Albert Camus, jamais sans sa mère - France Catholique
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Albert Camus, jamais sans sa mère

L’auteur de La Peste n’a pas trouvé Dieu, mais son humanisme est proche de la vision chrétienne de l’homme. Son amour pour sa terre et pour sa mère l’a conduit vers une vérité rédemptrice.
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Albert Camus par Jean-Loup Othenin-Girard.

Dans le « théâtre » de Saint-Germain-des-Prés, à la moitié du XXe siècle, à côté de Jean-Paul Sartre et de Simone de Beauvoir qui règnent en souverains de l’existentialisme, figure celui qu’ils appellent avec mépris « l’Algérien » : Albert Camus, dont l’image aujourd’hui grandit au point de rejeter dans l’ombre celle de Sartre.

Albert Camus, dans une œuvre inachevée qu’a interrompue un accident de voiture, a témoigné du drame du XXe siècle. Son œuvre, La Peste, L’Étranger, L’Homme révolté, La Chute, doit être complétée par ses écrits du début : Noces, et son livre inachevé, Le Premier Homme. Elle dit l’angoisse moderne et, contrairement aux dogmatiques de l’existentialisme et du communisme, elle va chercher la vérité de cette angoisse. Cette recherche conduira à révéler la responsabilité des totalitarismes modernes dans le meurtre. L’Homme révolté est une analyse de cette tragédie qui culmine dans la terreur, et Camus refuse le mensonge du communisme.

Piété filiale

Quand il reçoit le prix Nobel, en 1957 à 44 ans, pour l’ensemble de son œuvre, et qu’on l’interroge sur le drame de l’Algérie, dans lequel il s’était engagé, jeune – dans le parti communiste algérien avec lequel il a rompu – Camus répond : « Je suis pour la justice mais je préfère ma mère à la justice. »

Cette réponse va condamner Camus aux yeux de l’intelligentsia mais elle éclaire la suite de son œuvre, notamment Le Premier Homme, livre inachevé à cause de la mort subite de son auteur le 4 janvier 1960, qui comporte dans les notes posthumes des traits sur sa maman émouvants de piété et d’amour véritable.

Camus a aimé sa mère, la terre d’Algérie où il a grandi, le soleil et la mer, et il a trouvé dans cette beauté, qu’il chante dans son livre Noces, de quoi transfigurer la misère de l’homme du XXe siècle.

Un tableau de l’absurdité moderne

On peut considérer que Le Premier Homme était pour lui le grand ouvrage par lequel il allait prouver qu’il se mettait au rang des très grands romanciers du XXe siècle, Louis Ferdinand Céline dans le Voyage au bout de la nuit, et Marcel Proust dans La Recherche du temps perdu. Par là, Camus, a brossé un portrait véritable de l’homme moderne, avec sa richesse et ses drames intérieurs, et son témoignage reste comme un moment de vérité.

Il faut ajouter que l’homme était très attachant et très sympathique, et sa belle allure physique lui a valu beaucoup d’admiration et de jalousies. Camus a touché à tous les genres : l’essai, le roman, le théâtre, mais l’unité de son œuvre tient dans sa réflexion sur la philosophie de l’absurde et sa quête de la vérité. Dans son roman inachevé, les notes finales sur sa mère regardant le crucifix et disant : « Ma mère, elle avait tout compris », ouvre une perspective nouvelle sur ce qu’aurait été cette pensée en chemin.

Camus, le produit d’un siècle de l’absurde et de l’athéisme, a trouvé sa voie dans l’amour de la terre de ses ancêtres et de sa mère, et ce chemin le conduisait vers une vérité rédemptrice.

« Plus de bon grain que d’ivraie »

Nous pouvons donc conclure dans les termes qu’employait, dans le numéro 381 de la revue Permanences, Laurence Mircher : « N’ayant pas trouvé Dieu, Camus essaie seulement – mais c’est déjà beaucoup – d’être pleinement homme. Et cet humanisme camusien ne nous semble pas si éloigné de la vision chrétienne de l’homme […]. Camus, on l’a dit, ne se sent en possession d’aucune vérité absolue, pour autant, n’hésitait-il pas à placer la vérité au plus haut des exigences humaines : “Une seule chose au monde me paraît plus grande que la justice, c’est sinon la vérité elle-même au moins l’effort vers la vérité.” Et s’il s’avère que cette quête est vaine, au moins faut-il rejeter violemment l’erreur et le mensonge. Ainsi, a-t-il dénoncé les communistes et la complicité des intellectuels. […] Chez Camus, en vérité, il y a plus de bon grain que d’ivraie. »