs enfants dans les écoles hors contrat qui, ne subissant pas les mêmes contraintes, connaissent un bel essor : alors que 5 000 classes ont fermé cette année dans le public pour des raisons démographiques, et environ 500 dans le privé sous contrat, la Fondation pour l’école a recensé plus de 400 ouvertures de classes dans le hors-contrat, qui scolarise 140 000 élèves.

Les évêques montent en ligne

Comment conjurer le risque d’étouffement de l’enseignement catholique ? Un nouveau secrétaire général, Guillaume Prévost, 42 ans, vient de prendre ses fonctions. Il se dit attaché à « la singularité de l’enseignement catholique ». Et critique le rapport Vannier qui « vise surtout à mettre l’enseignement catholique sous tutelle administrative » (La Croix, 29/08). Les évêques se sont saisis du sujet en avril, lors de leur assemblée plénière à Lourdes. « La liberté de croire et de grandir dans la foi doit être pleinement respectée », souligne Mgr Matthieu Rougé, nouveau président du Conseil pour l’éducation catholique. C’est encore vers Rome qu’il faut se tourner pour entrevoir le renouveau. à des enseignants venus en pèlerinage, Léon XIV a déclaré, le 5 juillet : « Je vous souhaite de nourrir chaque jour votre relation avec le Christ, qui nous donne le modèle de tout enseignement authentique, afin qu’à votre tour vous puissiez guider et encourager ceux qui vous sont confiés à suivre le Christ dans leur vie. »