Les révolutions arabes expliquées aux nuls - France Catholique
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Les révolutions arabes expliquées aux nuls

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Le printemps 2011 a été pour les pays arabes ce qu’ont été les révolutions de 1848 aux pays européens. Difficile encore d’y voir clair pour un néophyte surtout quand s’y mêlent des querelles religieuses entre salafistes, frères musulmans, chiites, sunnites… Je savais l’Islam divisé — il n’y a donc pas que les chrétiens, c’est même bien pire chez les musulmans — mais je ne soupçonnais pas la profondeur des lignes de fracture et leurs répercussions politiques. Merci donc à Gilles Kepel et à son livre Passion arabe, Journal 2011-2013.

Le journal est divisé en 14 chapitres écrits et titrés selon les dates et les pays visités de mars 2011 à octobre 2012 par l’auteur. L’ouvrage n’est pas sans défaut — Gilles Kepel se complaît un peu trop à parler de lui-même et de sa grande connaissance d’un monde arabe, découvert lors d’un voyage d’étudiant il y a presque 40 ans — mais l’universitaire a le mérite de mettre à la portée d’un grand public, par un récit très coloré, les implications sociales, politiques et religieuses du printemps arabe, d’Israël à la Syrie, en passant par la Tunisie, l’Egypte, le Yemen, le Liban, la Libye et la Turquie. Une lecture pas très rassurante, en particulier sur le sort des chrétiens, victimes expiatoires des diverses factions d’un islam engagé dans une lutte à mort. Pas très convaincante non plus sur les choix d’une diplomatie Française qui a choisi le Quatar et l’Arabie saoudite sunnites contre l’Iran chiite : les premiers décrits clairement comme des tous petits pays, caractérisés par l’arrogance et la mauvaise éducation des nouveaux riches, et qui disputent à l’ancien et grand Iran le contrôle de la région ; car il s’agit bien d’une guerre sous couvert de religion qui se joue là-bas, où nous n’avons rien à faire, hormis de soutenir et d’aider les chrétiens abandonnés des puissances européennes et en particulier de la France.

Faut-il rappeler qu’alors que F Hollande revenait à peine d’un voyage en Israël, où il a affiché sa prise de partie sans aucune prudence, le Liban était une nouvelle fois le théâtre sanglant de cette guerre, sans que les médias français ne s’en émeuvent plus que ça. Chez Kepel, la passion n’exclut pas la lucidité sur les menaces qui pèsent sur cette belle région, berceau des communautés chrétiennes et chargée d’une histoire si ancienne que l’obscurantisme des salafistes n’en apparait que plus manifeste.

L’auteur rappelle aussi sa grande blessure : l’année même où Mohamed Bouazizi s’immmolait en Tunisie, feu Richard Descoing, directeur de Sciences-Po, supprimait la chaire du monde arabe fondée à l’IEP 25 ans plus tôt par Kepel !