Roe v. Wade contre l’Éternité - France Catholique
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Saint Benoît, un patron pour l'Europe
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Roe v. Wade contre l’Éternité

Avortement

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Le nouveau-né, Georges de La Tour, 1645*.

Le nouveau-né, Georges de La Tour, 1645*.

[Musée des Beaux-Arts de Rennes]

C’est une bonne nouvelle qu’après un demi-siècle l’Amérique retourne sous le règne de la loi et que ces fictions légales extravagantes – sous couvert de vie privée – soient maintenant dévoilées pour ce qu’elles sont par une majorité à la Cour Suprême.

Nous devinons cela à partir de la divulgation d’une décision de la Cour, probablement en raison de motifs politiques d’un légiste véreux. Nous pouvons voir la lutte qui s’annonce, mais les choses pourraient être pires en Amérique. Au Canada, par exemple, il n’y a eu aucune restriction que ce soit sur l’avortement durant quatre décennies, ce qui a contribué à rendre la culture encore plus pernicieuse.

Mais laissez-moi me livrer à un détachement céleste un bref moment, avant de retourner dans ce monde de boue. Car j’ai vieilli dans la croyance idiote que « Roe v. Wade » défigurerait pour toujours notre panel de lois dans tout l’Occident et non uniquement dans ce territoire compris entre deux océans.

Les passions politiques qui ont été exprimées, à la fois pour et contre les droits des femmes et des bébés peuvent encore s’avérer prématurées. Tout s’équilibre sur une seule décision de la Cour Suprême, rendue puis abrogée. Une jungle de mesures bureaucratiques peut être menée par le parti qui se sent lésé par l’abrogation. Mais cela ne semble guère probable dans le climat politique actuel.

Des manifestations, exprimant la rage de la Gauche, sont devenues l’ordinaire dans nos démocraties occidentales. Mais tant que leurs exigences extrémistes sont ignorées et que la police est suffisamment armée et entraînée pour maintenir l’ordre, la paix devrait grandir sur les divers fronts sociaux. Car « Roe v. Wade » était le signal de l’impiété. C’était le plus grand chancre dans les lois de la nation et cela a motivé l’anarchie.

C’était sur le front de la bataille pour la « modernité », qui s’est ramifiée dans toutes les directions et a donné l’impression apparente d’un changement moral – dans des améliorations prétendues comme dans le déclin. Un nouvel ordre post-chrétien est descendu dans l’obscurité ; une nuit pour la foi et la raison en notre temps.

Un homme, par exemple, peut cesser d’être un homme, ou une femme d’être une femme, par une extension absurde de ce « droit des femmes » – au-delà même de la féminité. Le droit de mourir, avec assistance médicale officielle, est venu diviser le public de façon similaire. En raison des progès techniques, d’autres « réformes » post-humaines sont suggérées.

La conscience également est rendue instable par les transitions techniques. Notre perception du bien et du mal est changée. Et pourtant la vérité ne peut pas changer sur le fond.

Une grande part de l’opposition à l’avortement est simplement de la répugnance. Celle-ci peut être surmontée avec de l’entraînement et de la pratique ; cependant, la répugnance peut être confondue avec une objection morale.Le meurtre d’un enfant à naître est une chose répugnante à voir, tout comme le meurtre des enfants déjà nés et de leurs aînés lors d’une guerre. Mais l’objection devient moins percutante à mesure que le témoignage devient moins immédiat. Il peut carrément sortir de l’esprit.

Je l’ai remarqué avec un extrait d’actualités sur Shanghai. Les autorités locales rassemblaient les chats de compagnie de ceux qu’ils avaient mis en quarantaine en raison du covid. Les malheureux miaulaient tristement dans des sacs au bord des rues, attendant les fonctionnaires qui viendraient leur briser le crâne. La télévision occidentale est plutôt collet monté, alors les stades ultérieurs du massacre félin ont été coupés. La pensée d’écraser de mignons petits chatons sans défense et tout et tout, pourrait nous déranger « sans nécessité ».

Pourtant c’est seulement du sentimentalisme. Le sang, pour nous, est du domaine des abattoirs, où les animaux sont tués plus humainement.

[…]

Les bébés dans le ventre maternel regardent naturellement de l’autre côté. Nous sommes, grâce aux progrès de la technique, maintenant quasi assurés qu’ils peuvent ressentir à peu près comme ceux déjà nés. Cela a augmenté le côté « répugnant » pour ceux qui ne sont pas déterminés à le repousser.

Car si nous ne saisissons pas vraiment l’argument du caractère sacré de la vie humaine – caractère qui est absolu et non relatif – nous pouvons toujours trouver une échappatoire. Nous pouvons concevoir une « procédure » qui sera sans douleur pour nous comme pour la victime. Et tous les sous-produits de cette opération de boucherie, dont des morceaux de bébés très rentables, peuvent être emballés professionnellement et réfrigérés pour un usage ultérieur.

Cela enlève toute objection contre « le côté répugnant » et donc enlève toute objection au « droit des femmes » (et par extension aux professionnels à leur service dans les avortoirs).

Il semble y avoir un large consensus public sur le fait qu’une femme ait droit à un avortement au cours du premier trimestre, moins grand en ce qui concerne le second trimestre et réduit à presque rien au troisième. La tendance de l’opinion publique a fluctué, mais essentiellement sur ce schéma.

De même la différence d’opinion entre les femmes et les hommes car, sans surprise, l’opposition au meurtre des enfants est plus élevé chez les femmes. Elles peuvent avoir des bébés et elles peuvent mieux imaginer ce que cela implique ; les hommes ne doivent se soucier que d’une partenaire éventuelle et sont donc statistiquement moins impliqués.

Le droit humain à la vie ne s’équilibre pas sur le caractère répugnant, bien sûr, mais sur des propositions philosophiques, légales et théologiques. Le changement dépend moins d’un caprice esthétique et davantage des parents et de la société dans laquelle les enfants sont élevés.

Dans tous les environnements chrétiens, on inculque l’idée du « droit à la vie ». La raison est ajoutée en soutien, et cette raison peut être (vraiment facilement) comprise. Quand les jeunes gens adoptent des opinions progressistes à l’université ou ailleurs, c’est généralement parce qu’ils rejettent la religion.

Il n’y aura jamais le temps d’énumérer les nombreuses conséquences, subtiles ou manifestes, de cette apostasie mais ici, au point décisif de cette question, la décision devient en effet simple – bien qu’elle puisse être incroyablement douloureuse. Beaucoup de petits détails sont résolus dans une seule question plus large : Dieu existe ou il n’y a pas de dieu.

— 
* Durant plusieurs siècles, cette peinture a été mal attribuée, tant en ce qui concerne l’artiste que le sujet, considéré comme une simple scène domestique. De nos jours, les spécialistes pensent qu’elle représente sainte Anne, la Vierge et le Christ nouveau-né.