Les cent premiers jours du Président Trump - France Catholique
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Les cent premiers jours du Président Trump

Traduit par Antonia

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Aujourd’hui, selon mes calculs personnels, c’est le centième jour de la présidence de Donald Trump. Car, en tant que catholique, je compte aussi le premier jour, alors que le centième jour ne sera que demain pour les païens qui calculent les durées à partir de zéro.

A l’heure à laquelle ce message sera publié, la journée ne sera pas terminée. Qui sait ce qui peut encore arriver avant sa fin, au Congrès ou dans le monde où les batteries de missiles américaines attendent un tweet de Trump dans plusieurs endroits. Ce qui permet de comprendre pourquoi les païens préfèrent se donner un jour de plus avant de porter un jugement.

Sauf qu’ils n’attendent pas. J’ai lu ou plutôt parcouru des articles sur « les cent premiers jours de Trump » dans divers médias qui en parlent plutôt comme d’un siècle. Dans un cas, j’ai remarqué que l’auteur qualifiait l’événement d’«anniversaire», et compris que j’avais affaire à un illettré et un ignare en arithmétique.

Je ne dis pas que Dieu ne l’aime pas ni que je devrais refuser de l’aimer comme mon prochain. Je me bornais à formuler une observation pragmatique, comme c’est mon habitude, à propos de mes anciens collègues du monde journalistique ; et à conseiller à mes lecteurs qu’ils feraient mieux de s’en tenir aux poètes, ainsi qu’aux Pères et aux Docteurs de l’Eglise.
« Cinquante nuances de gris ». Pourquoi cinquante ? Je le saurais peut-être si j’avais lu le livre. Autrefois, j’aurais sans doute été obligé d’en faire la critique, mais actuellement je suis déchargé de ces obligations. Je ne suis plus astreint à lire de la pornographie pour « faire vendre des journaux ». D’ailleurs, les journaux se sont affadis, en passant par cinquante nuances de gris ou davantage.

Dans un magazine dont j’ai été autrefois le rédacteur, nous avons eu un débat pour savoir quels chiffres sont drôles. Nous avons conclu que les chiffres ronds ne sont jamais drôles à moins d’être répétés de façon comique. Il vaut mieux utiliser des chiffres non entiers comme s’ils étaient ronds. Mais pourquoi, dans un contexte littéraire, un nombre à deux ou trois chiffres est-il plus drôle qu’un autre ?

La question est restée sans réponse. Le contexte peut être décisif, mais impossible de tout comprendre. Le point sur lequel nous sommes tombés d’accord est que les chiffres impairs sont plus drôles que les pairs, et que les nombres premiers ont mystérieusement plus de chances de déclencher le rire que les nombres composés.

C’était un débat pour la section « Questions ». L’auteur de la proposition devait écrire une parodie de théorie scientifique sur le sujet. Qui n’a jamais vu le jour. Nous sommes passés à une question plus pratique posée par un lecteur : pourquoi les serpillières sont-elles plus efficaces que les balais-éponge sur n’importe quel sol ? Question qui n’a jamais eu de réponse non plus.

Franklin Delano Roosevelt est le président plein d’esprit, mais dénué d’humour, qui a le premier lancé l’histoire des cent premiers jours. Pour moi, sa présidence est un remarquable triomphe de l’escroquerie, car pendant les années de ses mandats les Etats-Unis connurent la Grande Dépression, mais la ressentirent moins durement parce que M. Roosevelt agissait (c’est la deuxième guerre mondiale qui finalement arrangea tout).

Il avait promis d’agir vite, mais s’il ne parvint pas (à l’impossible nul n’est tenu) à freiner la Grande Dépression sur laquelle Herbert Hoover n’avait pas légiféré, il fut capable de mettre en place les innombrables piliers de la vaste bureaucratie d’un nouvel Etat-providence pendant cette courte période. Le Congrès fut intimidé par l’ampleur de sa victoire. Et d’ailleurs, les deux chambres étaient pleines à craquer de démocrates.

Les gens veulent que leurs présidents « agissent ». C’est ce qui rapproche Trump de Roosevelt. Chacun peut constater que c’est un « homme d’action ». Et les hommes d’action « agissent » en cent jours. Les médias qui aimaient Roosevelt, mais détestent Trump, concèdent néanmoins que ce dernier s’est fortement démarqué de son prédécesseur.

« Quelle différence en cent jours », marmonnent-ils, et pas in petto. C’est tout le ton du gouvernement qui a changé.

En fait, ce ton a changé dès les premières cent secondes. Le discours d’investiture de Trump l’a clairement démontré. Personne ne pourra dorénavant le confondre avec Obama.

A mon avis, tout le reste n’est que du vent. L’homme lui-même, avec sa candeur parfois désarmante, semble plus abasourdi par l’ampleur du gouvernement dont il a hérité que n’importe quel débutant. Probablement parce qu’il n’était pas un professionnel de la politique jusqu’à ce jour décisif. Il n’avait pas pu être préparé à la vie qu’on mène dans ce qui a été présenté (par moi, mais aussi je crois par Malcolm Muggeridge) comme le plus grand asile d’aliénés du monde. Et seuls quelques-uns des autres aliénés ont changé.

Il allait bâtir un mur pour empêcher les Américains d’aller au Mexique. Ou peut-être était-ce l’inverse. Il allait faire arrêter tous les criminels et rendre leur grandeur aux forces armées. Il allait investir des sommes importantes dans des projets d’infrastructure, réduire les impôts et redémarrer l’économie.

Donc, d’après moi, juste un autre « progressiste », un autre Roosevelt. Un véritable homme d’action.

A ses débuts, Obama avait laissé entendre avec modestie qu’il lui faudrait bien un millier de jours, ce qui est tout à son honneur. Mille jours : une période liturgique. Notre religion aujourd’hui est la politique, et à en juger par les médias, les hommes politiques sont nos dieux. Ils ont des qualités humaines, comme les dieux de l’Antiquité, et de petites faiblesses qui les font redescendre sur terre, mais quiconque souhaite « de l’espoir et du changement » se tourne vers ces dieux.

« Les dieux qui échouent »1 pour le dire en d’autres termes. Les dieux qui n’osent pas ne rien faire (à la différence de Harding, Coolidge et Hoover) parce que, après tout, ils ont été élus pour agir ; prendre les mesures que le peuple juge indispensables, aussi incompatibles soient-elles avec le long terme : réparer les routes, réduire les impôts, commencer une guerre etc.

Dans l’ancien monde de l’Empire romain, l’Eglise prêchait : « rendez à César ce qui est à César ». Car les Césars de ce monde vont et viennent : ils n’ont guère d’importance. L’Eglise a été accusée d’athéisme et de blasphème parce qu’elle ne pensait pas qu’ils étaient des dieux. Son chef à elle était l’Homme sur la Croix et elle a été condamnée pour s’être mise en travers de la majestueuse « progression » de César.

L’Homme pour lequel « un seul jour est comme mille ans et mille ans sont comme un seul jour ». [2 Pierre, 3, 8]

Photographie : César par Adolphe Yvon, 1875, Musée des Beaux-Arts, Arras.
David Warren est un ancien rédacteur du Idler Magazine et un chroniqueur de l’Ottawa Citizen. C’est un spécialiste du Proche-Orient et de l’Extrême-Orient.

Vendredi 28 avril 2017

https://www.thecatholicthing.org/2017/04/28/the-one-hundred-days/