Où va la Pologne ? - France Catholique

Où va la Pologne ?

Où va la Pologne ?

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Il y a certains sujets que l’on se doit de traiter avec une particulière délicatesse, d’autant plus que l’on n’est pas sûr soi-même de posséder les éléments pour un jugement équilibré. Ce disant, je pense particulièrement à la Pologne. La chère Pologne ! Est-il utile de rappeler qu’avec la patrie de saint Jean-Paul II les liens sont, pour beaucoup d’entre nous, d’étroite amitié. Pour qui a vécu l’étonnante épopée qui va de l’élection de Karol Wojtyla en 1978 à la chute du communisme en 1989, des souvenirs indéracinables hantent la mémoire. Faudrait-il les remettre en cause, avec la figure de Lech Walesa, héros de Solidarnosc et premier président de la Pologne libre ? Un dossier est brandi à son encontre, sorti des archives des services de sécurité du régime communiste. Le syndicaliste de Gdansk serait convaincu de coopération avec l’ennemi de l’époque.

Bien sûr, Lech Walesa s’insurge contre l’accusation fondée, dit-il, sur des faux typiques et grossiers. Mais il a contre lui le pouvoir actuel de Varsovie, qui s’emploie à dénoncer les conditions dans lesquelles le passage au régime post-communiste s’est accompli. C’est ainsi une page de légende qui se fissure. Walesa aurait été manipulé. Il y aurait eu volonté délibérée de ne pas solder le passé totalitaire, en opérant l’épuration nécessaire. Du coup, c’est la Pologne qui apparaît profondément divisée. Ce qu’on pourrait appeler la crise mémorielle accompagne une crise politique. Divisé sur le passé, le pays l’est d’autant plus dans le présent.

Une telle situation ne peut qu’attrister tous ceux qui aiment profondément la Pologne. Il faut ajouter que cette crise nationale s’associe à un malaise général qui affecte l’Europe, les nations à l’Est se démarquant de celles de l’Ouest. Malaise qui affecte aussi l’Église catholique, les épiscopats polonais et hongrois manifestant leur opposition dans les instances communes de l’épiscopat européen. C’est dire qu’il y aurait lieu d’approfondir l’analyse, ce qui n’est pas possible dans le cadre d’une rapide chronique. Pourtant, on est en droit d’exprimer un vœu à propos de la patrie de Jean-Paul II. Paul Claudel écrivait que la Pologne déchirée était une sorte de sacrifice spirituel et un peuple selon le cœur de Dieu. Qu’elle puisse toujours mieux répondre à sa vocation en inventant les moyens nécessaires pour sortir de la division !

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 24 février 2016.