L’envie d’écrire pour écrire de Claire Moyrand est indéniable et elle le fait avec art et subtilité. Si son héroïne, Suzanne Moisson, est « un personnage », elle n’est qu’un prétexte. Sa silhouette est changeante selon qu’elle se trouve en Provence à cultiver miel et lavande ou à Paris à dépenser son argent. Son cœur aussi fluctue selon qu’elle est « la très belle » de Weber, la femme déshabillée par Apollinaire ou la femme protectrice et patronne de Gustin le Résistant. L’important réside dans son goût pour l’existence qu’elle prend plaisir à savourer et qui donne envie de goûter à ses tartines ou de s’asseoir à ses généreux repas de la Saint-Sylvestre.
Écrivain en herbe, Claire Moyrand semble avoir la même indépendance d’esprit que Suzanne Moisson pour qui l’amour de la vie est plus fort que tous les « ragots » du monde. Et si c’était elle, la vraie protagoniste ? Digne descendante de R.-M. Gattefossé, inventeur de l’aromathérapie, et de la douce Suzon qui a « si peu en commun » avec Suzanne Moisson, Claire Moyrand ne serait-elle pas hantée par l’idée de « ne laisser aucune trace » derrière elle, si ce n’est sa très jolie écriture ?