Madagascar - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Madagascar

FRANCE Catholique n°3506 16 septembre 2016

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L’expression « fait-divers » n’est pas la moins anodine des curiosités de notre langage courant. En effet, elle désigne une rubrique d’informations en vrac aussi hétéroclites – sur « l’échelle des valeurs » – qu’un cambriolage, un acte de vandalisme, la fugue d’un pensionnaire de maison de retraite, la prise spectaculaire d’un pêcheur à la ligne, aussi bien qu’un incendie mortel ou qu’un crime de sang. Or il y a des « faits-divers » qui, par-delà leur instruction strictement judiciaire, donnent l’occasion d’attirer l’attention sur un arrière-plan très préoccupant et, cependant, rarement mis en lumière.

C’est le cas de l’assassinat, à Madagascar, de Magalie Chaigneau, 23 ans, et de Romain Bollon, 25 ans. Les corps sans vie de ces deux jeunes Français venus épauler une association de protection des cétacés, Cétamada, ont été trouvés au matin du 22 août sur une plage de l’île Sainte-Marie, jusqu’à hier réputée sûre, au nord-est de la Grande Île. Douze Français ont été assassinés au cours des 18 derniers mois à Madagascar. Un indicateur parmi d’autres du climat de violence qui, en vérité, frappe quotidiennement l’ensemble des Malgaches. Lors de l’émission du 31 août, Henry de Bonaventure, volontaire de l’Ordre de Malte rentré d’une mission d’un an auprès d’une maternité d’Antanarivo, a évoqué Honorine Rasoamanaina, retrouvée morte dans l’eau d’un canal le 22 mai. Ses blessures à la tête indiquent qu’elle a été cruellement assassinée. Cela faisait 24 ans qu’Honorine collaborait à l’œuvre du père Pedro. Depuis sa création, l’association Akamasoa a construit 3 000 maisons en dur pour loger des milliers de Malgaches, littéralement à la rue.

A l’antenne, Liva Eliasy, correspondant en France de La Croix de Madagascar (Lakroan’i Madagasikara), un hebdomadaire et un site en ligne qui jouissent d’une grande audience, et le père Léon Maxime Ratefiarivony, prêtre détaché auprès du diocèse de Mahajanga, au nord de la Grande Île, témoignent de l’accroissement de la pauvreté et de la violence, son corollaire. 90 % de la population vivent avec moins de 2 dollars par jour. Un appauvrissement d’autant plus inouï que Madagascar regorge de richesses (titane, nickel, or, pétrole, bois de rose, etc.) livrées aux accapareurs ou investisseurs extérieurs avec la complicité de pseudo-pouvoirs publics. Si bien que la Conférence épiscopale malgache a pu déplorer « les mensonges et les vols… jusqu’au sommet de l’État », et ajouter : « On a même vendu la souveraineté nationale ! »

Par violence, entendez la routine des vols (de bétail, notamment), des rackets, des crimes crapuleux, et l’irrésistible banalisation de la corruption qui, de proche en proche, de la sphère des autorités et des potentats locaux jusqu’aux indigents, gangrène toute la société malgache, y compris peu ou prou les chrétiens qui, par un jeu de réciprocité et un réflexe de survie, n’ont, pas plus que d’autres, la ressource d’échapper au fléau. Nation à la dérive, Madagascar souffre d’une instabilité politique chronique depuis 2009. Élu en 2013, l’actuel président Hery Rajaonari a beau avoir été destitué l’an passé par l’Assemblée nationale, il refuse de programmer une élection présidentielle anticipée. Et ce n’est pas l’Union africaine qui viendra au secours des Malgaches. Réunis cet été à Nairobi, ses chefs d’État ont donné raison à Rajaonari.

Les revues en revue

Jeudi 1er septembre, comme chaque premier jeudi du mois, la rubrique « Réflexion faite – La voix des revues » invite en studio Valérie Toranian, directrice de La Revue des Deux-Mondes, François Euvé, le rédacteur en chef d’Études, et Jean-Louis Schlegel, co-rédacteur en chef d’Esprit, à présenter leurs nouveaux sommaires.

Tandis qu’Esprit explore « l’avenir de la gauche », Études examine les attendus du Brexit avec un salutaire recul. Stéphane Rozès et Astrid du Lau d’Allemans discernent chez le peuple britannique un « moi fort » d’insulaires entraînés à ne compter que sur eux-mêmes, à l’opposé de nous autres Français dont l’addiction historique à un État fort secrèterait un « surmoi » anxiogène. La faute des « technos » de l’UE ? – agir en contradiction avec « le génie européen ». Du recul et de la hauteur, il en faut plus encore pour bien percevoir les conflits qui ravagent la Syrie et l’Irak. Loin des vues schématiques que, faute de nuances, entretiennent les médias, La Revue des Deux-Mondes souligne les continuités et les traumatismes historiques. Entre autres précieuses contributions, celle de Bruno Deniel-Laurent qui montre combien les Kurdes de Syrie, proches du PKK, se démarquent des Kurdes d’Irak conduits par Massoud Barzani, allié du président turc Erdogan.

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« Décryptage », Radio Notre-Dame, 100.7,

du lundi au jeudi, 18h17-19h10.