Vacances universitaires - France Catholique

Vacances universitaires

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Une fois de plus, les universités se ferment pour une longue période estivale. C’est la fin d’un cycle annuel, et une nouvelle fournée de diplômés est libérée. Les diplômes sont remis selon le bon vieux cérémonial.

On dit beaucoup de mal des étudiants de nos jours, tout comme au cours des huit (ou plus) derniers siècles. Ils ont de tout temps été privilégiés, et donc sont plutôt gâtés. Ils sont plus brillants que la moyenne de la population, et en sont souvent trop conscients. Ayant bien peu d’expérience de la vie, ils ont déjà leurs opinions bien arrêtées et, dès leurs vingt ans, imaginent savoir ce qui va de travers dans le monde et comment y remédier. En plus de leur arrogance naturelle, beaucoup sont mal embouchés.

Il faut nous souvenir non seulement d’évènements tels que les émeutes d’Oxford (1355) mais aussi de leurs conséquences. Je fais appel à cet ancien incident de la Sainte Scolastique comme emblème de tant d(incidents analogues au cours des siècles.

Deux étudiants entrant dans une taverne se firent servir ce qu’ils trouvèrent être de la mauvaise bière. Ils la jetèrent au visage du propriétaire, et le combat commença. Avant le soir, les habitants qui en avaient par-dessus la tête du comportement des étudiants d’Oxford et de leurs airs supérieurs s’étaient alliés aux représailles. De même, les étudiants vinrent en force, et deux jours plus tard, quand l’émeute prit fin, on compta quatre-vingt-treize morts — pour la plupart du camp des habitants.

En conclusion, le maire dût se confondre en plates excuses devant les autorités de l’université — et cinq cents ans plus tard les maires successifs d’Oxford se pliaient encore à la tradition. Les habitants furent condamnés à de lourdes amendes pour la mort ou les blessures des étudiants. Bien d’autres décisions précisèrent que la ville appartenait aux étudiants, et non l’inverse. Ce qu’on appelle de nos jours « Indépendance académique ».

On ne trouvera guère de sens à des conflits dûs à la vanité des étudiants en faculté. Jamais un brin de populisme n’a pu avoir une fin heureuse. La leçon de l’histoire est qu’un privilège est un privilège, que celà plaise ou non. On ne peut le tolérer qu’en faisant appel à la conscience, le sang n’apporte jamais rien de bon.

Si j’ai cité ces huit (ou plus) siècles, c’est qu’on ne mesure pas bien cette vérité que certains problèmes en ce bas monde sont insolubles, même pour les anciens et les sages.Comment tout a commencé? Mystère insondable! Si les humains se reproduisent, il se constitue des familles. Avec les familles viennent les héritages. Pour certains, l’avantage viendra au fil du temps: un « système de classes » s’établira inévitablement — d’autant plus vicieux qu’on tentera de l’abolir. On n’échappera pas à une hiérarchie. Les privilèges sont inévitables. S’ensuivent les rivalités.

Cependant aucun ordre culturel ou civilisationnel n’est réalisable sans que surviennent ces évènements, et l’Église, quel qu’en soit le discours, doit s’adresser à un monde d’inégalités créatives.

Notons au passage que le Christ n’a jamais prêché l’égalité. La pauvreté qu’Il citait n’a rien à voir avec une doctrine économique, et Il n’avait rien à dire de l’ordre politique l’accompagnant: tenez-vous-en à l’écart. Son message s’adressait à toutes les âmes sur terre — à tous les pécheurs — leur parlant avec Son autorité divine. À bon entendeur, salut.

Il suffisait que nos péchés fussent cloués avec Lui sur la Croix, qu’Il ressuscitât corps et âme, montât au Ciel après Son passage aux Enfers. Mais de plus Il créa une institution hors de terre, comme nous le relatent les Actes des Apôtres — telle qu’à « la sixième heure » se déploie un immense voile entre Ciel et Terre, figurant Son Église pour nous accueillir.

Et toutes les épreuves sur terre s’y opposeront, pour nous faire tomber.
Mes étudiants, dont j’assisterai à la remise des diplômes et qui se réuniront lundi soir pour une messe célébrant leurs diplômes (ici, au Séminaire Saint Philippe, à Toronto), vont partir, nouveaux prêtres, dans le chaos d’une société et à une époque où le Christ est rejeté, où même au sein de la Sainte Église on s’inquiète davantage de justice sociale que du salut des humains. J’ai eu la chance d’enseigner à des étudiants non seulement plus intelligents que la moyenne, mais surtout plus sincères dans leur conscience de la « fonction » de notre Église envers les pécheurs.

Certains réussiront, d’autres pourront échouer à soutenir l’intégrité de la Foi. Tous, que je sache, ont la tête bien faite, ce qui est rare à notre époque. Ils auront le « privilège » de servir le Christ, leur « défi » devra être la connaissance, contre le démon, au nom du Christ.

Je sens bien que ces quelques lignes peuvent sembler étranges à un lecteur peu familier avec l’enseignement Chrétien, même s’il a grandi normalement au sein d’une maisonnée catholique. Mais je sens également qu’il n’y a là rien de bien nouveau. Car même pour les étudiants acharnés il y a souvent une certaine incompréhension. Nous mettons nos leçons à notre propre service.
En Occident comme en Orient, au cours des siècles , on pouvait se servir de l’Église comme moyen de progrès social personnel, ou pour se libérer des contraintes sociales habituelles, et donc des obligations de savoir-vivre. Pensons à tous ceux qui ont rendu l’Église détestable, dont l’hypocrisie a égaré des pénitents et repoussé d’éventuels convertis.

Même actuellement on peut encore opter pour la prêtrise comme carrière confortable, ou comme échelle sociale facile à monter. Et alors que l’Église commence à se remettre de la catastrophe historique (post-Vatican II) les pires tentations vont s’offrir à nouveau. Car le Démon ne prend pas les vocations religieuses à la légère.

Et nous ne le devons pas non plus. Le monde est en grand désordre, c’est ainsi depuis Adam, et l’Église a de toujours eu à s’en occuper. Ses serviteurs sont faillibles, comme tout le monde, et cependant, au fond de son cœur, gît toujours ce qui ne peut être vaincu.

Chaque génération doit s’y remettre. Et que Dieu bénisse les hommes de bonne volonté.

Site de la taverne de Swindlestock — 1250 – 1709

https://www.thecatholicthing.org/2017/05/12/end-of-term/