Le 5 juillet 1962. L’Algérie est officiellement indépendante. Depuis l’aube, des foules convergent vers le centre d’Oran pour célébrer l’événement. L’ambiance est festive, rythmée par les youyous des femmes. Sur le parvis de la cathédrale, se dresse une statue équestre de Jeanne d’Arc. Des manifestants se ruent sur elle, l’enfourchent et l’affublent d’un drapeau FLN. « Les grands, les petits, les vieux et les jeunes participent au viol collectif d’une statue », note un témoin cité par Georges-Marc Benamou dans son livre Un mensonge français (Robert Laffont, 2003).
Jeanne, c’est la France
31 mai 2025. Le PSG vient de l’emporter face à l’Inter de Milan en finale de Ligue des Champions (5-0). Plus de 30 ans après Marseille en 1993, un club français s’empare enfin de la « coupe aux grandes oreilles ». Les supporters des Parisiens sont en liesse, vite débordés par des voyous – des « barbares » selon Bruno Retailleau – à la recherche de véhicules à brûler et de boutiques à dévaliser. Au cœur de la capitale, rue de Rivoli, la statue de Jeanne d’Arc se dresse face à eux. Comme à Oran 63 ans plus tôt, quelques-uns l’escaladent, brandissent un drapeau palestinien, tandis qu’un individu cagoulé profane la statue en posant ses fesses sur sa tête.
La symbolique est évidente. Bien sûr, contrairement à celles d’Oran, les émeutes parisiennes ne se sont heureusement pas soldées par le massacre de plus de 700 Européens. Mais cet épisode n’est pas une farce potache : Jeanne, c’est une femme, chrétienne, vierge, guerrière, sainte. C’est la France. S’emparer de sa statue, la ridiculiser, la profaner, c’est préfigurer le sort qui attend tout ce qu’elle symbolise. Ou du moins annoncer une intention qui ne demande qu’à se concrétiser si rien n’y fait obstacle. « Cela fait longtemps que le football nous le révèle – victoire de l’Algérie, du Maroc ou de la France –, la question n’est plus sécuritaire, elle est culturelle », observe Vincent Trémolet de Villers dans Le Figaro (01/06).
Profanations
Alors bien sûr, on aura vite fait de réduire ces considérations à l’expression grincheuse d’un patriotisme ringard. Ce serait oublier les profanations très concrètes qui sont mises en œuvre dans tous les territoires où se déroule le choc des civilisations. Daesh en Irak et en Syrie, les Azerbaïdjanais au Haut-Karabakh : partout, la prise du pouvoir par les adversaires de l’Occident s’accompagne de la dégradation des symboles chrétiens parfaitement identifiés par les iconoclastes : croix, statues de la Vierge, sépultures… Ces gestes sont aussi perpétrés dans les églises de France, de plus en plus régulièrement.
La victoire du PSG invite par ailleurs à poser la question de son actionnaire : le très frériste Qatar, qui a fait du foot l’un des vecteurs les plus efficaces du « soft power » vert. « Le PSG est au cœur de la machine de guerre qatari en France avec un budget de 800 millions d’euros écrasant la concurrence. Le PSG est-il d’ailleurs vraiment un “club français” comme on l’entend si souvent dire ? Quand on voit notamment la tolérance de la direction du club avec les supporters dévoilant, en novembre 2024, un immense tifo à la gloire “de la résistance palestinienne de Gaza”, on comprend que le PSG sert beaucoup les intérêts géopolitiques de ses maîtres », souligne Barbara Lefèvre dans Marianne (30/05).
« La réalité de la victoire du PSG, c’est cela : la violence et l’argent sale du Qatar uni à l’absence de conscience de supporters qui ne comprennent pas que les jeux du cirque testent la faiblesse et la veulerie d’une société. D’un côté les Qataris financent l’abrutissement, de l’autre ils arment les jihadistes et financent le séparatisme. Le tout sous vos applaudissements », notait l’essayiste Céline Pina sur X le 9 mai. Désespérant ? Non. De nombreux signaux le montrent : l’autruche française, malgré bien des résistances, commence à sortir la tête de son trou. Quant à la statue de Jeanne qui se dressait à Oran, elle trône désormais à Caen, place… de la Résistance.