Une scène bien de chez nous - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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Une scène bien de chez nous

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Les avis sur le débat de mardi soir sont souvent contradictoires. Beaucoup de politologues sont insatisfaits de la teneur des discussions. On n’aurait pas avancé d’un poil sur les programmes et on aurait eu plutôt une soirée de divertissement, agrémentée par ceux qu’on appelle les petits candidats, plutôt en verve. En face, il y a les enthousiastes qui parlent d’une « avancée démocratique majeure » sur laquelle on ne pourra plus revenir et dont on se demande comment on a pu s’en passer si longtemps. Libération consacre un éditorial dithyrambique à Philippe Poutou, qui a eu le courage de dénoncer la corruption politique, en désignant les coupables.

N’ayant pas perdu une miette du spectacle, je me situerais plutôt entre les deux, les sceptiques et les enthousiastes. Ça n’était pas du tout ennuyeux, et comme scène de la vie politique au sens balzacien, c’était plutôt réussi. Un brin inquiétant aussi. L’éditorialiste du Figaro note qu’on était au-delà des querelles traditionnelles des tribus gauloises : « La profonde crise morale que traverse notre pays enfante des millions de protestataires qui, en ordre dispersé, réclament tout et son contraire. » Paul-Henri du Limbert n’a pas tout à fait tort. Je relativiserais pourtant, car la plupart des petits candidats ne pourront pas disputer les premières places aux principaux champions en lice.

Il n’empêche qu’il y a beaucoup à retenir de notre scène de campagne. Je pense à Jean Lassalle, témoin d’un monde rural en déshérence. Je pense aussi aux deux candidats trotskistes. Le qualificatif trotskiste vaut-il toujours autant ? Nathalie Arthaud et Philippe Poutou ont pour caractéristique d’associer un sens fort des réalités à un angélisme désarmant. Authentiques représentants des classes laborieuses dont ils expriment les frustrations et les colères, ils se montrent dans leurs propositions idéalistes absolus. L’angélisme dont ils sont les héritiers a pu être autrefois exterminateur. Ils l’oublient soigneusement. Leur Trotski n’a rien à voir avec le fondateur de l’armée rouge et le massacreur des marins de Kronstadt. Du XXe siècle, ils n’ont retenu que l’utopie qu’ils projettent encore sur un XXIe siècle incertain et toujours dangereux.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 6 avril 2017.