Steering Clear of « The Catholic Ghetto » - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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Steering Clear of « The Catholic Ghetto »

Traduit par Isabelle

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Il faut se résoudre à bannir l’expression « ghetto catholique » à tout jamais de notre langage. Ou bien, si nous l’utilisons, utilisons le terme précisément dans le sens du père John Tracy Ellis.

Sans doute « ghetto » n’aurait-il absolument jamais dû se transformer en métaphore. Au départ, au 16° siècle, c’était le nom précis d’un quartier de Venise où la population juive était obligée d’habiter, entourée de murs, et sous la surveillance de gardes armés. Pendant 300 ans, ce mot, par extension, a été utilisé uniquement pour désigner des quartiers similaires dans d’autres villes d’Europe. Au 20° siècle, les nazis ont créé de nouveaux ghettos pendant la courte vie du Reich. Comme il aurait été approprié, que ce terme demeure toujours attaché à ces pratiques condamnables que l’on aurait mises à l’écart une fois le ghetto juif aboli ! « Ghetto » aurait alors rejoint « Pogrom » et « Loi raciale » dans un musée du langage antisémite.

Ou bien, si on nous permettait un usage métaphorique, pourrait-on dire que le peuple juif devrait en être le propriétaire de droit. Eh bien, en fait, le premier usage métaphorique qui a été fait de ce terme fut en 1892 dans «  enfants du ghetto », le bestseller d’Israel Zangwill, à propos de la communauté d’émigrés juifs de Londres. La loi n’obligeait ces gens à rien. Plutôt, le ghetto dans lequel ils vivaient, écrit Zangwill, était « de formation volontaire » :

Des gens qui ont vécu dans des ghettos pendant deux siècles, ne sont plus capables d’en sortir pour la seule raison que les grillages sont tombés, ni d’effacer la marque sur leurs âmes en arrachant les insignes jaunes.

L’isolement imposé de l’extérieur semble être devenu la loi de leur existence.
Les immigrants catholiques aux Etats Unis au 19° siècle n’étaient pas des enfants d’un quelconque ghetto. On peut penser qu’ils devaient parfois faire face à l’hostilité qui ne veut rien savoir et au mépris des protestants qui avaient réussi. Mais ils vivaient ensemble dans des environnements plus pauvres d’italiens, d’irlandais, et de canadiens français, parce qu’à leur arrivée, c’est tout ce qu’ils pouvaient se permettre. Ils parlaient peu ou mal l’anglais, et avaient besoin de pouvoir communiquer facilement avec leurs voisins. Et ils pouvaient se remettre sur pieds plus vite s’ils vivaient auprès de parents et d’amis du vieux continent. C’aurait été la marque d’un auto-apitoiement excessif s’ils avaient appelé leurs quartiers « ghettos », et il semble qu’ils ne l’aient jamais fait.

En fait, le terme « ghetto catholique » n’est devenu commun que bien plus tard, dans les années 1950. Pour que l’expression paraisse avoir le moindre sens, il a fallu deux avancées supplémentaires. Tout d’abord, il est devenu commun d’appeler les quartiers afro-américains « des ghettos ». C’était une métaphore suffisamment raisonnable, étant donnés la ségrégation historique et les préjugés. Cependant, il y a eu un résultat regrettable : comme le sens largement métaphorique dépend selon Zangwill, de l’idée qu’un ghetto est « de formation volontaire », appeler un taudis « ghetto » implique également que ceux qui y vivent sont responsables d’y rester.

Ensuite les intellectuels catholiques américains ont commencé à appeler les universités catholiques des « ghettos » en les associant aux anciens quartiers d’immigrants. Ils ont fait cela de la meilleure et la pire des façons. Peut-être le meilleur a-t-il été un essai fondateur en 1955 écrit par le père John Tracy Ellis « Les catholiques américains et la vie intellectuelle. »

Il dit que les catholiques américains « ont souffert de la timidité qui caractérise les groupes minoritaires, des effets d’un ghetto qu’ils ont eux-mêmes favorisé et également, d’un sens d’infériorité induit par la conscience qu’ils avaient de l’insuffisance de l’enseignement catholique ».

L’anticatholicisme est réel, mais il n’est pas à blâmer : « Je crois fermement que le blâme principal revient aux catholiques eux-mêmes. Il réside dans leur mentalité souvent auto imposée de ghetto, qui les empêche de se mêler comme ils le devraient avec leurs collègues non catholiques, et dans leur manque d’application et d’habitudes de travail ».

L’accord de « Land O Lakes » a reçu beaucoup d’attention l’année dernière pour son 50° anniversaire, mais l’essai fondateur d’Ellis qui a mis en route un débat fameux sur «  l’état de la vie intellectuelle catholique » mérite une plus grande attention si nous croyons que quelque chose est allé de travers et si nous voulons comprendre pourquoi.

Ellis fait remonter la « mentalité de ghetto » au souci nécessaire de l’Eglise envers les immigrants : « Nous n’avons pas besoin que l’on nous dise ce qu’impliquait le statut d’immigrant en termes de pauvreté, de dureté de vie, oui et même d’illettrisme…nous pouvons facilement comprendre combien il était impossible pour nos ancêtres de produire quelque chose qui approche d’un effort de vie intellectuelle. » Il y a dans l’essai d’Ellis, un indéniable élitisme. Néanmoins il semble qu’il décrive ces immigrants à la manière d’un historien. Les universités et les collèges catholiques en fait, ont été fondés à l’origine pour rendre service à ces groupes. Et encore une fois, c’est de là qu’ils ont également développé une mentalité de séparation.

Nous pourrions penser que la solution d’Ellis serait pour les catholiques – les universités aussi bien que les individus – de rejeter leur sous-culture d’immigrants et de s’assimiler au courant principal de la culture américaine. Pourtant, il est clair que ce n’est pas son propos.

Dans certains paragraphes centraux, il devient évident qu’il accuse les universités catholiques de « trahison de ce qui est spécifiquement leur ».

Malheureusement, manquant de dotations, de formation, et d’équipement pour en faire des concurrentes à succès des universités séculières… les sujets dont ils auraient pu et dû faire une contribution unique ont été cruellement négligés.

Ellis dit qu’à la place, les institutions catholiques avaient été « absorbées dans leur folle poursuite de n’importe quelle fantaisie de passage qui traversait la scène américaine de l’éducation, et (avaient) trouvé relativement peu de temps pour des contributions distinguées de philosophie scolastique. » Il cite et approuve le grand président de l’université de Chicago, Robert Maynard Hutchins, qui reprochait aux universités catholiques de ne pas profiter de leur prétention à être « la tradition intellectuelle la plus longue de toutes les institutions du monde contemporain ».

Aussi, voilà l’idée importante d’Ellis. Si nous employons l’expression «Ghetto  Catholique » le moins du monde, nous ne devrions l’utiliser que pour parler du libre choix de demeurer séparés des non-catholiques, et pour rien d’autre – probablement, quand de le faire serait meilleur pour nous que pour eux. « Quitter le ghetto catholique » ne veut pas dire une obligation à s’assimiler ou à imiter. Plus important, cela ne peut pas contenir une trahison de « ce qui est distinctement nôtre », mais doit impliquer une plus grande attention à le cultiver.

20 février 2018

https://www.thecatholicthing.org/2018/02/20/steering-clear-of-the-catholic-ghetto/