Le peuple des sans-abri - France Catholique

Le peuple des sans-abri

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La mairie de Paris a pris une excellente initiative, en lançant dans la nuit du 15 au 16 février 1700 bénévoles, répartis en 350 équipes à la recherche des sans-abri dans la capitale. Il y avait polémique à propos de leur nombre. Suite à cette grande maraude, les autorités sont plus à même de faire des évaluations. 2025 personnes dormant dans la rue ont été ainsi contactées, mais il faut leur ajouter d’autres chiffres provenant de la sncf, des parkings, du métro par exemple. Ce qui nous amène aux environs de 3000. Ce n’est pas tout encore, car il y a les 672 hébergés de façon provisoire dans divers abris, ce qui fait 3624 personnes au total. Une évaluation plus large aboutit aux environs de 5000, car beaucoup d’espaces n’ont pas été visités, comme les talus du périphérique ou les chantiers.

Les statistiques sont nécessaires et elles sont parlantes. Cependant, les bénévoles qui ont participé à cette nuit de la solidarité ont surtout rencontré des personnes, qu’on peut appeler par leur nom et qui peuvent raconter leur parcours, toujours poignant. Beaucoup d’entre elles sont issues des migrations, mais on n’a pas fait, à ma connaissance, le décompte entre les sans-domicile fixe qui sont nos compatriotes et ceux qui proviennent de pays plus ou moins lointains. Pour vraiment prendre conscience de pareils phénomènes, il faudrait un suivi qui permette une vraie familiarité, grâce à une mise en confiance.

Les paroisses parisiennes sont associées à cette tâche pressante. Une association Aux captifs la libération est même vouée à cette mission, et on a tout intérêt à écouter ce qui ressort de ces contacts, de nuit le plus souvent. Nos sans-abri souffrent souvent d’abord de solitude, ils ont sombré à la suite de la rupture de leurs liens familiaux et sociaux. Il faut leur porter secours, leur offrir un gîte, mais aussi les accompagner au-delà du grand froid, car il leur arrive de mourir en plein été. La dépression, l’alcoolisme les guette. Et ils ne peuvent même pas compter sur la solidarité des gens de la rue. L’extrême misère provoque presque sans cesse des conflits et des bagarres. C’est pourquoi les sans-abri refusent souvent de rejoindre des lieux d’accueil dont ils redoutent l’ambiance et la promiscuité. Je connais une personne qui vit au bord de la Marne depuis treize ans, sous une tente. Il a fallu les inondations récentes pour le déloger. Comment apporter à chacun et à chacune cette amitié dont ils ont besoin ? Interrogeons nos habitués des maraudes. Ils nous diront le fond des cœurs.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 22 février 2018.