À L’Île-Bouchard : « Dites aux petits enfants de prier » - France Catholique
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« Les contemplatifs portent le monde »
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À L’Île-Bouchard : « Dites aux petits enfants de prier »

En 1947, la Vierge apparaît à l’Île-Bouchard alors que la France est au bord d’une insurrection communiste. Elle demande aux petites voyantes de prier pour le pays.
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La Grotte dans la chapelle des apparitions. <FONT size="2pt"© Sanctuaire de L’Ile Bouchard

En décembre 1947, la situation politique en France est tragique. Bien que la guerre soit finie, dans un pays en ruines où l’inflation atteint 60 % sans voir augmenter les salaires, où les tickets de rationnement restent en vigueur, tentant de gérer une pénurie qui frise la disette, les gens, affamés, sans chauffage, sans logement souvent, sont réceptifs aux promesses du parti communiste.

La stratégie du chaos

Renvoyé du gouvernement Ramadier en mai, fort de 30 % d’électeurs, le PCF s’essaie, comme en Italie, à déclencher le chaos, déstabiliser le bloc de l’Ouest, empêcher la mise en œuvre du plan Marshall et entraîner le basculement côté soviétique. Après des mois d’agitation sociale tous azimuts, des tensions croissantes, la mort à Marseille d’un militant CGT met le feu aux poudres. Des cordons de la police et de l’armée sont désarmés. Les sabotages se multiplient à l’EDF et la SNCF, atteignant un point de non-retour dans la nuit du 4 décembre, quand ses militants font dérailler le Paris-Lille, tuant 20 passagers. Un coup de force rouge semble imminent car le PCF, dépassé par sa base, ne contrôle plus la situation. La France basculant côté soviétique, le monde libre serait déstabilisé, la guerre civile semble inévitable. À L’Île-Bouchard, petit village tourangeau de l’Indre-et-Loire, on ne sait de tout cela que ce qu’en dit la radio. Mais tous sont anxieux. En ce 8 décembre, fête de l’Immaculée Conception, les religieuses institutrices de l’école privée ont demandé aux enfants de prier la Sainte Vierge pour la France.

Jacqueline Aubry, 12 ans, fille du boulanger, allant en classe, entre à l’église Saint-Gilles. Sa cadette, Jeanne, et sa cousine, Nicole Robin, sont avec elle. Elles gagnent la chapelle latérale gauche – celle de Notre-Dame-des-Victoires, protectrice de notre pays. Il est 13 heures.

Une Dame d’environ 16 ans

Au quatrième Ave de sa dizaine, Jacqueline, étonnée, remarque que la nef, sombre en ce jour d’hiver, est baignée, « entre le vitrail et l’autel », d’une lumière « très vive quoique non éblouissante ». Dans cette clarté, une Dame d’environ 16 ans, blonde, vêtue d’une robe blanche à ceinture bleue et d’un voile blanc, très belle mais triste, et un ange. Apeurées, les fillettes quittent l’église, rencontrent des camarades, les petites Croizon, leur disent ce qu’elles ont vu. Celles-ci veulent aller vérifier. L’aînée ne voit rien mais la cadette, Laura, tombe à genoux. L’ange et la Dame n’ont pas bougé ; ils ne disparaissent qu’à la fin de la dizaine de chapelet, « dans une poussière d’or ».

De retour à l’école, les enfants parlent. Le curé, l’abbé Ségelle, sachant Jacqueline atteinte d’une ophtalmie incurable, cherche une explication rationnelle : « Tes grosses lunettes t’ont fait voir trouble ! » Mais lui-même n’est pas convaincu et il presse séparément les fillettes de questions, saisi de la cohérence de leurs récits. Sœur Saint-Léon, la maîtresse, alors que les enfants parlent, ravies, de la beauté de la Dame, riposte : « Si elle était si belle que cela, il fallait rester à l’église ! » Sitôt dit, sitôt fait, les petites y retournent ! Il est 13 h 50. La Dame et l’ange reparaissent au premier Ave : « Dites aux petits enfants de prier pour la France qui en a grand besoin » demande la jeune femme. Jacqueline, qui a deviné son identité et n’ose lui parler, la questionne par l’intermédiaire de Jeanne, « plus pure » car plus jeune : « Madame, êtes-vous notre Maman du Ciel ? — Oui. » L’ange au sourire rayonnant se présente en disant : « Je suis l’archange Gabriel. » Puis la Dame baise la main des enfants, y laissant une marque dorée, et leur demande de revenir le soir à 5 heures et le lendemain à 1 heure (de l’après-midi).

« Vous y verrez clair »

La Sainte Vierge et Gabriel sont exacts aux deux rendez-vous. Le 9, Notre-Dame dit de prévenir « Monsieur le curé de venir à 2 heures avec la foule et les enfants pour prier pour la France » et de construire « une grotte » à l’endroit de l’apparition. Le chanoine Ségelle viendra, mais à 5 heures car « 2 heures, c’est l’heure de la classe ». Et Notre-Dame de décaler sa visite pour l’arranger ! Elle ajoute qu’il faudra revenir chaque jour.

Le curé prévient l’archevêché, se voit ordonné d’observer discrètement des événements dont on parle déjà beaucoup hors le village, ce qui fâche M. Aubry, agnostique, furieux qu’on se moque de sa fille au café du bourg. Aussi, le 10, défend-il à Jacqueline de retourner à l’église… avant de revenir sur l’interdiction devant son chagrin.

Cette scène a bouleversé l’enfant, qui réclame un « miracle » pour prouver qu’elle ne ment pas. « Je ne suis pas venue ici faire des miracles mais vous demander de prier pour la France. Mais demain, vous y verrez clair et ne porterez plus de lunettes », répond la Dame. Le lendemain, Jacqueline est guérie : ni ophtalmie, ni myopie… « Il est donc vrai qu’elle descend parmi nous ! » s’écrie le curé désormais présent aux apparitions et qui demande par les enfants : « D’où nous vient cet honneur que vous veniez dans l’église Saint-Gilles ? » Parce qu’il y a là « des personnes pieuses » et que Jeanne Delanoue, vénérable fondatrice des Sœurs de L’Île-Bouchard, y est passée, répond la Sainte Vierge qui ajoute : « Je donnerai du bonheur dans les familles. Priez pour les pécheurs. Je ne suis pas venue ici pour faire des miracles mais pour vous demander de beaucoup prier et faire des sacrifices. » De toute la France, curieux et pèlerins affluent, les informations cinématographiques envoient une équipe filmer les voyantes. Le 13 décembre, dans l’église bondée, Notre-Dame a retrouvé le sourire et, plus on récite le chapelet, cette « prière que j’aime », dit-elle, plus elle rayonne. Elle annonce une ultime visite le lendemain. Les enfants lui offrent des bouquets qu’elle bénit à défaut de les emporter ; les témoins constatent que les enfants tendent tous les fleurs vers le même endroit, comme si, en effet, il y avait quelqu’un devant elles.

Et la France fut sauvée

Le 14 décembre, Jacqueline implore un signe. La Sainte Vierge promet « un vif rayon de soleil ». Or il tombe une pluie battante ! Pourtant, tandis que l’assistance dit le chapelet, bras en croix, un rayon de soleil entre dans la nef par un vitrail sud, si brillant que les gens se couvrent les yeux. Renouvellement d’un miracle accompli le 8 décembre 1854 à Saint-Pierre de Rome lors de la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception, alors qu’à cette époque de l’année, ni à Rome ni à L’Île-Bouchard, le soleil ne peut entrer par là. Dans les deux cas, des milliers de personnes sont témoins de ces phénomènes contraires aux lois de la physique. Enfin le rayon, l’ange, la Dame disparaissent.

La Sainte Vierge n’aura plus besoin de revenir. Le 9 décembre, sans explication, le parti communiste a renoncé à la grève insurrectionnelle. Les prières des petits enfants ont sauvé la France.