Vous avez dit Puntland ? - France Catholique
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Vous avez dit Puntland ?

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par Jean Étèvenaux © Acip

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L’odyssée du voilier français Le Ponant a attiré l’attention sur une région instable et inconnue mais aussi, d’une manière plus générale, sur la recrudescence de la piraterie maritime, bien que celle-ci s’en prennent surtout aux vaisseaux marchands. Le Puntland — qui tire son nom de l’antique terre de Punt, ainsi dénommée par les Égyptiens et qui fut le pays mythique de la myrrhe et de l’encens — se considère comme un État autonome dans le nord-est de la Somalie. Depuis plus de quinze ans, les Somaliens ne disposent plus de gouvernement fort et des guerres ravagent le pays. Mais, à la différence de l’État autoproclamé du Somaliland — qui, dans la partie nord-ouest, insiste sur les différences entre ce qui était autrefois administré par les Britanniques face à la Somalie italienne —, le Puntland ne cherche pas à être reconnu par la communauté internationale. Son site web officiel présente cet « endroit sûr et amical pour les visiteurs de l’étranger » qui s’appelle « Puntland State of Somalia [État du Puntland de la Somalie] ». Toutefois, comme le Somaliland, il se trouve économiquement et politiquement soutenu par l’Éthiopie, adversaire historique de la Somalie ; le président du Puntland s’est d’ailleurs rendu en visite officielle à Addis-Abeba au mois de février.

Officiellement défini comme un « État régional fédéral » au sein de la Somalie, le Puntland dispose d’un gouvernement, d’un parlement et d’une administration. La superficie, de près de 150 000 km², correspond au quart de la Somalie, tout comme sa population de 2 500 000 personnes. Sa ville principale s’appelle Garoowe. La frontière avec le Somaliland et le reste de la Somalie est disputée car ne correspondant pas aux principaux clans, qui déterminent là-bas les obédiences et les allégeances. D’un point de vue économique, il y a beaucoup de liens avec le Yémen et Oman, mais aussi avec Dubai, d’où proviennent pratiquement tous les biens de consommation.
Parmi les trafics en tout genre dans cette région par ailleurs très stratégique, celui des êtres humains occupe une place de choix. C’est ainsi que, le 22 mars 2007, selon le Haut Commissariat de l’Onu aux réfugiés, quatre bateaux de contrebandiers transportaient quelque 450 personnes dans le golfe d’Aden entre la Somalie et le Yémen ; afin de se débarrasser de la surcharge ou tout simplement d’empocher sans contrepartie les cent dollars versés par chacun, les pirates ont jeté par-dessus bord leurs passagers. Le destin de ces derniers est donc souvent tragiquement simple : passés à tabac, matraqués, poignardés, ils doivent ensuite échapper aux requins avant que les survivants ne soient rançonnés par les forces de sécurité à leur arrivée. On estime que, l’an passé, quelque 1 400 clandestins ont ainsi péri du côté du golfe d’Aden, ce qui n’a pas empêché 30 000 personnes de réussir à atteindre le Yémen à partir du Puntland.

Cette piraterie se développe pour plusieurs raisons. On note d’abord l’incapacité de certains pays à gérer la sûreté de leurs eaux territoriales — d’où la demande du chef d’état-major français, le général Jean-Louis Georgelin, qu’ils la laissent au soin de ceux qui peuvent l’assurer. Ensuite, sauf exceptions, les équipages des navires sont peu nombreux et non armés ; les cargos se déplacent à des vitesses faibles — entre 20 et 40 kilomètres par heure —, sont peu manœuvrables et, lorsqu’ils sont chargés, peuvent être assez bas sur l’eau, permettant ainsi un abordage aisé. Par ailleurs, les équipages, provenant en grande partie de pays comme l’Ukraine — à cause de sa tradition maritime — ou les Philippines, reçoivent la majeure partie de leur salaire en liquide, se trouvant ainsi souvent dans des situations à la limite de la légalité.