Sain et sauf - France Catholique
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Padre Pio, ses photos inédites
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Sain et sauf

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Dans un article du 2 avril, j’ai parlé du « combat » que je menais contre le cancer. A ce moment-là j’ai écrit que je ne me considérais pas engagé dans un conflit contre la maladie :

Si j’avais des sorciers à la place de médecins, et si ces génies pouvaient conjurer et incarner le cancer et se tenir debout devant moi, les poings levés, alors, je combattrais – si c’était le moyen de guérir. Mais je coopère simplement avec le traitement. Et que la vol9onté de Dieu soit faite.

Deux semaines plus tard, je disais : « Il n’y a rien de tel que d’être traité pour le cancer pour que vous vous sentiez finalement malade. »

Avant le début de la chimiothérapie et de la radiothérapie le 19 mars, je ne me sentais pas malade le moins du monde. Mais après sept séances de chimiothérapie le lundi et trente séances de radiothérapie (du lundi au vendredi), j’étais plus malade que je ne m’étais jamais senti pendant mes soixante-dix ans : plus malade qu’avec la pire grippe que j’aie jamais eue ; pire même que la mauvaise réaction que j’ai eue quand j’ai été vacciné en même temps contre le choléra et la variole avant un malencontreux voyage en Asie en 1969.

Mais être « guéri » du cancer est une affaire délicate parce que la maladie a une façon de « se cacher » – je mets le mot entre parenthèses parce que le cancer n’est pas conscient. C’est une chose stupide, bien qu’il ne soit pas faux de dire qu’il continue à désarçonner quelques-uns des meilleurs scientifiques du monde.

Mais j’ai de bonnes nouvelles, qui seront les bienvenues, je le crois, pour les nombreux lecteurs de cette revue qui m’ont envoyé des vœux de complet rétablissement et ont insisté pour que je les tienne au courant. Une scanographie TEP (tomographie par émission de positrons) le 17 juillet n’a détecté aucun cancer dans mon corps. Comme je le dis, je ne peux pas proclamer que je suis guéri. En effet, je dois revenir à l’hôpital Memorial Sloan Kettering dans trois mois pour un suivi et ensuite, régulièrement pendant cinq ans. Puis, si je n’ai pas été renversé par un autobus dans la 5e avenue ou frappé sur la tête par un météore – ALORS nous pourrons dire que je suis guéri.

J’ai beaucoup de mauvais souvenirs parce que de nombreuses choses mauvaises sont arrivées dans ma vie, spécialement avant mon entrée dans l’Eglise, quand j’avais une vingtaine d’années et que je ne me marie vers trente-cinq ans. J’ai des regrets, et – malgré mon recours fréquent au sacrement de pénitence – quelques-uns atteignent presque le niveau de la hantise. Et, à certains égards, le cancer est loin d’avoir été la pire chose qui me soit jamais arrivée.

En fait, cela a peut-être été une bonne chose, une très bonne chose.

J’ai appris que les amis s’inquiétaient, y compris les lecteurs de ce site, et cela se trouve en haut de la liste, bien qu’au plus haut point il y ait ma femme, Sydny. Dans cet article précédent, j’ai noté que mes prières quand j’étais allongé sur la table pour les rayons étaient pour des amis mais aussi pour des étrangers, en particulier ceux que Syd et moi voyions dans les salles de réception de l’hôpital et qui étaient clairement là tout seuls. J’ai la réputation d’être un dur-à-cuire, et je suppose que j’aurais pu me débrouiller seul l’année dernière, mais – comme je l’ai dit à un membre du personnel de l’hôpital – « C’est bon d’être marié. » Je ne pensais pas que je pourrais aimer Syd davantage. J’avais tort, mais je ne le regrette pas.

Mais il y avait un amour encore plus grand. Parlant de confession, je me souviens d’avoir une fois admis auprès d’un prêtre que je n’étais pas sûr d’aimer Dieu : « J’aime ma femme et mes fils et mes amis et mon travail. .. mais… » Et il m’a interrompu : «  L’amour de Dieu est intellectuel. Bon, c’est ainsi jusqu’à ce que ce ne le soit pas. »

Ce ne l’est plus pour moi. Aimer Dieu, aimer Jésus, aimer le Saint Esprit, c’est s’abandonner. C’est ce que l’Extrême Onction est censé apporter et ce que la plupart d’entre nous ont entendu dire à maintes reprises – et les saints l’ont dit : « Vous devez vous abandonner à l’amour de Dieu ! » Ces mots ont du mérite, mais ce qui m’est arrivé à travers ma rencontre récente avec la mortalité (et ce qu’un mourant comprend quand son temps est venu) c’est que la Trinité est sa famille. Le ciel est sa famille. Le paradis est sa maison.

Robert Frost l’a présenté superbement dans le poème triste et magnifique « La mort d’un saisonnier ». Mary et Warren sont assis sous le porche de leur maison et discutent Silas, un ouvrier saisonnier âgé, qui est revenu dans leur ferme hors saison. Warren est las des allées et venues du vieil homme. Mary dit : « Sois gentil. » Elle est sûre que Silas qui dort près de la cheminée est revenu à la maison pour mourir.

Warren :

‘A la maison ‘ il se moque gentiment…

(puis il ajoute 🙂

‘ta maison, c’est l’endroit où, quand tu dois y aller,

On doit t’accueillir.’

(Et Mary dit 🙂

‘J’aurais plutôt dit que c’est quelque chose que tu n’as pas à mériter en quelque sorte.’

Notre paradis imaginé est mystérieux. Isaïe ( 64 :3 et Paul qui le cite dans 1 Cor 2 :9) nous avertit que « l’œil n’a pas vu, l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au le cœur de l’homme, tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui L’aiment. » (Isaïe dit « L’ attendent. »)

Ce que j’ai compris alors que j’aimais et priais, recevais la confession et la Communion, et comme j’attendais et m’abandonnais, me donnant permission d’embrasser la réalité de la mort… est que je suis là où je vais. Chez moi. J’ai toujours été chez moi. Mon corps n’est pas en train de mourir, en tant que tel, en ce moment, mais cela arrivera et quand ce jour viendra, je franchirai joyeusement le seuil de ma maison éternelle.

Je suis sûr que je pourrais encore être surpris si je tombais sur un serpent dans l’herbe, mais je ne vois pas ce qu’ il y a vraiment d’autre à craindre.
Mon amour est censé être imparfait. Celui du Christ ne l’est pas. Il m’aime, et c’est tout l’amour dont j’ai besoin pour me pousser à la prudence, au courage, à la tempérance, à la justice, et cela, c’est aimer Dieu.

https://www.thecatholicthing.org/2018/08/06/home-free/

Lundi, le 6 août 2018

Image : St Pierre invité à marcher sur l’eau par François Boucher, 1776 (Château de Versailles, Versailles, France)