Les lumières du 8 décembre à Lyon - France Catholique
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Van Eyxk, l'art de la dévotion
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Les lumières du 8 décembre à Lyon

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Accidentelle ou providentielle, l’origine de la fête des lumières de Lyon est en tous cas étrange.

par Pierre François

en partenariat avec

www.holybuzz.com

En 1643, une épidémie de peste fait de nombreuses victimes aux abords de la ville. Des femmes prient la Vierge d’épargner Lyon. Les échevins, le prévôt des marchands et les notables font alors le vœux de rendre un hommage annuel à la Vierge si elle les en délivre. C’est depuis cette date qu’un cortège municipal part chaque année le 8 septembre, date de la nativité de Marie, de la basilique St Jean vers Fourvière (1), premier lieu de fondation de la ville par les romains (2), où une chapelle est érigée à la suite de ce miracle. L’actuelle basilique est la conséquence d’une seconde imploration en 1870, lorsque les armées de Bismark ayant pris Paris sont aux portes de la Bourgogne et menacent de prendre la ville.

Des notables lyonnais proposent de reconstruire le clocher de la chapelle et de le surmonter d’une statue à l’occasion du bicentenaire de cet événement (et parce qu’il menaçait ruine dès 1830), proposition acceptée par le cardinal de Bonald en 1850. L’œuvre, en or, est du sculpteur Joseph-Hugues Fabisch et mesure 5,60 mètres de haut. Elle comporte à son pied l’inscription « O Marie, cette ville est à vous, protégez-la ! ».

Mais les dates vont s’entremêler.

L’empereur Maurice (582 + 602) a décrété que le 8 septembre était la date de la nativité de Marie et cette décision a été suivie d’effet puisqu’on la retrouve transcrite dans le Synaxaire (3) de Constantinople (qui date de 945 / 959). Le pape Sixte IV, en 1477, fixa la date de la conception de la Vierge au 8 décembre. Déjà St Bernard de Clairvaux, s’il s’opposait en 1146 à cette fête, écrivait dans sa « seconde homélie sur les gloires de la Vierge mère » que la sainteté de corps et d’âme de Marie était le préalable à la réception de l’Annonciation faite par l’archange Gabriel. Ce qui indique qu’il y avait déjà débat sur le sujet de l’immaculée conception. Si la source de la notion se trouve dans le protévangile de Jacques (IIe siècle), ce sont les croisades qui vont lui donner son élan, par l’intermédiaire de la fête byzantine de la Conception de la Très Sainte Mère de Dieu par Joachim et Anne, qui revient transformée dans les bagages des croisés. Et en 1830 la Vierge se présente rue du Bac à Catherine Labouré comme conçue sans péché.

Pour en revenir à Lyon, la statue devait être inaugurée le 8 septembre 1852, date de la nativité et du pèlerinage traditionnel de St Jean à Fourvière. Mais de fortes pluies ont inondé l’atelier du fondeur. On reporte donc la cérémonie au 8 décembre, fête célébrée à Lyon depuis le IXe siècle. Ainsi que son cortège de festivités : feux de Bengale et illuminations que les lyonnais font de leurs façades en cas d’événement exceptionnels (entrées royales, victoires militaires…). Le matin du 8 décembre1852, un orage violent s’abat sur la ville : le maître de cérémonie annule les feux d’artifice et veut reporter les festivités au dimanche suivant. Mais le ciel se dégage, on arrive quand même à inaugurer la statue et les lyonnais illuminent leurs maisons. À cette époque l’éclairage électrique public n’existe pas, ainsi que l’exprime Georges Rotheval (4) : « Quand les illuminations éclatèrent le 8 décembre 1852, la fée électricité sommeillait encore au domaine des songes. Alors ces dizaines de milliers de lumignons placés sur les fenêtres furent comme une féerie inattendue, du jamais vu. Telle fut la source de ces splendeurs qui font, des rues et des vitrines de Lyon … ». Jour pour jour, la ville fête alors avec deux ans d’avance la proclamation du dogme de l’immaculée conception par le pape Pie IX.

Ce n’est qu’en 1989 que la municipalité, alors dirigée par Michel Noir, relaye cet évènement en lui adjoignant les festivités profanes que l’on connaît aujourd’hui. Elle draine désormais des millions de visiteurs et s’étend sur quatre jours, du 6 au 9 décembre. Il serait illusoire de prétendre parler de toutes les initiatives auxquelles ces fêtes tant laïques que religieuses donnent lieu.

Le plus simple est de consulter les sites de la ville

http://www.lumieres.lyon.fr

et du diocèse

http://catholique-lyon.cef.fr

Notes :

(1) « la colline qui prie », par opposition à La Croix Rousse, « la colline qui travaille », selon Michelet.

(2) la basilique est d’ailleurs construite sur l’ancien forum.

(3) un synaxaire est un livre liturgique rassemblant pour chaque jour les lectures et les vies des saints que l’on célèbre.

(4) ROTHEVAL, Georges. – Fourvière aux cent visages. – Lyon : éd. Lyonnaises d’Art et d’Histoire, 1996, p. 123. On lira également avec beaucoup de profit l’ouvrage de : ESCOT, J., chanoine, Vice-Recteur de Fourvière. – Fourvière à travers les siècles. – Lyon : M. Lescuyer, 1954.